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L’EFSA a publié son rapport annuel sur les résidus de pesticides dans les aliments – Le Luxembourg est le deuxième pays à utiliser le plus grand nombre de pesticides différents selon les analyses de l’EFSA
12-03-2015


Le logo de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA)L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a publié, le 12 mars 2015, son rapport annuel 2013 sur les résidus de pesticides dans les aliments. Ce rapport indique que plus de 97 % des échantillons alimentaires évalués contiennent des concentrations de résidus de pesticides qui se situent dans les limites légales autorisées, dont presque 55 % sans aucune trace détectable de ces produits chimiques, peut-on lire dans le communiqué de l’agence.

Ces chiffres sont le résultat d’une analyse menée en 2013, dans 27 Etats membres, en Islande et en Norvège, de 80 967 échantillons prélevés sur un large éventail de produits alimentaires transformés et non transformés pour détecter la présence de 685 pesticides. Pour ce rapport, les 29 pays déclarants ont mené deux programmes de surveillance : un programme national conçu par chaque pays, et un programme coordonné par l’UE prévoyant que toutes les autorités nationales de contrôle alimentaire surveillent le même «panier» de produits alimentaires.

L’EFSA a également analysé les risques que pourraient entraîner, pour la santé humaine, une exposition alimentaire à long terme et à court terme aux résidus de pesticides.

Les principaux résultats du rapport

Pour réaliser cette analyse, la majorité des échantillons (68,2 %, soit 55 253 échantillons) ont été prélevés dans des aliments originaires d’Europe, tandis que 27,7 % (22 400 échantillons) provenaient d’aliments importés depuis des pays tiers, ces derniers étant soumis, depuis le règlement UE n°669/2009 publié le 24 juillet 2009, à des contrôles renforcés. Pour les 4,1 % restants (3314 échantillons), l’origine des produis n’a pas été précisée.

Le rapport indique que :

  • 97,4 % des échantillons analysés se situaient dans les limites légales dont 54,6 % ne contenaient aucun résidu détectable et 42,8 % des échantillons contenaient des résidus ne dépassant pas les limites maximales autorisées (LMR) ;
  • 2,6 % dépassaient les LMR, dont 1,5 %  nettement compte tenu de l’incertitude de mesure, déclenchant alors des sanctions juridiques ou administratives à l’encontre des exploitants du secteur alimentaire responsables;
  • 27,3 % (22 126) des échantillons contenaient des résidus de plus d’un pesticide (résidus multiples)

Parmi les échantillons en provenance de l’Union européenne (UE) et l’Espace Economique Européen (EEE), 57,6 % étaient exempts de résidus détectables. 41 % présentaient des résidus au-dessus des limites de quantification (LOQ) mais respectant les limites autorisées. 1,4 % des échantillons excédaient les LMR. Des mesures administratives ou légales ont été prises sur 0,7 % des échantillons qui dépassaient nettement les LMR, note le rapport.

Selon le rapport, le pourcentage d’échantillons issus de pays tiers dépassant les LMR était plus élevé (5,7 %) que celui pour les pays de l’UE/EEE (1,4 %). Le pourcentage d’échantillons en provenance des pays tiers ne contenant aucun résidu était de 46,2 % alors que 48,1 % contenaient des résidus ne dépassant pas les LMR. Toutefois, les taux de dépassement pour les aliments importés ont baissé de près de deux points de pourcentage (depuis 7,5 %) depuis 2012, note l’EFSA.

Le rapport indique que parmi les 2788 échantillons qui dépassaient les LMR, 878 contenaient des pesticides non autorisés dans l’UE. La plupart de ces dépassements en pesticides non autorisés ont été observés sur des produits importés (659 cas) alors que pour les produits issus de l’UE/EEE, les pesticides non-autorisés étaient "moins fréquents", indique le rapport (186 cas).

Les résultats pour les aliments pour bébé, les produits issus de l’agriculture biologique et les produits d’origine animale

L’EFSA a également analysé 1597 échantillons de nourriture pour bébé. Dans 92,7 % des échantillons, aucun résidu détectable n’a été trouvé, alors que 116 échantillons (7,3 %) étaient au-dessus des LOQ. 11 échantillons (0,7 %) ont noté des dépassements des LMR.

