La Commission européenne, qui a pour mission de veiller à l'application du droit européen, a lancé le 16 octobre un certain nombre de procédures d’infraction visant des Etats membres n’ayant pas mise en œuvre pleinement et dans les délais impartis des directives.
Le Luxembourg s’est ainsi vu adresser un avis motivé l’invitant à transposer la directive 2011/77/UE sur la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins. Par ailleurs, le Luxembourg a été déféré devant la Cour de Justice de l’UE pour retards persistants dans l'analyse des marchés pertinents de l'accès au réseau téléphonique public.
Le Luxembourg s’est vu adresser un avis motivé au sujet de la directive 2011/77/UE modifiant la directive 2006/116/CE relative à la durée de protection du droit d'auteur et de certains droits voisins. Cette directive porte de 50 à 70 ans la durée de protection des droits des artistes interprètes et des producteurs de disques. La directive vise à aligner la durée de protection des droits des artistes interprètes sur celle déjà accordée aux auteurs – 70 ans après leur mort.
La directive contient également des mesures d’accompagnement qui visent spécifiquement à aider les artistes interprètes. Les clauses d’"exploitation à peine de perte de droits" ("use it or lose it") qui devront être intégrées dans les contrats entre les artistes interprètes et leurs producteurs, permettront aux artistes de récupérer leurs droits si le producteur ne commercialise pas leurs enregistrements pendant la période de protection additionnelle. De cette façon l’artiste pourrait, soit trouver un autre producteur qui serait prêt à commercialiser sa musique, soit le faire lui-même (par le biais de l’internet, par exemple).
Enfin, les maisons de disques devront créer un fonds dans lequel elles verseront 20 % des revenus générés pendant la période de protection additionnelle. L’argent de ce fonds sera destiné uniquement aux musiciens de studio.
Cette directive aurait dû être transposée en droit national pour le 1er novembre 2013.
Or, la Commission constate que ni le Luxembourg ni Chypre n’ont notifié les mesures de mise œuvre de cette directive à la Commission. Celle-ci adresse donc aux deux pays un avis motivé, ce qui correspond à la deuxième étape de la procédure d’infraction.
Si, dans un délai de deux mois, les mesures visant à mettre pleinement en œuvre la directive ne lui sont pas notifiées, la Commission peut décider de déférer le Luxembourg et Chypre devant la Cour de Justice de l’UE.
Le projet de loi visant à transposer cette directive est en cours d’examen à la Chambre des députés. Il a été déposé le 17 mars 2014 sous le numéro 6667 et le rapporteur, Claude Haagen, a été nommé le 2 octobre dernier.
Le même jour, la Commission européenne a déféré le Luxembourg devant la Cour de justice de l'Union européenne parce que l'Institut Luxembourgeois de Régulation (ILR), autorité réglementaire nationale (ARN) de cet État membre, n'a pas effectué dans les délais les analyses des marchés pertinents de l'accès au réseau téléphonique public en position déterminée (marché 1) et de la fourniture en gros de lignes louées (marché 6), et ce en violation des dispositions du droit de l'Union en matière de télécommunications.
Or, tout retard dans l'exécution de l'analyse des marchés pertinents peut conduire à l'imposition d'obligations réglementaires alors qu'elles ne sont plus nécessaires, ce qui pourrait avoir des conséquences négatives sur les incitations à investir, sur l'innovation et sur la concurrence sur le marché.
À l'issue de la dernière analyse des marchés précités réalisée au Luxembourg, qui remonte à 2007, l'ILR a imposé des obligations sur les deux marchés. Alors que la nouvelle analyse du marché de la fourniture de lignes louées au Luxembourg devrait être terminée en novembre 2014, il n'existe, actuellement, aucun calendrier pour l'exécution de la nouvelle analyse du marché de l'accès au réseau téléphonique public en position déterminée. Les retards étant considérables, il est impératif de procéder très rapidement à l'analyse pour déterminer si les obligations sont toujours justifiées compte tenu de l'évolution de la concurrence sur le marché depuis leur imposition.
En vertu de la législation de l'UE, les ARN sont tenues, afin de procurer une sécurité juridique suffisante aux acteurs du marché, d'effectuer une analyse de marché à intervalles réguliers: deux ans après l'adoption d'une recommandation de la Commission sur les marchés pertinents, ou trois ans après la dernière analyse réalisée. Les ARN procèdent à ces analyses pour déterminer si un marché est effectivement concurrentiel, auquel cas il convient de supprimer la réglementation ex ante. En revanche, lorsqu'une ou plusieurs entreprises disposent d'une puissance significative sur un marché qui n'est pas encore effectivement concurrentiel, les ARN doivent leur imposer des obligations, afin de promouvoir la concurrence.
En application de l'article 15 de la directive "cadre" (directive 2002/21/CE), les ARN doivent définir les marchés pertinents correspondant aux circonstances nationales conformément aux principes du droit de la concurrence et en tenant le plus grand compte de la recommandation de la Commission.
En 2007, la Commission a adopté la recommandation 2007/879/CE concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d’être soumis à une réglementation ex ante. Elle a, en particulier, recensé à l'annexe sept marchés que les ARN devraient analyser conformément à l'article 15 de la directive "cadre".
L’article 16 de cette directive exige des ARN qu'elles procèdent à l'analyse du marché pertinent et qu'elles notifient le projet de mesure correspondant conformément à la procédure prévue à l’article 7:
a) dans les trois ans suivant l’adoption d’une précédente mesure concernant ce marché. Ce délai peut toutefois, à titre exceptionnel, être prolongé jusqu’à trois ans supplémentaires lorsque l’autorité réglementaire nationale a notifié à la Commission une proposition motivée de prolongation et que cette dernière n’y a pas opposé d’objection dans le mois suivant la notification;
b) dans les deux ans suivant l’adoption d’une recommandation révisée sur les marchés pertinents pour les marchés qui n’ont pas été préalablement notifiés à la Commission; ou
c) dans les deux ans suivant leur adhésion pour les États membres qui ont récemment rejoint l'Union.
Lorsqu’une ARN n’a pas achevé une analyse de marché dans le délai imparti, elle peut demander l'assistance de l’organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE). Elle doit alors, dans les six mois, soumettre à la Commission l'analyse de marché ainsi effectuée.
Il convient toutefois de noter que le 9 octobre 2014, la Commission européenne a publié une nouvelle recommandation concernant les marchés pertinents : elle entend réduire le nombre de marchés soumis à la réglementation en Europe. Ainsi, le marché de détail de l'accès au réseau téléphonique fixe et le marché de gros du départ d'appel fixe ne seraient plus soumis à réglementation. La recommandation redéfinit aussi deux marchés du haut débit afin de limiter les contraintes réglementaires au strict nécessaire pour garantir l'accès concurrentiel au haut débit et les investissements dans ce secteur. Il s’agit des marchés 4, 5 et 6 (ce dernier concernant la fourniture en gros de lignes louées) de la recommandation de 2007, pour lesquels les nouvelles règles prévoient que les produits d'accès virtuel peuvent, à certaines conditions, être considérés comme équivalents au dégroupage physique.