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Emploi et politique sociale
Dans son rapport annuel sur l’évolution de l’emploi et de la situation sociale dans l’UE en 2015, la Commission européenne souligne la nécessité d’investir dans le facteur humain pour garantir la croissance économique
21-01-2016


Marianne Thyssen, commissaire européenne pour l’Emploi, les Affaires sociales, les Compétences et la Mobilité des travailleurs, le 21 janvier 2016Le 21 janvier 2016, la Commission européenne a présenté son rapport 2015 sur l’évolution de l’emploi et de la situation sociale (ESDE), un rapport annuel qui présente une analyse détaillée des problèmes et préoccupations de l’UE et de ses États membres en la matière.

Dans cette cinquième édition du rapport, la Commission met en évidence une nouvelle évolution positive de l’emploi et de la situation sociale dans l’Union en 2015. Malgré les récentes améliorations, le rapport note que de fortes disparités subsistent néanmoins entre les États membres en ce qui concerne la croissance économique, l’emploi et d’autres indicateurs clés en matière sociale et de marché du travail. La Commission estime que bon nombre de ces disparités sont liées à une sous-utilisation du capital humain à plusieurs égards.

Le rapport ESDE 2015 examine les moyens de lutter contre ces disparités, en mettant tout particulièrement l’accent sur la création d’emplois, l’efficacité du marché du travail, la modernisation de la protection sociale et l’investissement dans les ressources humaines.

"Nous devons faire en sorte que les Européens, et surtout ceux qui sont le plus coupés du marché du travail, bénéficient de plus de perspectives plus intéressantes dans l’Union", a souligné à ce propos Marianne Thyssen, commissaire européenne pour l’Emploi, les Affaires sociales, les Compétences et la Mobilité des travailleurs, selon ses propos repris dans un communiqué de la Commission. "Il nous faut investir dans le facteur humain pour parvenir à la croissance et à l’emploi", a-t-elle ajouté. Et de souligner la nécessité de veiller à ce que les systèmes de droit du travail et de protection sociale soient "adaptés à la réalité du 21e siècle", et d‘encourager l’esprit d’entreprise et l’innovation. "Le pilier européen de droits sociaux aura un rôle important à jouer dans ce contexte", a-t-elle encore indiqué.

Le contexte : Les effets de la crise se font encore sentir

Le chômage a continué de baisser en 2015

Le rapport relève tout d’abord que le chômage a continué de baisser en 2015. Lors de la conférence de presse consacrée à la présentation du rapport ESDE 2015, Marianne Thyssen a indiqué que la reprise économique s’était poursuivie et l'emploi avait continué d'augmenter pour la plupart des secteurs et pour toutes les catégories d'âge. Les emplois permanents et à temps plein ont également augmenté, tout comme le nombre de travailleurs âgés de plus de 50 ans. En outre, le nombre de jeunes qui ont retrouvé un emploi ou qui effectuent des études ou une formation a également augmenté. "Ceci prouve que nos actions dans la lutte contre le chômage des jeunes commencent à porter leurs fruits", s’est félicitée Marianne Thyssen. Les ménages ont par ailleurs bénéficié d’une hausse de leur revenu disponible.

Augmentation des inégalités entre pays et au sein de l’UE

"Malgré ces améliorations, les effets de la crise se font encore sentir", a toutefois regretté le commissaire. Le rapport révèle en effet que la crise a augmenté les inégalités entre pays et au sein de l’UE.

Les taux d'emploi varient fortement, de seulement 55 % en Grèce à 81 % en Suède. Au Luxembourg, ce taux s’élève à 73 %, 3 points de pourcentage au-dessus de la moyenne de l’UE (70 %),

Bien que le chômage ait diminué dans les pays les plus durement touchés par la crise, en septembre 2015, les taux de chômage se situaient encore à plus de 20 % en Espagne et en Grèce. En revanche, en Allemagne, il s’élevait à 5 %. Au Luxembourg, ce taux s’élève à près de 6 %, alors que la moyenne de l’UE gravite autour de 10 %.

Pour ce qui est des taux de chômage des jeunes, ceux-ci varient de 49 % en Grèce à près de 10 % en Autriche et au Danemark. Au Luxembourg, ce taux s’élève à 19 %, soit un point de pourcentage en moins que la moyenne de l’UE.

Pour ce qui est des taux d’activité, ceux-ci varient de 83 % en Suède à 64 % en Italie. Au Luxembourg, celui-ci s’élève à près de 71 %, soit deux points de pourcentage en-dessous de la moyenne de l’UE.

En 2014, 40 % de la population en Bulgarie et en Roumanie présentaient un risque de pauvreté et d’exclusion sociale. En Grèce, ce chiffre s’élevait à 35 %. Parmi les pays ayant les pourcentages les plus bas, figurent la République Tchèque et la Finlande (autour de 15 %). Au Luxembourg, ce chiffre s’élève à près de 20 %. La moyenne de l’UE gravite autour de 24 %.

Pour ce qui est de la variation du risque de pauvreté et d’exclusion sociale, le Luxembourg figure parmi les pays où ce chiffre a le plus augmenté entre 2008 et 2014, avec un plus de 3 points de pourcentage (+ 6 en Grèce, + 4 à Chypre, + 3 à Malte.) Parmi les pays où ce chiffre a le plus baissé, figurent notamment la Bulgarie et la Pologne (-5), et la Roumanie (- 4). Au niveau de l’UE, ce chiffre est resté stable.