En ce qui concerne les aliments issus de l’agriculture biologique, 15,5 % des échantillons (717 des 4620 échantillons analysés) contenaient des résidus de pesticides en-dessous des LMR alors que 0,8 % dépassaient les limites autorisés. Dans ces derniers échantillons, 134 pesticides différents ont été identifiés. Dans la plupart des cas, les résidus détectés concernaient des pesticides autorisés dans l’agriculture biologique, des polluants organiques persistants ou des substances qui ne concernent pas nécessairement l’utilisation de pesticides mais qui provenaient de sources naturelles. 

La majorité des produits d’origine animale (8257 échantillons) étaient exempts de résidus mesurables (88 % soient 7265 échantillons). Les pesticides détectés les plus fréquents étaient des polluants environnementaux persistants ou des composés résultant de sources utilisées par d’autres pesticides.

L’analyse selon le programme coordonné par l’UE

Dans le cadre du programme coordonné par l’UE, les États déclarants ont testé 11 582 échantillons de douze produits alimentaires (pommes, choux pommés, poireaux, laitues, pêches, seigle ou avoine, fraises, tomates, lait de vache, viande de porc et vin) en vue de détecter la présence de 209 pesticides différents. Les résultats indiquent que 99,1 % des échantillons analysés contenaient des concentrations de résidus dans les limites admissibles (dont 46,3 % (5353) des résidus mesurables et 52,8 % (6116) aucun résidu mesurable). 0,9 % des échantillons dépassaient les LMR.

Aucun dépassement des LMR n’a été observé pour le seigle, le lait de vache et la viande de porc. Les plus hauts dépassements des limites maximales autorisées ont été observés pour les fraises (2,5 % des échantillons), la laitue (2,3 %), l’avoine (1,3 %), les pêches (1,1 %) et les pommes (1 %). Le taux de dépassement des LMR était en-dessous de 1 % pour les autres produits : choux pommés (0,9 %), tomates (0,9 %), poireaux (0,5 %) et vin (0.1 %).

Des résidus multiples ont été trouvés dans tous les aliments analysés. Les produits contenant le plus haut pourcentage d’échantillons aux résidus multiples étaient les fraises (63 %), les pêches (53 %), les pommes (46 %) et la laitue (36 %). Des taux plus bas ont été relevés pour l’avoine (28 %), les tomates (27 %), le vin (23 %), le seigle (16 %), les poireaux (14 %) et les choux pommés (4.8 %), a noté l’EFSA.

Par rapport aux résultats de 2010, année au cours de laquelle les mêmes produits alimentaires (à l'exception du vin) avaient été testés (pour 166 pesticides), le pourcentage d'échantillons dépassant les limites légales a diminué ou est resté stable pour tous les aliments testés, fait savoir le rapport. L’Agence a cependant noté, en 2013, moins de dépassements des limites maximales autorisées concernant des pesticides non autorisés pour les pommes, les choux pommés, les pêches et les fraises. Pour les pommes, la laitue et les tomates, certains pesticides ont été trouvés en excédent alors qu’ils n’étaient pas présents ou sous les LMR en 2010.

Le Luxembourg est le deuxième pays à utiliser le plus grand nombre de pesticides différents

Dans le cadre du programme coordonné par l’UE, l’EFSA a analysé 67 échantillons issus de neuf aliments produits sur le sol luxembourgeois. Parmi ces échantillons, aucun ne présentait un taux de résidus au-dessus des limites maximales autorisées et 18 présentaient des taux supérieurs à la limite de quantification mais inférieurs aux LMR. Il s’agissait des pommes (100 % des échantillons), des choux pommés (33 %), des poireaux (25 %), de la laitue (20 %), des tomates (50 %), du seigle (100 %) et du vin (73 %). Quant aux échantillons de lait de vache et de viande de porc, ils ne présentaient aucun résidu mesurable de pesticides.

Dans le cadre du programme national, 254 échantillons de produits luxembourgeois ont été analysés. Sur les 424 pesticides recherchés, 322 ont pu être analysés, en moyenne, par échantillon. Le Luxembourg est ainsi le deuxième pays à utiliser le plus grand nombre de pesticides différents selon les analyses de l’EFSA, après l’Irlande où les analyses ont révélé l’utilisation de 337 pesticides. C’est également bien plus que la moyenne des pays déclarants qui se situe à 200.

