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Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
Interpellé par Marcel Oberweis sur une étude de l’OCDE qui établit un lien entre inégalité et croissance, Etienne Schneider souligne que le Luxembourg a connu une augmentation modérée de l’inégalité des revenus
20-01-2015


Le 16 décembre 2014, le député Marcel Oberweis (CSV) adressait au ministre de l’Economie une question parlementaire relative à une étude de l'Organisation de coopération et de développement (OCDE) sur les inégalités en termes de revenus.

L’OCDE a en effet a publié début décembre 2014 un rapport dans lequel elle constate une augmentation sans précédent de l'écart entre les plus riches et les plus pauvres. Intitulée "Trends in income inequaiity and its impact on économie growth", cette étude a été réalisée par Federico Cingano dans le Working paper n°163, et résumée dans un communiqué publié le 9 décembre 2014 par le secrétariat de l'OCDE.OCDE

Le "coefficient de Gini", variant entre 0 (égalité parfaite) et 1 (inégalité parfaite), permet de mesurer les inégalités en termes de salaires. Si dans la plupart des pays de l'OCDE ce coefficient a effectivement augmenté considérablement depuis les 30 dernières années, la Belgique, la France et les Pays-Bas ne connaissent qu'une variation sensible. Quant au Luxembourg, le coefficient de Gini a augmenté de 0,247 en 1986 à 0,276 en 2011.

Selon les auteurs du rapport, les inégalités en termes de revenus auraient des conséquences néfastes sur la croissance économique. En effet, de plus en plus de personnes touchent des revenus faibles et ne peuvent par conséquent plus investir dans l'éducation de leurs enfants, ce qui serait, d'après les experts, le facteur clé de la décroissance économique.

Cette étude "montre de manière convaincante, sur base de travaux empiriques, le lien négatif entre l'inégalité et la croissance économique"

Marcel Oberweis, qui souhaitait savoir si le ministre avait connaissance de ce rapport, s’interrogeait sur les raisons de cette variation considérable au Luxembourg, alors que la France, la Belgique et les Pays-Bas n’ont connu qu'une faible évolution de leur coefficient de Gini.

Dans sa réponse transmise le 20 janvier 2015, Etienne Schneider souligne que l’'étude en question "montre de manière convaincante, sur base de travaux empiriques, le lien négatif entre l'inégalité et la croissance économique".

"Ce constat va à l'encontre de l'orthodoxie dominante au cours des décennies passées", relève le ministre qui constate que "depuis la grande récession qui a suivi la crise bancaire et financière en 2008, des pans entiers des résultats établis par la doxa économique ont été remis en cause". "La question de l'inégalité qui avait longtemps été négligée est redevenue centrale dans une série de travaux empiriques", relève-t-il encore.

L'étude de l'OCDE montre que "le Luxembourg continue à se situer favorablement en-dessous de la moyenne de l'UE"

En ce qui concerne l'inégalité au Luxembourg, le ministre fait référence aux travaux du STATEC qui publie depuis dix ans le rapport annuel "Travail et cohésion sociale". Ce rapport exploite une profusion de micro-données collectées par le STATEC et analyse en détail l'ensemble des facteurs qui décrivent et déterminent la redistribution des revenus et la situation des personnes en rapport avec le marché de l'emploi .

Sur la base d’un graphique qui décrit l'évolution du pouvoir d'achat médian (revenu disponible réel médian du ménage), l'indice d'inégalité GINI et le taux de risque de pauvreté, tous rapportés à la base 100 en 1996, le ministre indique que les enquêtes sur les conditions de vie des ménages (EUSILC) montrent une lente augmentation de l'inégalité du revenu disponible réel des ménages au cours des 17 années pour lesquelles les statistiques existent. Depuis 2005, Il semble se dessiner une tendance à la hausse, avec des fluctuations annuelles assez importantes. Les années 2008 et 2009, après la "grande récession", accusent une baisse de l'inégalité (mesurée par l'indice de GINI) due à la baisse des revenus du capital, suite à la crise financière et bancaire. Le dernier chiffre disponible concernant l'année 2013 dénote une hausse de l'inégalité assez marquée. "Il n'y a pas de raison particulière qui explique ce pic en 2013", commente le ministre qui estime qu’il convient d'observer ce phénomène dans le moyen terme et de vérifier son évolution, jusqu'ici en dents de scie, pour voir quel mouvement il va poursuivre dans les prochaines années.

Le graphique montre aussi que le pouvoir d'achat médian des ménages a eu tendance à stagner depuis 2005. Le taux de risque de pauvreté (proportion des ménages ayant un revenu disponible en équivalent adulte en-dessous de 60 % du revenu disponible médian) suit également une tendance ascendante, malgré une évolution en dents de scie. "Notons pourtant que les enquêtes, surtout les plus anciennes sont sujettes à des biais statistiques et les enquêtes récentes font l'objet d'une révision quant à la qualité des données collectées par le CEPS/INSTEAD, responsable de l'enquête pour le compte du STATEC", est-il précisé dans la réponse du ministre.

"L'étude de l'OCDE montre aussi que dans la comparaison internationale, le Luxembourg a connu une augmentation de l'inégalité des revenus, mais modérée", note le ministre qui relève que "le Luxembourg continue à se situer favorablement en-dessous de la moyenne de l'UE".

Les inégalités ne se limitent cependant pas au revenu, ajoute Etienne Schneider qui insiste sur l’importance qu’il y a à réaliser le projet PIBienêtre, qui est inscrit au programme du gouvernement et qui se base sur un avis commun du CES et du CSDD. La réalisation de ce projet permettrait d'apprécier la répartition du bien-être matériel et subjectif sur plusieurs dimensions, au-delà du revenu des ménages.

L'ensemble des statistiques et des analyses résultant de ces initiatives devront également se traduire par des objectifs et des mesures concrètes qui seront inscrits dans notre Plan National de Réforme, dans le cadre du "semestre européen", indique le ministre.