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Statistiques - Budget de l'Union européenne
Après un recalcul des contributions nationales au budget de l’UE, certains Etats membres, dont le Royaume-Uni et les Pays-Bas, devront payer de fortes rallonges, alors que d’autres, dont le Luxembourg, se verront rembourser des sommes substantielles
24-10-2014


Le Premier ministre britannique, David Cameron, lors d'une conférence de presse en marge du Conseil européen (Source : EBS)Le Royaume-Uni devra payer une rallonge de 2,1 milliards d’euros au budget européen jusqu’au 1er décembre 2014, soit près d’un cinquième de ses contributions annuelles nettes, tandis que le Luxembourg bénéficiera d’un rabais de 90 millions d’euros, selon un nouveau calcul au terme d'une révision technique du montant des contributions nationales pour 2014, annoncé le 23 octobre 2014 lors du Conseil européen. Le Royaume-Uni est le plus lourdement taxé, avant les Pays-Bas avec 642 millions et l’Italie avec 340 millions. De leur côté, la France bénéficierait d'un rabais d’un milliard et l'Allemagne de 780 millions.

Contexte

Cette nouvelle évaluation figure dans une proposition de budget rectificatif adopté le 17 octobre 2014 par la Commission européenne, en vue du bouclage d'ici la fin de l'année du budget européen pour 2014. Calculée sur la base des révisions du RNB (revenu national brut). mesuré par des autorités indépendantes dans chacun des Etats, la réévaluation des contributions "découle mathématiquement d'un changement des paramètres du calcul du RNB" décidé par les 28, et "de l'évolution macro-économique de chaque pays", a expliqué un porte-parole de la Commission, selon ses propos retransmis par le journal en ligne Huffington Post. "L'économie britannique croît beaucoup plus vite que les autres, la logique est celle des impôts: si quelqu'un gagne plus, il paie plus d'impôts", a résumé le porte-parole. La question doit être tranchée dans le cadre de la conciliation budgétaire entre la Commission, le Parlement européen et le Conseil. Le Royaume-Uni ne dispose pas de droit de véto au Conseil, où le budget se décide à la majorité simple.

David Cameron refuse de "payer la facture le 1er décembre"

Le Premier ministre britannique David Cameron a refusé "en colère", lors d’une conférence de presse en marge du Conseil européen, de payer cette addition le 1er décembre. "C'est totalement injustifié et inacceptable de présenter brutalement" une telle note, a accusé David Cameron, qui a demandé une réunion "urgente" des ministres des Finances pour en discuter. Une telle demande de la Commission "n'aide pas sur la question de l'appartenance de la Grande-Bretagne à l'UE", a ajouté le dirigeant britannique qui, sous la pression des europhobes, a promis un référendum sur l'appartenance de son pays à l'UE en 2017. "Quand une économie croît plus rapidement, il peut y avoir des ajustements. Parfois on paye plus, parfois moins. Mais jamais, on nous a présenté une facture de 2 milliards d’euros. C’est inacceptable", s’est emporté David Cameron, ajoutant qu’il s’agit seulement d’ "estimations".

Les réactions

Le commissaire sortant au Budget, Jacek Dominik, a déclaré le 27 octobre 2014, que le Royaume-Uni risque des amendes. "Si le Royaume-Uni ne verse pas sa contribution le 1er décembre, la Commission européenne, par courrier, demandera la raison de ce retard et attendra la réponse. A un certain moment, elle commencera à imposer des amendes", a-t-il averti. Évoquant la possibilité pour David Cameron de demander un débat sur les ressources propres du budget, il a prévenu que "ce serait ouvrir la boite de Pandore et risquer une remise en question du rabais britannique". "Le Royaume Uni va récupérer 500 millions d'euros en 2015 grâce au rabais", a-t-il rappelé. Le rôle de la Commission européenne est selon lui "passif" dans le sens qu’elle "collectionne" seulement les données fournies par les offices statistiques des Etats membres afin de redistribuer la charge en fonction de la part du PIB d’un Etat membre dans le PIB de toute l’Union. "Les Etats membres étaient pleinement conscients des conséquences" de ce nouveau mode de calcul, a-t-il ajouté. Dans une déclaration écrite, le commissaire a précisé qu'aucun Etat membre n'avait réagi particulièrement à l'annonce la révision le 17 octobre 2014. Il y explique pourquoi il y a eu des changements importants cette fois-ci : cela est dû au fait que le nouveau calcul inclut des ajustements de PIBs "remontant à 1995 pour certains Etats membres".

