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Justice, liberté, sécurité et immigration - Traités et Affaires institutionnelles
Le ministre des Affaires étrangères, Jean Asselborn, reçoit son homologue helvète, Didier Burkhalter, lors d’une visite de travail dominée par les conséquences de la votation suisse sur l’immigration et le dossier ukrainien
11-05-2015


Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, avec le chef du Département fédéral des affaires étrangères de la Confédération suisse, Didier Burkhalter (source: MAEE Barbancey)Le Luxembourg fera tout son possible pour que le dialogue entre la Suisse et l’Union européenne (UE) se poursuive et aboutisse à une solution positive dans le contexte de la votation populaire suisse du 9 février 2014 qui visait à "limiter l’immigration de masse". C’est ce que le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères et européennes, Jean Asselborn, a notamment promis à son homologue suisse, le chef du Département fédéral des affaires étrangères de la Confédération helvète, Didier Burkhalter, qui était en visite de travail à Luxembourg le 11 mai 2015.

La Suisse et l’UE ont toutes deux intérêt à débloquer la situation

Si les deux ministres ont largement évoqué les relations bilatérales entre leurs deux Etats, c’est bien la votation populaire suisse du 9 février 2014 visant à "limiter l’immigration de masse" et ses conséquences qui auront dominé la conférence de presse conjointe organisée le même jour. 

"Je pense que le Luxembourg va faire son travail de façon correcte en ce qui concerne les relations entre l’UE et la Suisse", a ainsi indiqué Jean Asselborn. Dans le contexte de la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE au deuxième semestre 2015, le ministre a en effet expliqué avoir tout de suite "accepté la proposition de son homologue", à savoir que durant cette période "nous allons essayer au niveau diplomatique et au niveau ministériel de garder le contact" avec la Suisse "qui est un pays très ami". Et de rappeler que la Suisse avait des accords "très poussés et très profonds" avec l’UE depuis 1972 pour ce qui est du libre-échange, près de 120 accords sectoriels ainsi que les accords bilatéraux de 2002 sur la libre-circulation des personnes, Schengen ou la fiscalité de l’épargne notamment. Par ailleurs, environ 1,3 million de citoyens de l’UE vivaient en Suisse en 2014 (sur 1,9 millions de citoyens étrangers) et 450 000 Suisses étaient établis dans l’UE, a insisté Jean Asselborn.

Pour ce qui est précisément de la votation populaire suisse, Jean Asselborn a rappelé que le gouvernement helvète avait jusqu’à 2017 pour la mettre en œuvre et que la Suisse et l’UE "avaient toutes les deux intérêts à débloquer cette situation". "Je pense que dans l’UE, on respecte le résultat de la votation populaire et je pense aussi qu’en Suisse il y a un respect pour le principe de libre-circulation des personnes, acquis majeur de l’UE", a ainsi dit Jean Asselborn, en rappelant que "l’UE évidemment ne peut rien imposer à la Suisse".

Selon le ministre, il n’y aura cependant "pas de solution miracle", mais le Luxembourg, pendant sa Présidence, "va tout faire pour que le dialogue entre l’UE et la Suisse continue" et que ce dialogue aille "dans une direction positive". Selon Jean Asselborn, il ne sera cependant "pas possible de changer les traités", mais il estime "qu’il y a peut-être moyen de trouver des solutions en ce qui concerne le droit secondaire". En tous les cas, le ministre luxembourgeois a promis à son homologue que le Grand-Duché "restera sur une piste où l’on fait tout pour travailler à ce que l’on trouve une solution ensemble, s’il y a le respect évidemment, d’un côté comme de l’autre, d’une part du résultat du référendum et de l’autre de la libre-circulation". Et le ministre d’estimer qu’aucun de ces deux éléments n’empêchent, "sous certaines conditions", de "trouver une ligne commune".

"La volonté est là parce que la Suisse est trop importante pour que l’on n’arrive à la fin du compte à [aucune solution]", a dit le ministre qui a souligné qu’il fallait "de la bonne volonté de la part de l’UE […] pour trouver, dans le droit secondaire, des moyens de sortir du trou".

