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Emploi et politique sociale
Selon la Cour de Justice de l’UE, le Luxembourg a manqué à son obligation de prévenir une utilisation abusive des contrats de travail à durée déterminée pour les intermittents du spectacle
26-02-2015


Dans un arrêt rendu le 26 février 2015 dans l’Affaire C-238/14 opposant la Commission européenne au Luxembourg sur l’utilisation successive de contrats de travail à durée déterminée (CDD) tel que le pays le pratique avec les intermittents du spectacle, la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) a conclu que le droit luxembourgeois ne prévoyait aucune raison objective justifiant une telle utilisation successive de CDD. Par conséquent, la Cour a jugé que le Luxembourg a manqué à son obligation de prévenir une utilisation abusive des CDD pour les intermittents du spectacle, lit-on dans un communiqué diffusé par le service de presse de l’institution.

Le contexteCJUE

Dans son arrêt, la CJUE rappelle notamment qu’afin de prévenir l’utilisation abusive de CDD successifs, l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée impose aux États membres, quand il n’existe pas des mesures légales équivalentes visant à prévenir les abus, d’indiquer les raisons objectives justifiant le renouvellement des contrats ou bien de déterminer la durée maximale totale des contrats ou le nombre de renouvellements de ceux-ci.

Dans ce contexte, le droit luxembourgeois prévoit que la durée des CDD ne peut, pour un même salarié, excéder 24 mois, renouvellement compris. Or, rappelle la Cour, une autre disposition du droit grand-ducal prévoit cependant que les CDD conclus par les intermittents du spectacle peuvent être renouvelés plus de deux fois, même pour une durée totale dépassant 24 mois, sans pour autant être considérés comme des contrats à durée indéterminée. À cet égard, le Luxembourg avance comme justification que les intermittents participent à des projets individuels et limités dans le temps, si bien que les besoins provisoires des employeurs en matière de recrutement constituent une "raison objective" justifiant un tel renouvellement.

De son côté, la Commission européenne considère en revanche que le droit luxembourgeois ne prévoit aucune raison objective permettant de prévenir une utilisation abusive de CDD successifs conclus avec les intermittents du spectacle. En maintenant des dérogations aux mesures visant à prévenir une utilisation abusive de contrats à durée déterminée successifs accordées aux intermittents du spectacle, la Commission estime que le Luxembourg a violé l’article 5 de l’accord-cadre en cause. En conséquence, elle a donc introduit, le 13 mai 2014, un recours en manquement contre le Luxembourg devant la CJUE.

L’arrêt

Dans son arrêt rendu le 26 février, la Cour a suivi l’argumentation de la Commission européenne, en considérant que le renouvellement de CDD successifs conclus avec les intermittents du spectacle n’est pas justifié, dans le droit luxembourgeois, par une "raison objective". La Cour constate en effet que le Luxembourg n’a pas expliqué en quoi la réglementation nationale exige que les intermittents du spectacle exercent des activités de nature temporaire. Ainsi, les employeurs peuvent conclure des CDD successifs avec des intermittents du spectacle pour satisfaire non seulement des besoins temporaires, mais également des besoins permanents et durables en matière de personnel, estime la CJUE.

La Cour conclut que, même à supposer que le droit luxembourgeois poursuive l’objectif invoqué par le Luxembourg (à savoir procurer une certaine flexibilité ainsi que des avantages sociaux aux intermittents du spectacle en offrant aux employeurs la possibilité de recruter ces travailleurs de façon récurrente sur la base de CDD), un tel objectif ne permet pas de démontrer l’existence de circonstances précises et concrètes caractérisant l’activité des intermittents du spectacle et, partant, justifiant dans ce contexte particulier l’utilisation de CDD successifs.