C’est le CSV qui a remporté le scrutin européen de 2014 au Luxembourg avec plus 37,65 % de voix, donc 6,3 % de plus qu’aux élections de 2009, le faisant ainsi renouer avec son grand succès de 2004. Fait inédit, le CSV a remporté la majorité dans toutes les communes du pays.
L’autre grande surprise des élections européennes a été le score du LSAP, qui est tombé à 11,75 %, perdant 7,75 % par rapport à 2009, alors que déjà à l’époque, il avait déjà perdu 3,5 % par rapport à 2004. Avec ce score, les socialistes luxembourgeois, sont devenus la quatrième force politique aux élections européennes, derrière les Verts et le DP, alors qu’en 2009, ils étaient la deuxième force, devançant les libéraux de seulement 0,7 %.
Une autre surprise a été le résultat de Déi Gréng, qui ont, avec 15 % des voix (-1,8 %), dépassé le DP (14,8 %, -3,9 %) devenant ainsi pour le scrutin européen la deuxième force politique. Ce résultat a été possible à cause du bon résultat personnel du député européen Vert Claude Turmes, réélu avec 69 797 voix contre 77 306 voix en 2009, et qui entamera ainsi son quatrième mandat. Ce qui a aussi permis aux Verts de dépasser le DP a été la chute des voix récoltées par l’eurodéputé libéral Charles Goerens, dont le score personnel est tombé de plus de 111 000 voix en 2009, le score personnel le plus élevé de ce scrutin, à 82 975 voix en 2014.
La répartition des six sièges d’eurodéputés du Luxembourg n’a néanmoins pas subi de changements. Le CSV a gardé ses 3 sièges, le DP et Déi Gréng également, et le LSAP a réussi à garder le sien.
Avec 126 888 voix contre 104 900 voix en 2009, la vice-présidente de la Commission européenne, Viviane Reding, est de loin la première élue du CSV, suivie par l’eurodéputé Georges Bach, élu avec 68 242 voix (contre 46 257 voix en 2009) et l’eurodéputé Frank Engel, élu avec 65 884 (contre 47 852 voix en 2009).
Claude Turmes et Charles Goerens ayant été réélus, le LSAP enverra l’ancienne ministre (1989-19999 et 2004-2013) et ancienne députée (1999-2004) Mady Delvaux-Stehres au Parlement européen pour son premier mandat d’eurodéputée, élue avec 33 321 voix.
Parmi les partis qui n’ont pas obtenu de siège, l’ADR est arrivé à 7,53 % (+0,1 %), Déi Lénk à 5,75 % (+2,4 %) et les Pirates à 4,3 % (+ 4,3 %).
Le nombre des électeurs inscrits a été en 2014, avec 264 433 personnes, nettement supérieur aux 240 673 inscrits de 2004. 226 217 inscrits sont allés voter, contre 218 423 en 2009. Mais 203 770 bulletins seulement ont été considérés comme valables – 198 364 en 2009.
Viviane Reding exultait à la Maison de l’Europe après s’être fait applaudir par les militants du CSV. Elle a revendiqué pour Jean-Claude Juncker, le candidat tête de liste du PPE, la famille politique européenne qui a remporté le plus grand nombre de sièges au Parlement européen, le poste de président de la Commission. Sur le plan intérieur, elle a lancé aux partis de la coalition gouvernementale, qui n’ont recueilli ensemble que 41 % des voix, la recommandation qu’ils s’interrogent sur leur légitimité. Le président du CSV, Marc Spautz, a, lui, raillé le résultat du LSAP qui recueillait dans le temps 29 % et pas 11,75 %, et ceux du DP qui est passé de 28 % de voix aux européennes dans les années 90 à 14 % en 2014. Evoquant les 15 % des Verts, deuxième force politique issue du scrutin, et ce critère officieux qu’un parti peut prétendre à être un parti populaire à partir de 20 % de voix, il a revendiqué ce qualificatif pour le seul CSV. Et comme Viviane Reding, il s’est demandé "quelles réformes un gouvernement pourra faire avancer s’il est en place depuis 5 mois et qu’il n’obtient plus que 41 % des voix". La jeunesse du CSV, la CSJ, a elle aussi abondé dans le même sens, jugeant que "le gouvernement a été très affaibli", et que même s’il ne s’agissait pas d’un scrutin national, "un avertissement très clair" avait été lancé aux partis du gouvernement qui n’ont recueilli que 41 % des votes contre "presque 38 % au CSV tout seul".
