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Elections européennes - Traités et Affaires institutionnelles
Le PPE, les S&D et les Verts soutiennent la candidature de Jean-Claude Juncker à la présidence de la Commission lors de leurs consultations avec le président du Conseil européen, tandis que le Premier ministre britannique continue de s’y opposer
12-06-2014


juncker-berlin-source-ppeLe processus de renouvellement des institutions qui doit mener à la désignation du prochain président de la Commission européenne s’est poursuivi, le 12 juin 2014, avec la consultation des six principaux groupes politiques au Parlement européen par le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy.

Sans grande surprise, les responsables du PPE, des S&D et des Verts ont réaffirmé leur soutien à la candidature de Jean-Claude Juncker à la présidence de la Commission européenne au nom du "respect de la démocratie", celui-ci ayant été le "candidat tête de liste" du groupe politique (le Parti populaire européen, PPE) à obtenir le plus grand nombre d’eurodéputés dans le nouvel hémicycle européen.

Le contexte

Pour mémoire, Herman Van Rompuy avait été mandaté par les chefs d’Etat et de gouvernement des 28 Etats membres de l’UE, au lendemain des élections européennes du 25 mai, pour consulter le Parlement européen nouvellement élu sur l’agenda stratégique de la future Commission, mais surtout sur la nomination du nouveau président de l’institution qui succédera à José Manuel Barroso.

Le traité de Lisbonne prévoit en effet que le Conseil européen (les chefs d'Etat et de gouvernement), chargé de soumettre un nom au Parlement, devra tenir compte du résultat des élections pour cette nomination. Il n’est cependant juridiquement pas tenu de puiser dans la liste des cinq candidats mis en avant par les partis politiques européens (PPE: Jean-Claude Juncker, S&D: Martin Schulz, Libéraux et Démocrates: Guy Verhofstadt, Verts: José Bové et Ska Keller, Gauche européenne: Alexis Tsipras) comme le revendique le Parlement européen.

Selon le calendrier officiel du renouvellement des institutions européennes, le Conseil européen devrait proposer un nom lors du sommet des 26 et 27 juin 2014 et le Parlement européen devrait l’approuver – ou non – lors de sa seconde session plénière, à la mi-juillet.

Soutiens réitérés à la candidature de Jean-Claude Juncker

Le 12 juin 2014, le  président du Conseil européen a donc rencontré les six principaux groupes (PPE, S&D, ALDE, CRE, Verts/ALE et GUE/NGL) rapporte son agenda officiel.

Du côté du Parti populaire européen (PPE), le nouveau président du groupe, Manfred Weber, a affirmé devant la presse à l’issue de sa rencontre avec Herman Van Rompuy que le soutien à Jean-Claude Juncker était "grandissant" et cela "à tous les niveaux" du Parlement européen. "Nous soutenons M. Juncker de manière inconditionnelle et nous voulons que le Conseil propose son nom le 26 juin". Il s’agit d’un "message très clair" pour les dirigeants européens: s'ils choisissent "une autre option que M. Juncker, il y aura une crise institutionnelle", a-t-il averti. Et d’appeler en outre le Conseil européen à "respecter le calendrier".

"Nous ne souhaitons pas en arriver à une situation conflictuelle" mais "la seule majorité qui existe au sein du Parlement européen est celle en faveur" de l'ancien Premier ministre luxembourgeois, a répété le chef de file du PPE au Parlement européen. "Nous avons gagné les élections et maintenant nous devons tenir notre promesse faite aux électeurs", a-t-il encore assuré, notant qu’il n’y a à ses yeux aucun candidat "plus légitime démocratiquement" pour ce poste.

Quant à l’opposition de certains dirigeants de l'UE, au premier rang desquels le Premier ministre britannique David Cameron, selon lequel Jean-Claude Juncker est à la fois "un homme du passé" et trop fédéraliste, Manfred Weber estime que s’il est en faveur de "jeter des passerelles avec le Royaume-Uni, de développer une coopération […] en même temps le Royaume-Uni n'est qu'un État membre sur 28, il est impossible pour lui de poser son veto. Londres ne peut pas dicter les choses à l'UE". Le nouveau président du PPE a par ailleurs qualifié d'"inacceptable" la "campagne de diffamation" orchestrée contre le candidat Juncker.

Les socialistes & démocrates (S&D) au Parlement européen relèvent pour leur part que "trois semaines après les élections européennes, le Conseil européen n'a fait aucun progrès pour proposer un candidat pour le poste de président de la Commission européenne", peut-on lire dans un communiqué de presse diffusé par le groupe à l’issue de la rencontre entre son président, Hannes Swoboda, et Herman Van Rompuy.

"Nous réaffirmons que Jean-Claude Juncker – en tant que candidat du principal groupe au Parlement européen – doit avoir le droit d'être le premier à tenter de former une majorité au Parlement, cela en proposant un programme de travail adéquat", a dit Hannes Swoboda.

Selon le président des S&D, il relève d’un "principe de base de la démocratie que la Commission européenne représente l'équilibre du Parlement européen, où le PPE a une légère avance et le groupe S&D est le deuxième plus grand groupe". Hannes Swoboda rappelle à ce sujet que le candidat tête de liste des socialistes, Martin Schulz, "a reçu un large soutien des citoyens dans l’UE" et que "le choix des électeurs doit être respecté dans la formation de la Commission européenne".