"Ce n'est en rien une surprise pour les Etats membres car (cette rallonge) est calculée à partir de mécanismes sur lesquels ils se sont tous mis d'accord à l'unanimité", a pour sa part réagi le président sortant de la Commission européenne, José Manuel Barroso, lors d’une conférence de presse, précisant que le calcul se fait sur la base de données fournies par les offices statistiques des Etats membres. "Quand il y a des changements dans le PIB, il faut adapter les statistiques et les contributions", a-t-il ajouté. Il a annoncé des "explications techniques" lors de la réunion des ministres des Finances, tout en excluant des "négociations" sur les PIB des différents Etats membres.

"Quand on signe pour l'Europe, on signe pour ses règles et il faut les respecter", a réagi le Premier ministre irlandais Enda Kenny, tandis que son homologue français, François Hollande a invité Londres "à respecter les traités. Le respect des traités, c'est pour tout le monde", a-t-il lancé. "Nous allons examiner d'où vient ce chiffre car tout se mélange", a affirmé Jeroen Dijsselbloem, ministre néerlandais des Finances et patron de l'Eurogroupe, en parlant de "désagréable surprise".

Pour le député conservateur eurosceptique John Redwood, David Cameron doit refuser de payer, voire passer par la loi pour signaler que cette demande de rallonge est "illégale et inacceptable". Nigel Farage, leader de l'Ukip, le parti europhobe et anti-immigration, a de son côté comparé l'Union européenne a "un vampire assoiffé qui se repaît du sang du contribuable britannique". "Bruxelles punit les Britanniques", a lâché de son côté The Times, tandis que le Daily Mail écrivait: "Alors que la France a une ristourne, Bruxelles demande encore plus de cash au Royaume-Uni".

L'annonce de cette possible rallonge budgétaire des Britanniques intervient lors de discussions sur les budgets français et italiens, mis sur la sellette par la Commission européenne qui pourrait demander à plusieurs Etats de la zone euro de revoir leurs projets de budget. La Commission s'est déjà inquiétée ouvertement des projets de budget français et italien et a adressé des courriers en ce sens à Paris et Rome. L'Autriche, la Slovénie et Malte ont connu le même sort. Dans la lettre adressée à la France et publiée par Mediapart, la Commission réclame fermement des explications sur "les raisons qui ont conduit la France à dévier des objectifs budgétaires" fixés par le Conseil.

Le Premier ministre luxembourgeois Xavier Bettel a dit lors d’une conférence de presse vouloir attendre la confirmation de la Commission européenne et le Conseil Ecofin pour connaître le montant exact du rabais, estimé à 90 millions d’euros, qui seront "investis dans le futur". Il s’est montré compréhensif envers des pays qui "apprennent d’un coup qu’ils doivent payer deux milliards d’euros en décembre". "Il ne s’agit pas de contester les règles existantes, mais de discuter des modalités de paiement ou de remboursement", a-t-il précisé.

Le montant des contributions et des remboursements par Etat membre

Selon le quotidien autrichien Kurier, neuf Etats membres vont devoir rembourser de l’argent : à part du Royaume-Uni, des Pays-Bas et de l’Italie, il s’agit de la Grèce (89 millions), Chypre (42 millions), Malte (13 millions), la Bulgarie (7 millions), l’Irlande et la Lettonie (6,5 millions chacun). 19 Etats membres vont bénéficier d’un rabais : A part la France, l’Allemagne et le Luxembourg, il s’agit des pays suivants :  Danemark (321 millions), Pologne (318 millions), Autriche (294 millions), Finlande (180 millions), Belgique (170 millions), Espagne (169 millions), Suède (133 millions), Slovaquie (60 millions), Croatie (32 millions), Hongrie (32 millions), Roumanie (31 millions), République tchèque (22 millions), Lituanie et Slovénie (18 millions chacun), Estonie (6 millions) et Portugal (0,5 million).