A une semaine de la première session du Parlement européen issu des élections de mai 2014, sept groupes politiques ont été constitués au Parlement européen en vue de la législature 2014-2019.
Les groupes politiques ont un rôle important dans l’agenda du Parlement européen, le choix du président du Parlement européen, des vice-présidents, des présidents des commissions et des rapporteurs, ainsi que dans la répartition du temps de parole lors des débats (même s'ils ne prennent pas la décision finale).
Chaque groupe est doté d’un secrétariat pour se charger de son organisation interne. Les députés des groupes politiques nomment un président ou des co-présidents qui représenteront le groupe à la Conférence des présidents.
Les règles du Parlement européen prévoient que les groupes politiques soient constitués d’au moins 25 députés provenant de sept États membres différents, ce qui explique les tractations et négociations difficiles qui ont pu avoir lieu ces dernières semaines. En fin de compte, aucun nouveau groupe n’a pu se constituer malgré les tentatives du Front national de rassembler autour de lui un groupe d’extrême droite.
En revanche, les rapports de force ont changé, puisque derrière le PPE et le S&D, ce sont désormais les conservateurs eurosceptiques de l’ECR qui s’affichent comme la troisième force, faisant reculer les libéraux de l’ALDE en quatrième position. De même, la Gauche unie européenne (GUE) a progressé pour arriver en cinquième position, passant devant le groupe Verts/ALE qui est suivi par l’EFDD dominé par les europhobes britanniques de l’UKIP.
Les eurodéputés non-inscrits sont 43, soit 10 de plus qu’en 2009, tandis que restaient encore, à la date de rédaction de cet article, neuf nouveaux élus sans appartenance à un groupe politique du Parlement sortant.
Premier groupe au Parlement européen, le Parti populaire européen réunit 221 eurodéputés, contre 274 lors de la précédente législature. Les élus du PPE proviennent de 27 Etats membres, le seul pays n’envoyant dans ce groupe aucun député étant le Royaume-Uni, dont les conservateurs avaient fait sécession en 2009 pour créer le groupe ECR.
L’eurodéputé allemand issu de la CSU, Manfred Weber, qui en est à son troisième mandat, a été élu président du groupe dès le 4 juin 2014.
Sur ces 221 eurodéputés, 80 seront nouveaux sur les bancs du Parlement européen. Les députés élus en Grèce ou en République tchèque qui rejoignent le PPE sont tous nouveaux par exemple.
La plus grosse délégation est celle venant d’Allemagne, qui compte 34 élus de la CDU/CSU contre 42 en 2009. Les élus polonais sont 23 et viennent principalement de la Plateforme civique (PO) actuellement au pouvoir et du Parti paysan PLS qui est son allié. L’UMP française envoie 20 eurodéputés dans les rangs du PPE, soit neuf de moins qu’en 2009. Trois anciens ministres figurent parmi les nouveaux visages du PPE au Parlement européen, à savoir Renaud Muselier, Michèle Alliot-Marie et Nadine Morano. La délégation italienne, constituée de membres de Forza Italia, le parti de Silvio Berlusconi, et d’élus de la coalition de centre-droit NCD-UDC-PPI, compte 17 députés, contre 35 en 2009. Les élus espagnols qui rejoignent le PPE, qui viennent du Parti populaire à l’exception d’un élu de l’Union démocratique de Catalogne, sont aussi 17, contre 23 en 2009. Suivent ensuite les délégations roumaine, avec 15 membres, et hongroise, avec 12 élus du Fidesz de Viktor Orban (contre 14 en 2009).