Le rapport note que 61 % des échantillons analysés dans le cadre du programme national ont des taux de pesticides qui se situent en dessous des LOQ. 39 % présentent des résidus mesurables mais en dessous des LMR. Cela représente une régression par rapport à 2012 où environ 32 % des échantillons avaient des résidus de pesticides mesurables mais qui restaient en-dessous des limites maximales autorisées. En revanche, en 2013, aucun des aliments produits au Luxembourg analysé n’excédait les limites maximales autorisées alors qu’en 2012, environ 2,5 % des échantillons étaient au-dessus des LMR. 

Pas d’effet à long terme sur la santé des consommateurs, selon l’EFSA

L’EFSA a utilisé les données du programme coordonné par l’UE pour évaluer si l’exposition alimentaire actuelle aux résidus de pesticides était susceptible de représenter un risque pour la santé humaine à long terme (exposition chronique) ou à court terme (exposition aiguë). L’Autorité a conclu que pour l’exposition à court terme, "le risque pour les citoyens européens d’être exposés à des concentrations nocives de résidus par le biais de leur alimentation a été considéré comme faible" et qu'il était "improbable que la présence de résidus de pesticides dans les aliments ait un effet à long terme sur la santé des consommateurs".

Toutefois, le rapport indique qu’il n’est pas en mesure d’informer sur les risques imminents encourus puisque les résultats de l’analyse des résidus de pesticides ne sont mesurables qu’après la consommation des produits.

L’exposition à court terme a été calculée pour les 12 produits pris en compte par le programme coordonné par l’UE. Pour la majorité des pesticides analysés, l’exposition à court terme a été décrétée négligeable ou en dessous du seuil qui pose problème à la santé du consommateur. L’exposition a dépassé la valeur toxicologique de référence (ARfD ou "Acute Reference Dose en anglais") pour 218 échantillons sur les 18147 pris en compte pour l’analyse alimentaire à court terme (1,16 %), en supposant que le produit ait été consommé en grande quantité et sans lavage préalable ou autre procédure qui pourrait réduire les résidus (épluchage par exemple). La plupart des cas dépassant les ARfD étaient dus à des résidus de Chlorpyrifos (145 déterminations). Cela concernait en majorité les pommes et les pêches. Le rapport note cependant que le grand nombre de dépassements d’ARfD est dû au fait que la valeur toxicologique de référence pour le Chlorpyrifos a été récemment revue à la baisse, ce qui amène également à réévaluer les LMR pour le Chlorpyrifos. En dehors des résultats concernant le Chlorpyrifos, 73 échantillons contenaient des résidus dépassant l’ARfD.

L’EFSA a également calculé l’exposition à long terme. Pour tous les pesticides pris en compte, à une exception près, l’exposition à long terme a été considérée comme négligeable ou dans la dose toxicologique acceptable (ADI ou "Acceptable Daily Intake"). En conséquence, les résidus de ces pesticides ne sont pas susceptibles de présenter un risque chronique pour la santé, note le rapport. Seul pour le Dichlorvos, l’exposition à long terme a légèrement dépassé le seuil toxicologique (109 % de l’ADI). Mais fait savoir l’Agence, le Dichlorvos n’est à présent plus autorisé dans l’UE.

La réaction de PAN Europe

Aussitôt après la publication du rapport de l’EFSA, l’ONG Pesticide Action Network Europe a publié un communiqué montrant que le pourcentage de produits contenant plus d’un pesticide avait augmenté en 2013 (27,3 %) alors qu’il était de 26,1 % en 2012.

L’organisation a également condamné l’EFSA de ne pas "présenter la bonne méthode d’analyse de la toxicité" et de ce depuis neuf ans déjà. En effet, note l’organisation, selon le règlement 396/2005 concernant les limites maximales applicables aux résidus de pesticides de 2005, l’EFSA a l’obligation de présenter sa méthode.

PAN Europe en conclut donc que les "standards alimentaires actuels ne protègent pas contre les mélanges toxiques, ne sont pas sûrs et devraient d’urgence être rendus plus stricts". Elle dénonce l’affirmation de l’EFSA qui dit que les résidus de pesticides ne présentent pas de risques pour la santé humaine comme étant "clairement fausse et non scientifique".

L’organisation estime que les pesticides n’ont pas leur place dans les produits alimentaires et enjoint la Commission et les Etats membres à viser l’objectif "zéro pesticide" pour exclure tous les risques.