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Entreprises et industrie - Emploi et politique sociale
La participation financière des salariés dans l’entreprise augmenterait la productivité et serait un moyen dissuasif contre les délocalisations, selon une nouvelle étude commanditée par la Commission européenne
29-10-2014


La participation financière des salariés dans l’entreprise augmenterait la productivité et serait un moyen dissuasif contre les délocalisations, selon une étude commanditée par la Commission européenne et publiée le 29 octobre 2014La participation financière des salariés dans l’entreprise augmenterait la productivité, contribuerait à résoudre des problèmes tels que l’absentéisme et serait un moyen dissuasif contre les délocalisations, selon une étude réalisée par le Centre Inter-universités pour le compte de la Commission européenne et diffusée le 29 octobre 2014.

Le contexte

Pour précision, les auteurs de l’étude rappellent que l’intérêt que la Commission européenne attache au sujet de la participation financière des salariés (employee financial participation, EFP) a substantiellement gagné de l’importance depuis la publication du premier rapport PEPPER en 1991 et la Recommandation du Conseil du 27 juillet 1992 sur la participation financière. Par ailleurs, la participation financière a été mise en exergue par des opinions du Comité économique et social européen, notamment en 2010, ainsi que par des études et rapports du Parlement européen et une Résolution sur la participation financière des salariés en 2014.

Au regard de ce contexte, la Commission a inclus la promotion de l’actionnariat des salariés dans son plan d’action pour la réforme du droit européen des sociétés et de la gouvernance des entreprises (2012) et a lancé le Projet pilote 2013/14 dans le cadre duquel l’étude a été réalisée. Cette analyse, qui se base sur "les données les plus actuelles sur la portée et l’impact des différents modèles d’EFP dans les entreprises de l’UE ainsi que sur les évolutions de cadres normatifs dans les différents Etats membres", cherche ainsi "à développer des recommandations politiques détaillés et des mesures concrètes pour l’exécution de la politique de la Commission relative à la promotion de l’actionnariat salarié", lit-on dans le résumé de l’étude.

Des avantages macroéconomiques, microéconomiques, et sur le plan régional

Comme le soulignent les auteurs, la participation financière des salariés peut prendre plusieurs formes. Ainsi parmi les différents modèles d’EFP, l’on retrouve notamment trois formes principales de participation : l’actionnariat salarié individuel, qui consiste en l’octroi d’actions ou de stock-options aux salariés ; le plan d’actionnariat collectif (ou ESOP pour Employee Stock Ownership Plan, qui consiste en l’acquisition collective d’actions par les salariés, ce par le truchement d’une entité intermédiaire et financée par le partage des marges aux bénéfices des salariés en plus de leur rémunération) ; et enfin, la participation aux bénéfices (en espèces ou en actions, payée immédiatement ou différée).

Pour ce qui est des avantages de l’EFP, l’étude souligne que "trente ans de recherches ont permis de démontrer que les entreprises partiellement ou entièrement détenues par leur employés présentent une meilleure profitabilité, créent plus d’emploi et assurent une plus grande contribution fiscale que leurs concurrentes n’appliquant pas d’actionnariat de salariés".

D’abord, d’un point de vue macroéconomique, la participation financière des salariés apporterait plus de productivité et par conséquent, plus de compétitivité et de croissance, ce par-delà la stabilisation stratégique de la propriété, écrivent les auteurs. Ensuite, d’un point de vue microéconomique, il pourrait contribuer à résoudre des problèmes tels que l’absentéisme, la rotation de la main-d’œuvre et le maintien des salariés importants. Il en est de même pour l’assurance de la succession dans les entreprises et le financement des affaires, notamment dans les cas des PME et des microentreprises.

Enfin sur le plan régional, la participation financière encouragerait l’ancrage local des entreprises, renforçant de même le pouvoir d’achat des ménages des salariés, ce en même temps qu’il constitue un moyen dissuasif contre les délocalisations et les acquisitions étrangères. Les auteurs soulignent néanmoins que "naturellement il sied de prendre en compte les potentiels points négatifs de l’actionnariat des salariés comme les risques endossés par les salariés".

Des modèles de participation au succès croissant dans les entreprises

L’étude relève par ailleurs que les sondages transnationaux à grande échelle les plus récents (European Company Survey 2010 – ECS, notamment) font état d’une augmentation d’offres d’actionnariat de salariés par les entreprises et d’adhésion de la part salariés au cours de ces 15 dernières années malgré la crise financière et économique qui a marqué cette période. Ainsi, selon les données de l’ECS, la part des sociétés adoptant des modèles d’actionnariat de salariés a augmenté de 4,7 % à 5,2 % de 2009 à 2013 (une hausse de 10 %) alors que les offres de participation aux bénéfices ont plus que doublé passant de 14,3 % à 30,2 %.