Dans un communiqué diffusé à l'issue de la rencontre par le Ministère luxembourgeois, Jean Asselborn a encore précisé que "tout en respectant le choix du peuple suisse, le Luxembourg, en tant que membre fondateur de l’UE, estime que la libre circulation des personnes est un fondement essentiel des politiques de l'UE et que le marché intérieur et ses quatre libertés sont indivisibles". Rappelant qu’"il est clair que l’UE ne saurait accepter une remise en question de l’essence-même du principe à travers l’introduction de plafonds ou de contingents à l’immigration", le ministre Asselborn a insisté sur le fait qu’"il est important de trouver une solution aux problèmes actuels afin de préserver le réseau d’accords existant".

De son côté, le chef du Département fédéral des affaires étrangères de la Confédération suisse, Didier Burkhalter, sans évoquer la votation du 9 février 2014, a "remercié le Luxembourg et ses autorités d’avoir accepté très clairement d’avoir un dialogue renforcé durant toute la Présidence". "Je crois que c’est important, quand on a toute une série d’éléments soit en consultation, soit en discussion ou en négociation, – et il y a beaucoup de choses entre l’entité suisse et l’entité de l’UE –, que la Présidence luxembourgeoise de l’UE soit bien au courant et puisse donner un avis dans les différents endroits", a ainsi souligné Didier Burkhalter.

Le chef du Département fédéral des affaires étrangères a par ailleurs évoqué "la stratégie positive" de son pays dans ce contexte, alors qu’actuellement "toute une série d’éléments, dont sont en mouvement". Ainsi, la Suisse négocie, "à la demande de l’UE", le cadre institutionnel de la relation bilatérale pour ce qui est de l’accès au marché. En outre, la Suisse négocie sur divers dossiers fiscaux dont l’échange automatique d’informations (EAI) ou la réforme de la fiscalité des entreprises "qui avancent". Ces dossiers "ont un impact sur la relation entre la Suisse et l’UE et ils ont permis de modifier positivement les relations avec cinq grands pays dont la France, l’Allemagne et l’Italie", a-t-il indiqué, notant par ailleurs qu’il serait important de faire avancer d’autres dossiers, en particulier "l’accord bilatéral sur l’électricité".

Plus généralement, le chef de la diplomatie suisse a tenu à souligner "les nombreux points communs" entre le Luxembourg et la Suisse, à savoir la dynamique économique et celle de la place financière, l’ensemble de la question multilatérale où les deux pays "soutiennent" leurs initiatives réciproques et "développent des avis communs". Mais il a aussi insisté sur "les différences" et "les situations très différentes" qu’il s’agit de reconnaître, l’une d’entre elles étant l’appartenance à l’Union européenne, dont le Luxembourg est membre fondateur. "Il faut être conscient de ces points communs et de ces différences […] et s’en servir comme socle pour chercher des activités communes concrètes", a ainsi souligné Didier Burkhalter.

Jean Asselborn salue "l’engagement très apprécié" de la Suisse dans le contexte ukrainien

Pour ce qui relève de la question de la sécurité européenne, et plus particulièrement dans le contexte du conflit en Ukraine, le ministre Asselborn a par ailleurs remercié son homologue suisse pour son "engagement très apprécié" dans le dossier ukrainien en 2014 en tant que président de l’OSCE, saluant une position "toujours équilibrée et constructive". "Je pense que l’OSCE est le seul instrument valable dont nous disposons pour essayer d’appliquer ce qui a été décidé à Minsk" en février 2015, a ainsi souligné Jean Asselborn.

Didier Burkhalter a pour sa part insisté sur le maintien de l’implication de la Suisse dans le groupe de contact trilatéral au-delà de la présidence de l’OSCE occupée par la Confédération en 2014. Il s’agit ainsi d’assurer "une continuité de l’action car nous estimons que seule l’OSCE peut réellement être un organisme international qui a un impact sur le terrain dans cette crise délicate", a-t-il poursuivi. Et d’annoncer que la Suisse comptait contribuer à l’amélioration de la situation humanitaire des deux côtés de la ligne de contact en transférant prochainement un convoi destiné à rendre potable l’eau dans la région pour environ 3,5 millions de personnes sur une période de six mois.