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Parlement européen - Budget de l'Union européenne
Le Parlement européen adopte le cadre financier pluriannuel (CFP) 2014-2020 de l’UE dénoncé du côté des eurodéputés luxembourgeois, toutes tendances confondues, comme au minimum très insuffisant
19-11-2013


2014-2020 : le nouveau cadre financier de l'UELe Parlement européen a approuvé, le 19 novembre 2013, le budget à long terme de l’Union européenne pour la période  2014 à 2020, le fameux cadre financier pluriannuel (CFP). Le texte a été voté à une large majorité de 537 voix - sur les 682 eurodéputés présents - émanant des groupes PPE et ALDE ainsi que des socialistes, tandis que les Verts et la gauche radicale se sont prononcés contre, dénonçant un budget d’austérité imposé aux Européens. Le CFP 2014-2020 prévoit ainsi 908 milliards d'euros en crédits de paiement et 960 milliards en crédits d'engagement, soit respectivement 3,7 % et 3,5 % de moins que pour le budget 2007-2013.

Conditions remplies pour le Parlement européen

Après six mois d'intenses négociations, les députés ont ainsi estimé que les conditions définies dans la résolution de juillet du Parlement européen - adoptée suite à un accord politique de haut niveau entre le Parlement, la présidence irlandaise et la Commission - ont été remplies, suivant la position du président du Parlement européen, Martin Schultz.

Outre une solution au manque récurrent de financements afin que la Commission puisse respecter ses obligations juridiques et financières et éviter que l'année 2014 ne commence en déficit – trouvée grâce au vote par le Conseil des budgets rectificatifs manquant pour 2013 – le Parlement réclamait notamment un accord sur les différents programmes européens, définis en codécision entre lui-même et le Conseil. Le vote du budget va permettre l'adoption formelle par le Parlement pendant cette session plénière d’une série de programmes européens, notamment en matière de recherche, de formation des jeunes, et de transport, selon le communiqué diffusé sur le site du Parlement européen.

Le groupe à haut niveau sur les ressources propres de l’UE "débutera prochainement ses travaux"

La question la plus sensible, celle de la mise en place d’un groupe de haut niveau sur les ressources propres de l’UE, afin de réformer le dispositif de revenus de l'UE, "devenu incompréhensible, compte tenu de toutes ses exceptions, ses remboursements, ses sources de financement différentes et de sa dépendance aux budgets nationaux", aurait également trouvé une solution. Ainsi le communiqué du Parlement souligne que les "Etats membres ont accepté la mise en place de ce groupe, qui débutera prochainement ses travaux", la première réunion étant prévue le 18 décembre selon l’AFP. En revanche, la question de la personnalité appelée à le présider reste encore en suspens.

A la veille du vote, le président du groupe S&D, Hannes Swoboda, avait estimé que "la lettre [de la présidence lituanienne sur le sujet] approuve clairement la création d'un tel groupe à haut niveau", notant néanmoins qu’elle aurait pu être plus claire, rapporte l'Agence Europe. Guy Verhofstadt, le président du groupe ADLE, a de même regretté un usage très large du conditionnel dans la missive.

Flexibilité et clause de révision

A cela s’ajoutent deux autres requêtes qui ont été acceptées: ainsi la "flexibilité presque totale pour déplacer les fonds non versés (crédits de paiement) d'un exercice budgétaire à l'autre ainsi qu'une grande flexibilité pour transférer les crédits d'engagements entre les exercices budgétaires et entre les catégories de dépenses" de même que l’introduction d’une "clause de révision". Celle-ci "contraindra la Commission européenne à présenter en 2016 un examen du fonctionnement du budget à long terme de l'UE. Cet examen devra prendre en compte la situation économique du moment. Une attention particulière sera accordée pour aligner la future durée du CFP, actuellement de 7 ans, aux cycles politiques de 5 ans des institutions européennes. Une proposition législative de révision accompagnera cet examen", détaille encore le communiqué du Parlement européen.

Une flexibilité et une souplesse bienvenues selon la Commission. Elles devraient en effet "permettre de gérer le recul sans précédent des montants, avec 40 milliards en moins", a estimé de son côté le commissaire européen chargé du Budget, Januz Lewandowski.

Les réactions luxembourgeoises

Claude Turmes, eurodéputé écologiste luxembourgeois (Verts/ALE), a dénoncé une "farce". "La décision prise aujourd'hui par le Parlement européen est une farce démocratique et budgétaire: le Président du Parlement  [Martin] Schulz  a abusé de l’un de ses privilèges pour restreindre les droits démocratiques des députés", a-t-il accusé, alors que le groupe des Verts avait réclamé la mise aux voix des amendements déposés sur le CFP. "Lors du vote de cette semaine, les députés ne n'ont pu voter que sur le texte de compromis présenté sans introduire aucun amendement".

"Le fond de cette décision est claire: Schulz voudrait se placer sur le chemin de l’austérité aveugle et autoritaire prônée par la chancelière allemande au mépris de toutes les mises en garde et se positionner ainsi pour obtenir un poste de commissaire européen. Avec sa façon d’agir, il n'a pas seulement restreint les droits démocratiques fondamentaux, mais il est passé à des gesticulations menaçantes insensées. Cela donne à la Commission européenne la possibilité de couper y compris les ressources des Fonds structurels destinés aux pays en crise et de pousser ces derniers encore plus profondément dans la crise de la dette et le chômage élevé", a-t-il poursuivi.

Et de conclure que "le projet européen et la démocratie européenne ont été affaiblis par le vote d'aujourd'hui".

De son côté, l’eurodéputé socialiste luxembourgeois Robert Goebbels (S&D) s'est également prononcé contre le CFP, jugeant la programmation financière "manifestement insuffisante face aux nécessités identifiées par le Parlement, la Commission et même le Conseil. Même si le Parlement a réussi à négocier quelques crédits supplémentaires, mais au total insignifiants, l'Union européenne reste condamnée à la cure d'austérité décidée par les chefs d'Etat et de gouvernement".

Pour l’eurodéputé socialiste, "le fait est que l'Europe ne se donne pas les moyens de notre ambition commune, et que la solidarité européenne s'exprimera jusqu'en 2020 par des budgets communautaires restant bien en-dessous d'un point de pourcentage du PIB commun. Je ne veux pas m'associer à ce plus petit dénominateur commun de la solidarité, ou plutôt de l'absence de solidarité européenne", a-t-il encore précisé.

Dans un entretien avec Paperjam le 15 novembre 2013, l’eurodéputé conservateur luxembourgeois Frank Engel (PPE) avait déjà donné son sentiment sur le vote du CFP, notant que "les enjeux seront donc inexistants: un milliard par-ci, un milliard par-là. Des gouttes sur une pierre chaude, comme disent les germanophones…", car même dans le cas d’un blocage du CFP au Parlement, l’UE serait contrainte de fonctionner sur les douzièmes provisoires. Et de dénoncer "la grande blague de ce parlement, qui est censé détenir les pouvoirs constitutionnels et budgétaire. En fait, il n’a rien!"

Pour ce qui est des prochaines étapes, le Conseil devrait approuver le cadre financier pluriannuel lors du Conseil compétitivité du 2 décembre 2013.