Dans l’ensemble, la plupart des délégations ont perdu en nombre de députés, à l’exception de la Bulgarie, de la Lettonie, de Malte et de la Roumanie, où les conservateurs affiliés au PPE ont gagné un siège. Autre exception, la Slovénie, où l’ensemble des 5 eurodéputés élus dans les rangs du parti d’opposition SDS et de la coalition "Nouvelle Slovénie – Parti chrétien populaire" rejoignent le PPE (contre 3 élus auparavant). La République tchèque fait véritablement figure d’exception puisque sept eurodéputés, tous nouveaux, vont rejoindre les rangs du PPE, contre deux lors de la précédente législature. Ils proviennent de la coalition de centre droit TOP09 pour 4 d’entre eux et de l’Union chrétienne démocrate pour les trois autres.
Le CSV luxembourgeois envoie pour sa part trois eurodéputés dans les rangs du PPE : Viviane Reding, qui était tête de liste, ainsi que Georges Bach et Frank Engel, tous les deux réélus.
Le Groupe S&D est le principal groupe de centre-gauche du Parlement européen et le deuxième plus important en termes de nombre de députés, avec 191 eurodéputés issus des 28 Etats membres de l'UE, contre 196 élus lors de la législature précédente.
L'Italien Gianni Pittella a été élu président du groupe le 2 juillet 2014, suite à l'élection de Martin Schulz à la présidence du Parlement européen qui avait élu président du groupe le 18 juin 2014. Gianni Pitella est député européen depuis 1999 et a été vice-président du Parlement européen entre 2009 et 2014.
En juin 2014, Martin Schulz avait pris le relais de l’Autrichien Hannes Swoboda qui avait présidé le groupe à partir de janvier 2012, lorsque Martin Schulz est devenu président du Parlement européen. Avant sa présidence du Parlement européen, Martin Schulz avait déjà été président du groupe à partir de 2004.
Le plus important parti du S&D en termes de nombre d’eurodéputés est le Parti démocratique italien avec 31 personnes, qui a gagné plus de dix sièges par rapport à la législature précédente. Il est suivi du SPD allemand avec 27 eurodéputés (soit 4 de plus qu’en 2009) et du Labour britannique avec 20 eurodéputés (+ 7). La Roumanie est représentée par 16 eurodéputés du parti social-démocrate roumain (+ 5), l’Espagne par 14 eurodéputés du parti socialiste ouvrier espagnol (- 7). Le parti socialiste français envoie 12 eurodéputés alors que le 13e eurodéputé français vient du parti radical de gauche (- 1).
Le Luxembourg y est représenté par Mady Delvaux-Stehres (LSAP).
Le groupe ECR rassemble 70 députés conservateurs eurosceptiques issus de 15 pays (contre 57 lors de la législature précédente), dont les Tories britanniques avec 20 élus et le parti polonais conservateur et eurosceptique Droit et justice (PiS) avec 19 élus. Avec trois députés de plus que le groupe libéral ALDE, l’ECR a réussi à s’imposer comme troisième groupe, après des luttes intenses entre les deux groupes politiques. Cela a été possible grâce au parti indépendantiste et nationaliste Nouvelle Alliance flamande (N-VA) de Bart de Wever qui a, à la dernière minute, rallié l’ECR avec quatre députés le 18 juin 2014, après avoir reçu le même jour l’aval de pouvoir rejoindre l’ALDE.
Le président du groupe, le Britannique Syed Kamall, qui est issu des Tories, a été élu le 12 juin 2014. Il succède à Martin Callanan qui n’a pas été réélu aux élections européennes.
Le 12 juin 2014, l’ECR a officiellement absorbé les sept élus allemands du parti anti-euro Alternative für Deutschland (AfD), contre les consignes du Premier ministre britannique, qui avait demandé à ses troupes de ne pas soutenir un parti hostile aux projets d'Angela Merkel. Un autre député allemand vient du Parti de la Famille. Ainsi, une dizaine de nouveaux groupes ont été acceptés au sein de l’ECR, dont trois partis eurosceptiques qui ont quitté l’EFD : le parti de droite nationaliste des Vrais Finlandais (PS) avec deux élus, le Parti populaire danois (DF), un parti d’extrême droite, avec quatre élus et le parti néerlandais SGP, un parti fondamentaliste protestant, avec un élu. L’ECR a également accueilli deux députés bulgares du parti Bulgarie sans censure et du Mouvement national bulgare (VMRO) ainsi que deux députés de deux partis conservateurs slovaques et un député du parti de droite Grecs indépendants. Le député irlandais Brian Crowley a également rejoint l’ECR après avoir quitté l’ALDE, ce qui lui a valu l’exclusion du parti républicain irlandais Fianna Fail. Le parti tchèque ODS n’envoie plus que deux élus à l’ECR, contre neuf auparavant.
