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Elections européennes - Traités et Affaires institutionnelles
Elections européennes - Le gouvernement n’a pas d’informations sur le nombre de personnes privées de leur droit de vote pour avoir été inscrites sur les listes électorales d’un autre Etat membre mais admet qu’il y a eu des "cas litigieux"
02-07-2014


Le gouvernement du Grand-Duché de LuxembourgLe député de Déi Lénk Serge Urbany, a voulu savoir au lendemain des élections européennes du gouvernement comment les administrations avaient géré la question des électeurs qui étaient inscrits sur les listes électorales d’un autre Etat membre de l’UE.

Dans sa lettre au gouvernement, le député Serge Urbany rappelle les dispositions de la loi, notamment l'article 9 de la loi électorale modifiée du 18 février 2003, qui prévoit que lorsque le Gouvernement luxembourgeois est informé par un autre Etat membre de l'Union européenne qu'un ressortissant de ce dernier, qui figure sur la liste électorale pour les élections au Parlement européen, ou qu'un ressortissant luxembourgeois, qui figure sur la liste visée par la présente loi, est également inscrit dans cet Etat comme électeur pour les élections au Parlement européen, il transmet cette information au collège des bourgmestre et échevins de la commune concernée qui en fait mention sur les listes électorales. La loi prévoit que ces personnes ne sont pas admises au Grand-Duché de Luxembourg au vote pour les élections au Parlement européen.

Le député Urbany estime ensuite que "cette disposition semble d'ailleurs être difficilement compatible avec l'article 8 de la même loi qui ne prévoit pas, pour les ressortissants de l'Union européenne, une radiation des listes électorales de leur pays d'origine au moment de leur inscription, mais exige uniquement d'eux une déclaration qu'ils n'exerceront leur droit de vote pour les élections au Parlement européen que dans le Grand-Duché de Luxembourg, sous réserve de pénalités attachées à une fausse déclaration.

Dans ce contexte, le député Serge Urbany a été informé sur le fait "qu'un nombre significatif d'électeurs ont eu l'information de leur non-admission au vote du 25 mai 2014", et il ajoute : "Parmi ces électeurs privés de droit de vote figurent des Luxembourgeois qui ont effectué il y a des années leurs études à l'étranger ou qui ont résidé à un moment donné à l'étranger, et qui s'étaient inscrits à ce moment sur les listes électorales. Pour certains d'entre eux, cette inscription remonte à plus d'une décennie et ces électeurs ne pensaient même plus figurer sur des listes électorales étrangères."

Le député a également appris "que des électeurs résidant dans la ville de Luxembourg ont été informés de leur radiation par un courrier qu'ils ont reçu le 23 mai 2014, c'est-à-dire deux jours avant les élections, et cela après avoir reçu auparavant une convocation pour ces mêmes élections. La date tardive de ta notification de leur radiation ne permettait pas aux personnes concernées de prendre position ou de contester la décision les visant."

Il a donc voulu savoir du gouvernement

  • Combien d'électeurs, de quelle nationalité, ont-ils été informés de leur privation de droit de vote pour les élections européennes du 25 mai 2014 ?
  • A quelle date, le Ministère des affaires étrangères a-t-il transmis les listes des électeurs à refuser aux communes concernées?
  • Combien d'électeurs ont-ils été effectivement informés par ces dernières de leur privation de droit de vote ?
  • Combien d'électeurs ayant reçu leur convocation au préalable se sont-ils néanmoins présentés aux bureaux de vote ? Combien de ceux-ci ont-ils été finalement admis au vote, notamment sur leur déclaration d'exercer leur droit de vote uniquement au Luxembourg ?
  • Estimez-vous que les droits des électeurs concernés ont été respectés dans le cas d'une notification très tardive, ne leur permettant pas de prendre position ou de contester la décision les visant ?
  • Le Gouvernement envisage-t-il une réforme de la loi électorale pour éviter qu'à l'avenir des électeurs se voient indûment privés de leur droit de vote ?

La réponse du Premier Ministre et du Ministre de l'Intérieur

Dans leur réponse publiée le 2 juillet 2014, le Premier ministre Xavier Bettel et le ministre de l’Intérieur Dan Kersch relèvent "que la législation européenne prévoit qu'un ressortissant européen ne peut voter qu'une seule fois aux élections européennes et ce pour les candidats d'un seul État membre" soulignant que "ce principe n'est d'ailleurs pas contesté". Ils expliquent ensuite que "pour éviter qu'un ressortissant puisse voter deux fois, à savoir dans son pays de résidence et dans son pays d'origine, la législation européenne a instauré un système d'échange d'information entre les États membres qui au Grand-Duché est prévu à l'article 9 de la loi électorale du 18 février 2003." Autre précision : c’est le ministre des Affaires étrangères qui sert de point de contact du Gouvernement luxembourgeois pour recevoir et transmettre les informations nécessaires à l'application des dispositions de la loi.

