Interrogée par les membres des commissions du marché intérieur (IMCO) et de l'industrie (ITRE) du Parlement européen le 2 octobre 2014, la commissaire désignée par la Pologne, Elżbieta Bieńkowska, chargée par Jean-Claude Juncker des portefeuilles du Marché intérieur, de l'Industrie et des Entreprises, semble avoir passé sans mal son examen de passage devant les députés européens.
Née en 1964 à Katowice en Pologne, titulaire d’un master de philologie orientale de l’université de Cracovie et d’un diplôme de troisième cycle en administration publique, la candidate commissaire a mené une carrière dans l’administration polonaise consacrée à la gestion et à la mise en œuvre des programmes européens financés par la politique de cohésion de l’UE. En 2007, elle est nommée ministre du Développement régional dans le gouvernement de Donald Tusk, fonction qu’elle occupe jusqu’en 2013. Elle est alors nommée vice-présidente du Conseil des ministres et ministre des Infrastructures et du Développement. En 2011, elle avait aussi été élue au Sénat sous l’étiquette de la Plateforme civique (parti démocrate-chrétien affilié au PPE).
Lors de son audition devant les députés européens, la candidate conservatrice a notamment égrené les priorités de son mandat. Celui-ci sera basé, en cas de confirmation, sur l’approfondissement du marché intérieur, la ré-industrialisation de l’UE, la protection des PME et enfin, pour ce qui est de la "dimension externe" du marché intérieur, sur la défense des intérêts européens en appuyant "la mise en place de conditions de concurrence équitables au niveau mondial".
L’approfondissement du marché intérieur constituera ainsi "une priorité essentielle" du mandat de la candidate qui veut un marché unique "équitable, qui favorise le commerce, les investissements et la productivité, et qui encourage le libre choix, offrant ainsi des perspectives nouvelles aux citoyens comme aux entreprises", lit-on dans ses réponses écrites aux députés. Il s’agira notamment de remédier à certaines de ses défaillances (les obstacles qui persistent, la surrèglementation, les problèmes liés à la subsidiarité, etc.), la candidate souhaitant par ailleurs proposer "une stratégie renouvelée" pour le marché intérieur "qui définisse des priorités d’actions sur la base d’une analyse économique approfondie" et qui soit "axée en particulier sur les secteurs ou domaines qui présentent le plus fort potentiel économique ou qui peuvent apporter de nets avantages aux consommateurs et aux entreprises".
La candidate veut également mettre l’accent sur le marché intérieur des services. "J’estime que nous ne devrions pas envisager les biens et les services indépendamment les uns des autres, mais en tant que parties intégrantes d’une économie européenne plus compétitive", a-t-elle écrit. Elle a par ailleurs assuré qu'elle défendait "réciprocité et avantage mutuel" dans les échanges commerciaux internationaux, notamment dans le cadre de l'ouverture des marchés japonais et américain.
Renforcer la base industrielle de l’UE sera la deuxième priorité de la commissaire désignée qui promet de tout mettre en œuvre pour doper l'industrie européenne avec une attention particulière pour l’industrie manufacturière (automobile, construction, chimie, aéronautique) dont les "liens étroits avec le secteur des services et [la] contribution primordiale à l’innovation et aux exportations en font un moteur essentiel de croissance et d’investissement", selon Elżbieta Bieńkowska. Dès le début de son mandat, la candidate veut élaborer un train de mesures "visant à mettre la base industrielle de l’UE au diapason de la mondialisation de l’économie et des évolutions technologiques, démographiques et écologiques". Ces mesures pourraient être axées sur les questions de l’accès aux ressources clés pour l’industrie, de l’accès aux marchés, de l’investissement dans les technologies nouvelles et de l’environnement des entreprises.
La troisième priorité de la candidate commissaire sera de "créer un environnement propice à l’innovation et à la croissance en Europe, au service de l’entrepreneuriat et des PME", ces dernières étant considérées comme la "véritable colonne vertébrale de notre économie". Et de prôner une "simplification à grande échelle de [la] réglementation [des Etats membres] applicable aux PME" et de s’engager à une simplification à l’échelle de l’UE. Elżbieta Bieńkowska veut aussi faciliter l'accès aux financements des PME, évoquant à ce propos la BEI, des garanties et des financements participatifs.
Enfin, dernière priorité de la commissaire désignée, la dimension externe du marché intérieur et de l’accès aux marchés des pays non membres de l’Union. "Je tiens à travailler en étroite collaboration avec ma collègue chargée du commerce pour faire en sorte que la politique commerciale appuie la mise en place de conditions de concurrence équitables au niveau mondial et contribue à renforcer la base industrielle européenne", a-t-elle écrit.
Seul bémol, l’inclusion dans le portefeuille de la candidate commissaire du secteur pharmaceutique et des dispositifs médicaux, retirés à la direction générale santé et consommateurs de la Commission pour être intégrés à celle de l’industrie, ce qui a suscité les interrogations et les critiques de certains eurodéputés. Si elle a reconnu ne pas avoir d'expérience en la matière, elle a assuré que ses principes seraient la qualité et la sécurité pour les patients. Après l'audition, le groupe des socialistes, prêt à la soutenir, a pourtant insisté pour que les médicaments et les appareils médicaux soient exclus de son portefeuille.
Le président de la commission ITRE, Jerzy Buzek (Polonais, de la même famille politique que la candidate, le PPE), a affirmé à l’Agence Europe que les réponses reçues avaient été précises et intéressantes, mais surtout qu'il n'avait pas "entendu de désaccords sérieux, même au sein des groupes politiques".
Du côté des S&D, Evelyne Gebhardt (S&D, Allemande), coordinatrice de son groupe à la commission IMCO, a jugé que "Mme Bieńkowska a donné une vue globale de son portefeuille et affiché une bonne compréhension du domaine", regrettant "qu’elle soit restée assez vague sur une série de questions spécifiques, comme les mesures pratiques qui permettraient de renforcer la dimension sociale du marché intérieur, l’utilisation stratégique de critères sociaux et environnementaux innovants dans le cadre d’une nouvelle législation sur les marchés publics, les outils à mettre en place dans le cadre du plan d'action ‘Entreprenariat 2020’ et les solutions pour stimuler le ‘réseautage’ entre entreprises". Et de l’appeler donc à traduire ses paroles en actes.
La présidente de la commission IMCO, Vicky Ford (CRE, Britannique), s'est elle aussi montrée satisfaite: "Mme Bienkowska a clairement dit qu'elle ne fera pas de nouvelles propositions sans évaluation correcte pour l'économie et la croissance européenne. De plus, si le Parlement estime que c'est mauvais, elle est prête à les retirer. C'est un point très important pour moi", a-t-elle dit à l’Agence Europe.