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Santé
Les États membres ne peuvent se fonder sur la seule durée d'un séjour pour déterminer le lieu de résidence d'une personne, selon un arrêt rendu par la Cour de justice de l’UE
05-06-2014


CJUELes États membres ne peuvent se fonder sur la seule durée d'un séjour pour déterminer le lieu de résidence d'une personne, selon un arrêt rendu par la Cour de justice le 5 juin 2014 dans l’affaire C‑255/13, en réponse à une question préjudicielle de la Haute Cour irlandaise (High Court). Celle-ci avait été saisie en 2011 par un ressortissant irlandais qui, lors de vacances en Allemagne en 2002, est grièvement tombé malade après un infarctus. L’Irlandais, âgé alors de 45 ans et surnommé "I" par la Cour, souffrait notamment d’une quadriplégie qui l’empêchait de rentrer en Irlande. En 2011, la direction irlandaise de la santé publique HSE lui a refusé le renouvellement du formulaire E112 (qui couvre les frais afférents au traitement médical qui lui est prodigué en Allemagne), au motif qu’il résidait désormais en Allemagne alors que le formulaire avait été renouvelé une vingtaine de fois depuis cette date. Malgré la mort de l’intéressé en avril 2014, la Haute Cour, qui doit trancher entre l’intéressé et le HSE, a maintenu la question "aux fins de la procédure nationale".

La quatrième chambre de la Cour de justice de l’UE considère que la juridiction de renvoi doit tenir compte du fait que si l’intéressé séjournait onze ans en Allemagne, "cette situation ne constituait pas un choix personnel de sa part", en reprenant le libellé même de la question posée selon laquelle il y a été contraint "en raison de l’affection sévère dont il souffre et de l’avantage que présentent des soins médicaux spécialisés dispensés à proximité". Selon les juges, dans ce cas particulier, l’intéressé doit "être considéré comme "séjournant" dans ce second État membre dès lors que le centre habituel de ses intérêts se situe dans le premier État membre", à savoir l’Irlande. Les juges estiment que "la seule circonstance que ledit ressortissant soit demeuré dans le second État membre pendant une longue période ne [suffit] pas" pour considérer qu’il réside dans cet Etat. La question préjudicielle portait notamment sur l’article 1 du règlement n° 883/2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale qui stipule que le terme résidence "désigne le lieu où une personne réside habituellement" alors que le terme séjour signifie "le séjour temporaire".

Les juges mettent en avant le fait que l’Irlandais "souhaiterait retourner en Irlande", en citant la décision de renvoi. Dans ses conclusions du 20 mars 2014, l’avocat général Nils Wahl était allé encore plus loin en déclarant : "Les observations présentées par le gouvernement irlandais et le HSE me semblent être intentionnellement inopportunes." Il estimait que "dans des situations imprévues d’urgence médicale, on ne saurait raisonnablement parler d’un "choix" et "il n’y a aucun doute possible que M. I n’a pas le choix à cet égard". Il avait souligné qu’un traitement médical à l’étranger "pour une période qui peut être qualifiée de longue (voire de très longue) ne suffit pas, en soi, pour établir – ou contester la résidence habituelle".