Avec 67 députés issus de 20 pays (contre 83 lors de la législature précédente), l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ALDE) devient le quatrième groupe politique au Parlement européen. Son président sortant, le Belge Guy Verhofstadt, qui a été tête de liste des libéraux aux élections européennes, a été réélu le 18 juin 2014. Il préside l’ALDE depuis 2009. Parmi les 67 députés, 31 n’ont pas siégé au Parlement européen lors de la législature précédente.
La France est représentée par sept eurodéputés, dont quatre du Mouvement démocrate (Modem) et trois de l'Union des démocrates et indépendants (UDI). Ils sont également sept eurodéputés néerlandais, dont quatre membres du Parti populaire libéral et démocrate (VVD) et trois membres des Démocrates 66. Les Belges envoient six eurodéputés, dont trois membres du Libéraux et démocrates flamands de l’Open VLD et trois membres du parti belge francophone Mouvement Réformateur (MR).
Le parti libéral allemand FDP, qui ne siège plus au Bundestag depuis les législatives de 2013, est représenté par trois eurodéputés (contre 12 auparavant), grâce à la décision de la Cour constitutionnelle allemande de supprimer le seuil de 3 % pour les élections européennes (ce qui avait également permis l’élection d’un parti satirique au Parlement européen, mais aussi d’un député du parti d’extrême droite NPD qui avait obtenu 1 % des votes). Les libéraux-démocrates britanniques (LibDems) n’ont plus qu’un seul élu dans le groupe, contre 11 auparavant.
Les membres de l'ALDE ont approuvé le 17 juin 2014 l’entrée de quatre autres partis dans leur groupe, avec l'abstention des délégations française du Modem et belge du MR. Il s’agit des Tchèques de l’Action des citoyens mécontents (ANO), parti créé en 2011, avec 4 élus, du Parti pour la Terre (MPT), un parti environnementaliste portugais avec 2 élus et de deux partis espagnols : Union, Progrès et démocratie (UpyD, 4 élus) et Ciutadans (2 élus), un parti catalan opposé à l'indépendance de la Catalogne.
L’ALDE compte un eurodéputé luxembourgeois, Charles Goerens (DP).
Le groupe de la Gauche unitaire européenne est fort de 52 membres à l’issue des élections de mai 2014 et il se positionne ainsi comme le cinquième groupe politique du Parlement européen. En 2009, il comptait 35 membres.
Le groupe GUE est constitué d’eurodéputés provenant de quatorze pays et dix-neuf délégations politiques différentes. L’eurodéputée allemande Gabriele Zimmer, qui en est à son troisième mandat au Parlement européen, a été réélue présidente du groupe le 19 juin 2014.
C’est en Espagne que la progression de ce groupe politique a été la plus spectaculaire : un seul eurodéputé espagnol siégeait lors de la précédente législature au sein de ce groupe alors qu’ils seront 11 désormais. En Grèce, le parti Syriza s’est érigé comme la première force politique lors de ces élections et va envoyer six eurodéputés dans les rangs du GUE. Les eurodéputés irlandais du groupe seront désormais 4, comme ceux qui vont siéger au PPE. En Italie, trois eurodéputés ont été élus sur la liste constituée en soutien à Alexis Tsipras, tête de liste du groupe pour les européennes, alors qu’aucun eurodéputé italien ne siégeait auparavant au sein de ce groupe. En plus de ces gains importants dans ces pays particulièrement frappés par la crise, le groupe a par ailleurs pu maintenir des scores honorables ailleurs.