Par ailleurs, "l’obstructionnisme et les menaces ne sont pas utiles, mais nuisibles", juge Hannes Swoboda. "Ceux qui au Conseil européen retardent [et] tentent de faire dérailler ce processus sont la raison pour laquelle tant de citoyens sont frustrés avec l'Europe", avertit-il. Le président des socialistes au Parlement européen appelle également au respect du calendrier, jugeant "urgent" de se mettre au travail "sur les priorités de l'UE: une politique socio-économique équitable, une politique commune de l'immigration et la lutte contre l'évasion fiscale".

Du côté des Verts/ALE, Rebecca Harms, réélue à la co-présidence du groupe aux côtés de Philippe Lamberts, a fait savoir à l’issue de la rencontre avec Herman Van Rompuy  via son compte Twitter, que la position des Verts restait la même que celle exprimée dès le 27 mai 2014.

Elle avait à ce moment indiqué que "le candidat tête de liste issue de la plus grande formation politique, Jean-Claude Juncker, doit dès à présent assurer une majorité en faveur de son élection à la tête de la Commission européenne", appelant à ce que "le rôle de ces élections dans la détermination de la présidence de la Commission soit respecté par les gouvernements de l'UE", toute autre alternative étant dénoncée comme "antidémocratique". "Le Parlement ne peut pas être sous le joug du Conseil, auquel cas il perdrait toute sa crédibilité face à ses électeurs et ses électrices", avait-elle ajouté. Quant au soutien du groupe des Verts à un candidat, il sera "déterminé par les positions des candidats sur base des priorités politiques" du groupe.

Le Premier ministre britannique, David Cameron, justifie son opposition à Jean-Claude Juncker dans une tribune publiée par le Luxemburger Wort

Dans une tribune publiée dans l’édition du 13 juin 2014 de plusieurs journaux européens, dont le quotidien luxembourgeois Luxemburger Wort, le Premier ministre britannique justifie longuement son opposition à la procédure des "candidats têtes de listes".

Selon David Cameron, qui juge que "seule une petite minorité de citoyens européens a suivi le débat au sujet de la présidence de la Commission", ce processus est important car il concerne "la façon dont l'UE prend des décisions, la nécessité de respecter ses règles, et la relation appropriée entre les nations de l'Europe et les institutions de l'UE", écrit-il.

D’après le Premier ministre britannique, les électeurs ont envoyé "un message clair" le 25 mai, "déçus de la façon dont l'Europe fonctionne" et exigeant "le changement de sorte que l’UE se concentre sur ce qui les préoccupe: la croissance et l'emploi".

Rappelant le "processus clair" de désignation par le Conseil, inscrit dans le traité de Lisbonne, "né d’une négociation tortueuse sur le bon équilibre entre les États-nations et le Parlement européen", David Cameron accuse "certains députés" d’avoir inventé un procédé par lequel "ils tentent à la fois de choisir et d'élire le candidat". Un processus qu’il qualifie "d’accord d’arrière-salle".

"Ce concept n'a jamais été accepté par le Conseil européen. Il n'a pas été négocié entre les institutions européennes. Et il n'a jamais été ratifié par les parlements nationaux. Pourtant, ses partisans affirment que les élections ont eu lieu, que les peuples d'Europe ont choisi Jean-Claude Juncker comme président de la Commission et qu'il serait antidémocratique que les dirigeants nationaux élus de choisir quelqu'un d'autre", déplore le Premier ministre britannique.

David Cameron juge qu’il s’agit d’un "non-sens". Et de rappeler pêle-mêle que "la plupart des Européens n'ont pas voté", que "le taux de participation a diminué" presque partout, que "nulle part un bulletin de vote ne portait le nom de Jean-Claude Juncker" qui n’a d’ailleurs "été élu par personne", que ce dernier "ne s'est pas rendu certains États membres" et enfin que "ceux qui ont voté l'ont fait pour choisir leurs députés européens, pas le président de la Commission". Mais d’assurer qu’il ne s’agit pas d’une "attaque" à l’encontre de Jean-Claude Juncker, qu’il qualifie de "politicien européen chevronné".

Accepter une telle demande serait donc "extrêmement préjudiciable pour l'Europe et porterait atteinte à la légitimité démocratique de l’UE, plutôt que de la renforcer", selon le dirigeant. Il s’agirait d’un transfert de pouvoir des gouvernements au Parlement européen sans l'approbation des électeurs qui empêcherait à l’avenir à tout dirigeant en fonction de diriger la Commission européenne "précisément lorsque l'UE a besoin de trouver le meilleur!"

David Cameron souligne le risque de "politisation" de la Commission européenne qui l’empêcherait "d'incarner l'impartialité et le bien commun de l'Union" et mettrait en péril la crédibilité de la Commission dans l'exercice de ses pouvoirs de réglementation et de règlement des différends". Surtout, le leader conservateur estime que cela donnerait "un feu vert à ceux qui veulent violer les règles de l’UE par la porte de derrière", des règles qui ont pourtant "été ratifiés par les parlements nationaux et prévues dans le droit international", dit-il, créant donc "un dangereux précédent pour l'avenir".

Angela Merkel "n’a certainement pas violé les traités"

En réponse à cette tribune, la chancelière allemande Angela Merkel a contredit l'allégation du Premier ministre britannique David Cameron, selon laquelle le groupe PPE aurait violé les traités de l'UE en proposant Jean-Claude Juncker comme président de la Commission européenne.

"Comme la chancelière a participé en sa qualité de chef de parti à la nomination du candidat tête de liste [du PPE] à Dublin, elle n'a certainement pas violé les traités de l'UE", a déclaré le porte-parole du gouvernement, Steffen Seibert, lors d’un point presse à Berlin le 13 juin 2014.