Quant à Jean-Claude Juncker, il a déclaré devant le micro de RTL que le PPE avait clairement remporté les élections gagné et que "si tout le monde respecte ses engagements, je serai désigné comme président de la Commission". Il a ajouté qu’il travaillerait à avoir une majorité au Parlement européen et que d’ores et déjà, des contacts dans ce sens avaient été pris.
Les Verts, qui ont remporté la deuxième place à ces élections, ne sont pas mécontents de leur résultat, malgré la perte de presque 2 % de voix. Pour Claude Turmes, ce résultat est le résultat du "bon travail des Verts au Parlement européen".
Il ramène la victoire du CSV à "l’effet Juncker", pour lui "le septième candidat du CSV", comme il y a eu un "effet Schulz" qui a gonflé les résultats du SPD. Pour lui, les Verts sont au Parlement européen "le moteur et le lien entre les socialistes et les libéraux européens à travers leurs propres rapporteurs qui font avancer la législation européenne".
Le Premier ministre Xavier Bettel a évoqué des sentiments mêlés, a invoqué lui aussi "l’effet Juncker", et félicité le CSV pour son bon résultat. Pour lui, "le gouvernement n’a pas été désavoué", car il s’est agi d’élections européennes "strictement séparées des élections politiques nationales" où les citoyens ont voté pour Jean-Claude Juncker "parce qu’ils ont voulu un Luxembourgeois à la tête de la Commission". Il s’est par ailleurs déclaré satisfait du vote pro-européen des Luxembourgeois et a qualifié les pertes du DP,- 3,9 %, de "légères".
Quant à Charles Goerens, qui n’a jamais fait mystère du fait qu’il soutiendrait Jean-Claude Juncker pour qu’il devienne président de la Commission européenne si le parti de ce dernier devait remporter les élections, il a émis l’espoir que "le Conseil européen fasse une lecture correcte du résultat des élections la semaine prochaine (le 27 mai, ndlr)". Il a lui aussi imputé la perte de presque 30 000 suffrages nominatifs en sa faveur à "l’effet Juncker".
Si le LSAP a pu sauver son siège unique au Parlement européen, il encaisse une défaite cuisante. Il s’agit d’un "très mauvais résultat qui me touche beaucoup", a déclaré Mady Delvaux-Stehres, la tête de liste des socialistes. Le LSAP doit se poser des questions, estime-t-elle. "Les Luxembourgeois veulent Jean-Claude Juncker comme président de la Commission", a-t-elle jugé, et elle a aussi parlé d’une "revanche des électeurs" qui, après les élections d’octobre, "pensent que la démocratie n’a pas été respectée parce que le parti le plus fort ne fait pas partie du gouvernement". Pour elle, "le LSAP doit réfléchir à cette défaite". La jeune candidate Catía Gonçalves a écrit dans le même esprit sur FaceBook : "Le LSAP doit se remettre en question, assumer sa responsabilité et se réinventer". Le nouveau président du LSAP, le député-maire de Diekirch, Claude Haagen, a parlé d’un "résultat terriblement mauvais" voire d’une "débâcle". Dans le Sud du pays, notamment, où le LSAP avait traditionnellement ses bastions, ses pertes oscillent entre 7,5 % à Differdange et 14 % à Dudelange.