Aucun Luxembourgeois n’est élu dans ce groupe, même si le parti déi Lénk, qui lui est affilié, a affiché une hausse de 2,4 % par rapport aux élections de 2009.
A l’issue des élections de 2014, le groupe des Verts/ALE compte 50 membres et est le sixième parti en termes de taille. En 2009, ce groupe comptait 57 membres et apparaissait, derrière le PPE, le S&D et l’ALDE, comme le quatrième groupe en importance, à égalité certes avec les conservateurs de l’ECR, mais en position de faire bouger des majorités sur certains sujets.
Le 11 juin 2014, Rebecca Harms a été reconduite à la coprésidence du groupe et a été rejointe par Philippe Lamberts qui succède à Daniel Cohn-Bendit.
Si elle est en perte de vitesse, notamment en raison de la forte perte du parti EELV en France, qui passe de 14 à 6 élus, l’union entre les Verts européens et l’Alliance libre européenne (ALE) s’est toutefois élargie à de nouveaux pays membres et elle compte désormais des élus provenant de dix-sept Etats membres.
38 de ses membres proviennent de partis écologistes, 7 sont affiliés à l’Alliance libre européenne, avec des élus représentant la Catalogne, l’Ecosse, Valence, le Pays de Galles ou la Lettonie, tandis que 5 eurodéputés sont indépendants. Le groupe accueille ainsi Klaus Buchner (Parti Écologique–Démocratique, Allemagne), Julia Reda (Parti des Pirates, Allemagne), Bronis Ropé (LVZS, Lituanie) et Igor Šoltes (Parti Verjamem, Slovénie). Le groupe avait ouvert sa porte au Mouvement 5 Stelle de Beppe Grillo, mais ses 17 eurodéputés ont finalement rallié le groupe EFDD à l'issue d'un référendum interne au parti.
La plus grande délégation vient d’Allemagne, avec 13 élus. Suivent ensuite le Royaume-Uni, dont la moitié des élus sont membres de l’ALE, et la France, avec chacun six eurodéputés. L’Espagne, où trois élus sont aussi membres de l’ALE, compte quatre parlementaires de ce groupe, comme la Suède.
L’écologiste Claude Turmes reste le seul Luxembourgeois à siéger au sein de ce groupe.
Les eurosceptiques de l’EFD (Europe, liberté, démocratie) ont annoncé le 19 juin 2014 la constitution de leur groupe qui comptera 48 députés issus de sept pays (contre 31 lors de la législature précédente). Le nom du groupe changera pour devenir "Europe, liberté et démocratie directe" (EFDD). Il constituera le septième groupe au Parlement européen.
Le groupe a rencontré des difficultés de formation, après la défection des trois partis nationalistes qui ont rejoint l’ECR : les Vrais Finlandais, le Parti populaire danois et le parti néerlandais SGP. C’est finalement grâce au ralliement de la députée du Front national, Joëlle Bergeron, que l’EFDD a réussi à franchir le seuil de sept pays requis pour former un groupe. La députée avait refusé de céder son siège malgré les injonctions de la direction du Front national.
Le principal parti du groupe est le parti britannique pour l’indépendance (Ukip) avec 24 députés (un gain de 11 élus par rapport à 2009). Le deuxième parti et le Mouvement 5 étoiles (5S), fondé en 2009 par l’Italien Beppe Grillo, avec 17 élus.
Le groupe est présidé par Nigel Farage, leader de l’Ukip. Quatre membres du groupe viennent du parti polonais de droite Pologne solidaire (SP), deux membres du parti anti-immigration Démocrates suédois (SD).
La Ligue du nord italienne qui a perdu quatre de ses neuf sièges lors des élections européennes, ne fait plus partie du groupe EFD puisqu’elle cherchait à s’affilier à un groupe d’extrême droite, dont la création sous l’égide du Front national a finalement échoué.