Les données de l’ECS indiquent une hausse significative de la probabilité à la fois d’une augmentation de la productivité et de celle de la création d’emplois et dès lors de la compétitivité dans les entreprises ayant introduit un modèle d’actionnariat des salariés ou de partage de profits. Toutefois, regrettent les auteurs, "malgré les impacts positifs reconnus et la large utilisation des modèles d’EFP au niveau européen, leur généralisation sur une partie significative de la population active n’est de rigueur que dans une poignée d’Etats membres". A ce jour, environ 68 % des sociétés de l’UE n’offrent aucune forme de participation financière à leurs salariés. En revanche, les dernières analyses des données de l’ECS permettent d’estimer à 300 000 le nombre d’entreprises dans les 28 Etats membres potentiellement disposées à adopter un modèle de la participation financière, précise encore l’étude.

Des mesures politiques fortes sont nécessaires pour favoriser l’EFP

Selon les auteurs, qui jugent que "ce potentiel encore inexploité doit être mis à profit" dans l’UE, des obstacles à l’émergence de plans de participation financière transfrontaliers existent néanmoins. Ceux-ci résulteraient à la fois des différences dans l’intensité et l’effectivité de la régulation et dans les exigences des cadres juridiques nationaux ainsi que de celles existant dans le traitement fiscal des modèles existant.

"Bien que la portée et la nature de ces obstacles diffèrent d’un cas à l’autre, l’impact réel dans la généralisation transfrontalière des modèles de la participation financière demeure identique. Les sociétés devront rassembler une large quantité d’informations, qui implique des coûts et une expertise considérables. Deux obstacles que plusieurs entreprises, notamment les PME, ne pourront surmonter", préviennent les auteurs.

Ceux-ci jugent donc que pour garantir le succès des objectifs politiques de promotion de la participation financière au niveau européen, il sera nécessaire de prendre des mesures allant au-delà de l’évaluation de la situation et d’identifier les bonnes pratiques. "Vu l’intérêt que suscite présentement la participation financière, qui jouit de l’impulsion de la Résolution du Parlement européen de 2014 et du projet-ci, une action adéquate immédiate serait conseillée afin de maintenir la dynamique", poursuit l’étude.

Considérant que le partage d’informations ainsi que les mesures pour une meilleure visibilité seront décisifs dans le court, moyen et long terme, les auteurs estiment important de créer un "level playing field" à travers la mise en place d’un cadre référentiel pour la participation financière à travers un cadre juridique européen dans le long terme.

Un cadre juridique européen plus ou moins flexible en vue d’une harmonisation ou d’une convergence des règlementations

L’étude suggère ainsi la mise en place d’une Directive-Cadre sur la participation financière qui conduirait selon ses auteurs à une harmonisation des législations nationales. "Cela aurait clairement l’impact le plus important dans l’éradication des obstacles à l’EFP, particulièrement les obstacles aux modèles transfrontaliers. Cependant, afin d’éviter tout conflit avec les modèles nationaux existant, un choix politique plus pragmatique serait de développer et de mettre en œuvre un Régime commun optionnel pour l’EFP", ce dernier étant "de nature à conduire à une convergence des réglementations nationales", écrivent-ils.

Ce dernier choix pour un Régime commun permettrait par ailleurs surtout de combler un vide normatif dans un domaine où les règles adéquates font défaut ou sont insuffisantes, soulignent encore les auteurs, qui précisent que les règles régissant la participation financière sont plutôt rudimentaires dans certains Etats membres.

Les auteurs plaident par ailleurs un ensemble d’initiatives de court, moyen et long terme qui pourraient être intégrées dans un Plan d’Action en cinq points pour la promotion de l’EFP et coordonnées et promues par la Commission européenne. La mise en place d’une plateforme d’information sur la participation financière de même que le lancement d’un "Centre virtuel pour la participation financière" pourrait, à cet égard, constituer un premier pas et un moyen efficace de mettre à la disposition les informations nécessaires et pertinentes fournies par cette étude. La promotion de bonnes pratiques pourrait être promue dans le cadre d’un Code de conduite pour la participation et des mesures parallèles, comme une Journée européenne de l’EFP, pourraient accompagner ces instruments normatifs afin d’attirer l’attention sur ce sujet.