Mais il existe plusieurs problèmes. D’abord, "la forte disparité des législations électorales propres aux États membres" fait que "le système actuellement en place ne prévoit cependant pas de délais quant à la date butoir de l'échange d'information." Cela veut dire dans la pratique que "dans le cadre des élections européennes du 25 mai 2014, les informations concernant les inscriptions sur les listes électorales dans un autre État membre de l'Union européenne provenant des autorités étrangères sont parvenues de manière désordonnée au Ministère des Affaires étrangères et européennes."

Ainsi, "les dernières informations reçues - il s'agissait d'une mise à jour - dataient du 22 mai. La dernière transmission des informations aux communes a été faite le lendemain 23 mai. Il s'ensuit que certaines communes n'ont reçu ces informations que peu avant le jour du scrutin." Des courriels ont été envoyés à la plupart des communes qui leur demandaient de vérifier leurs propres listes en les comparant avec les informations communiquées.

Ceci dit, les Ministères en charge ne disposent pas d’informations sur le "nombre d'électeurs qui in fine ont été privés de leur droit de vote". Ils savent cependant que "les communes contactées ont informé de suite et dans la limite de leurs moyens les citoyens visés."

L’on apprend ainsi que dans certaines communes, "ces contacts auraient même eu lieu par téléphone." Par ailleurs, "si ces citoyens étaient en mesure d'établir que leur inscription dans un autre État membre ne correspondait pas à la réalité, ils étaient admis au vote au Grand-Duché."

Une autre complication a pu être constatée : "Il est apparu que contrairement aux règles définies par le droit européen, les listes de certains États membres ne comprenaient pas uniquement les seuls noms de ressortissants luxembourgeois ayant fait des démarches dans ce pays de l'Union européenne pour y être inscrits sur les listes électorales en vue du scrutin dans ce pays, mais qu'il s'agissait tout simplement de personnes ayant résidé à un certain moment dans cet État." Ce qui a donc créé de la confusion.

Mais la plupart des citoyens concernés par le problème soulevé par Serge Urbany ont "à un moment donné résidé dans un autre État membre de l'Union européenne et ont choisi à ce moment de voter pour les candidats des élections européennes de leur État de résidence. Ils ont donc effectué naguère des démarches administratives actives afin d'être inscrits sur les listes électorales sans que tous n'aient effectué les démarches inverses nécessaires pour être radiés de ces listes lorsqu'ils ont quitté ledit pays. Le caractère permanent de ces listes dans certains pays de l'Union, qui par ailleurs ne connaissent pas le système luxembourgeois de la déclaration d'arrivée/départ de commune à commune en cas de déménagement et donc de radiation automatique de la liste électorale, fait que les citoyens concernés ne se sont le plus souvent rendus compte du problème qu'au dernier moment."

Les membres du gouvernement expliquent ensuite qu’ils ne disposent pas de données chiffrées sur les personnes qui n’ont pas été admises au vote et qu’ils n’ont pas été  saisis directement de réclamations de particuliers "qui estiment avoir été indûment privés de leur droit de vote". Mais "il est indéniable qu'il y a eu des cas litigieux lors des dernières élections européennes."

Dans ce sens, "la situation actuelle demeure dès lors toujours insatisfaisante". Techniquement, et grâce à la Commission européenne, il y a eu des améliorations substantielles du système d’échange d’informations, notamment à travers "la mise en place d'une seule autorité nationale chargée de recevoir et de communiquer les informations en cause, ainsi que l'élaboration d'un format unique dans lequel les informations sont échangées."

Mais le gouvernement met aussi en garde : "Toute modification future touchant à la substance du dispositif devra se faire au niveau communautaire entre les États membres et il ne sera point aisé de trouver une solution immédiate dans la mesure où les pays de l'Union européenne connaissent en matière de tenue de listes électorales des modalités particulières propres à leur système électoral et qu'une démarche d'une telle envergure prendra nécessairement un certain temps."

Quant au gouvernement luxembourgeois, il réfléchira "à d'éventuelles adaptations de la législation nationale pour pouvoir résoudre à brève échéance une partie des problèmes rencontrés à l'occasion du scrutin du 25 mai 2014 tout en restant conforme par rapport au droit européen."