L’Agence des droits fondamentaux de l’UE (FRA) a publié le 5 mars 2014 un rapport présentant les résultats de la plus grande enquête mondiale sur la violence à l’égard des femmes, qui révèle l’étendue des abus dont les femmes sont victimes chez elles, au travail, en public et en ligne.
Cette enquête de la FRA est la première du genre à porter sur la violence à l’égard des femmes dans les 28 États membres de l’UE. Dans le cadre d’entretiens, 42 000 femmes issues de l’UE ont été interrogées sur leurs expériences de violences physiques, sexuelles ou psychologiques, perpétrées notamment par un(e) partenaire intime ("violence domestique"). D’autres sujets sont également abordés, tels que les expériences en matière de traque furtive, de harcèlement sexuel, de violences pendant l’enfance, et le rôle joué par les nouvelles technologies dans les abus subis.
Les résultats de l’enquête indiquent qu’une femme sur trois a subi au moins une forme de violence physique et/ou sexuelle depuis l’âge de 15 ans, une femme sur cinq a fait l’objet d’une traque furtive (« stalking »), et une femme sur deux a déjà été victime d’une ou de plusieurs formes de harcèlement sexuel.
"Les chiffres révélés par l’enquête ne peuvent et ne devraient tout simplement pas être ignorés", estime Morten Kjaerum, le directeur de la FRA. "L’enquête réalisée par la FRA montre que les violences physiques, sexuelles et psychologiques à l’égard des femmes constituent de sérieuses violations des droits humains dans tous les États membres. La vaste étendue de ce problème indique que la violence à l’égard des femmes ne touche pas seulement les victimes, mais se répercute aussi chaque jour sur la société. Il est dès lors indispensable que les décideurs politiques, la société civile et les intervenants de première ligne revoient les mesures permettant de traiter toutes les formes de violence à l’égard des femmes, quel que soit l’endroit où elle se produit. Des mesures visant à remédier à la violence à l’égard des femmes sont désormais attendues à un niveau supérieur".
Il ressort des réponses données lors de cette enquête que :
Les résultats dressent ainsi un portrait d’abus graves, qui touchent la vie de nombreuses femmes, mais dont le signalement aux autorités reste faible. Par conséquent, l’envergure de la violence envers les femmes n’est pas reflétée par les données officielles.
L’enquête montre aussi que les conséquences émotionnelles et psychologiques de la violence physique et sexuelle peuvent être durables et profondément enracinées. Ainsi, 21 % des victimes de violence sexuelle ont été en proie à des crises de panique après un incident, 35 % sont devenues dépressives à la suite de violences sexuelles et 43 % d’entre elles ont éprouvé des difficultés dans une nouvelle relation.
L’enquête sur laquelle se fonde le rapport montre clairement que différents acteurs doivent agir pour lutter contre la violence à l’égard des femmes, notamment les employeurs, les professionnels de la santé et les fournisseurs de services internet.
La FRA a formulé plusieurs propositions pour améliorer la situation et soutenir les décideurs politiques à l’échelle de l’UE et au niveau des États membres dans l’introduction et la mise en œuvre de mesures exhaustives permettant de prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes.
Il est recommandé aux États membres de l’UE de ratifier la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul).
Les États membres de l’UE devraient considérer la violence conjugale comme un sujet nécessitant l’intervention de l’État plutôt que comme une affaire privée. La législation de tous les États membres de l'UE devrait offrir aux femmes mariées la même protection en matière de viol qu’aux femmes qui ne le sont pas, et traiter la violence domestique comme une question de préoccupation publique majeure.
Les États membres de l’UE devraient revoir la portée actuelle des réponses législatives et politiques au harcèlement sexuel en reconnaissant que celui-ci peut se produire dans divers environnements et recourir à divers moyens tels qu’internet ou le téléphone portable.
La police, les professionnels de la santé, les employeurs et les services spécialisés d’aide aux victimes devraient être formés, disposer de ressources suffisantes et être investis des pouvoirs leur permettant d’aider les victimes.
La police et les autres services pertinents devraient être formés pour reconnaître et comprendre l’impact de la violence psychologique sur les victimes de façon à garantir que toutes les formes de violence à l’égard des femmes (et des filles) dans divers environnements soient reconnues, enregistrées et traitées.
La police devrait être encouragée à repérer et examiner systématiquement les cas dans lesquels la traque furtive par internet et le cyberharcèlement jouent un rôle.
Les plateformes internet et les réseaux sociaux devraient aider les victimes de cyberharcèlement de manière proactive à signaler les abus et devraient être encouragés à limiter les comportements indésirables.
Les services d’aide spécialistes sont invités à répondre aux besoins des victimes qui souffrent de sentiments négatifs tels que la culpabilité ou un sentiment de honte à la suite de violences.
Les campagnes organisées sur la violence à l’égard des femmes et les réponses à cette violence devraient s’adresser tant aux hommes qu’aux femmes. Les hommes devraient être engagés de manière positive dans des initiatives qui traitent la façon dont certains hommes sont violents à l’égard des femmes.