Le rapport signale par ailleurs que l'utilisation à grande échelle des contrats temporaires ne conduit pas toujours à des contrats permanents. Dans certains pays comme Chypre, près de 95 % de tous les contrats temporaires sont involontaires, tandis qu'en Autriche, ils ne sont qu’environ 9 %. Au Luxembourg, ce chiffre s’élève à près de 55 %. La moyenne de l’UE se situe à près de 63 %.

"Ces inégalités sont inacceptables parce qu'elles entravent la croissance et érodent la confiance des gens dans une véritable Europe sociale", a déclaré Marianne Thyssen lors de la conférence de presse.

Promouvoir la création d’emplois

Dans ce contexte, le rapport ESDE 2015 met en avant le potentiel du travail indépendant et de l’entrepreneuriat en matière de création d’emploi. En 2014, un peu moins de 16 % de toutes les personnes employées étaient des travailleurs indépendants, avec les pourcentages les plus élevés en Grèce (32 %) et en Roumanie (30 %) et les plus bas en Suède (5 %) et au Luxembourg (6%). Par rapport à 2000, la part des travailleurs indépendants a augmenté de près de 2 points de pourcentage dans l'UE, avec les plus fortes baisses en Roumanie (-15), en Lituanie (-8) et en Hongrie (-7), tandis que les plus fortes augmentations ont été enregistrées en Slovaquie (+5), au Royaume-Uni (+3) et en Slovénie (+2).

Il ressort cependant des données que certaines catégories de personnes — dont les jeunes, les personnes âgées, les femmes et les personnes issues des minorités ethniquesrencontrent parfois des obstacles plus importants lorsqu’elles tentent de créer leur propre entreprise. D’où par exemple l’existence d’un déséquilibre majeur entre les sexes au niveau du travail indépendant dans l'UE, les femmes représentant seulement environ un tiers du total. Dans tous les États membres, les femmes étaient minoritaires parmi les travailleurs indépendants en 2013, avec les parts les plus élevées en Lituanie (41,6 %), en Lettonie (38 %) et au Luxembourg (40,3 %) et les plus faibles à Malte (19,6 %) et en Irlande (20,8 %). En outre, dans tous les États membres, la part totale des jeunes dans l'emploi indépendant est très faible, allant de 1 % en Slovénie à 6 % à Malte en 2013.

En outre, le rapport 2015 indique qu’une majorité de la population estime ne pas posséder les compétences et connaissances nécessaires pour lancer une entreprise.

Dans ce contexte, le rapport ESDE montre que des politiques ciblées peuvent améliorer la situation. Il peut s’agir notamment de la facilitation de l’accès au financement ou d’incitations fiscales, de l’éducation à l’esprit d’entreprise ou de l’accès aux services de garde d’enfants et de soins aux personnes âgées.

Le rapport ESDE pointe en outre une diversification des types de contrats de travail, qui, d’une part, permettent davantage de souplesse dans les formules de travail et, partant, une participation accrue au marché du travail mais, d’autre part, peuvent également entraîner une segmentation du marché du travail. Si certains nouveaux contrats placent tant l’employeur que le salarié dans une situation avantageuse, d’autres sont source d’incertitude quant à l’emploi. "La flexibilité est importante, certes, mais la sécurité est également nécessaire — une question qui devra elle aussi être traitée dans le cadre du développement du pilier européen de droits sociaux", lit-on dans le communiqué de presse diffusé par la Commission.

Améliorer l’efficacité du marché du travail

Le rapport ESDE 2015 révèle que l’Union peut mieux mettre à profit les ressources humaines dont elle dispose grâce à la mobilité. Bien que le nombre des travailleurs mobiles ait augmenté au cours des vingt dernières années, leur part dans l’ensemble de la main-d’œuvre reste limitée : seulement 4 % des habitants de l’Union de 15 à 64 ans vivent dans un autre État membre que celui où ils sont nés. Ces chiffres masquent des écarts considérables entre les États membres. La part des personnes mobiles de l'UE rapportée à la population totale dépasse 10 % à Chypre, en Irlande et au Luxembourg (32 %), tandis que la part des personnes de l'UE mobiles se déplaçant vers les 13 Etats membres qui ont adhéré à l'UE en 2004 ou plus tard reste modeste, en dessous de 0,5 % en Bulgarie, en Roumanie, dans les Etats baltes et en Pologne. Dans l'ensemble, cinq grands États membres (Allemagne, Espagne, France, Italie et Royaume-Uni) accueillent 70 % de toutes les personnes de l'UE mobiles.

Or, selon le rapport, les travailleurs mobiles de l’Union ont généralement de meilleures perspectives d’emploi que la population autochtone. En outre, leurs flux ont fait reculer le chômage dans certains États membres les plus durement frappés par la crise et ont contribué à remédier à la pénurie de personnel dans les pays d’accueil. Le rapport ESDE met donc clairement en évidence le potentiel économique de la mobilité. Le paquet pour la mobilité des travailleurs "qui est actuellement en cours de préparation vise à élargir les opportunités pour tous, tout en assurant que les règles soient claires, équitables et applicables", a déclaré Marianne Thyssen à ce sujet.

Le rapport se penche également sur le chômage de longue durée, qui touche environ 11,4 millions de personnes dans l’Union. Selon le rapport, la lutte contre ce type de chômage est essentielle pour améliorer l’efficacité du marché du travail, car les chômeurs de longue durée ont environ 50 % de chances de trouver un emploi par rapport aux chômeurs de courte durée. D’après l’analyse qui figure dans le rapport, le fait d’être inscrits auprès des services publics pour l’emploi nationaux et de participer à une formation augmente considérablement la possibilité, pour ces personnes, de décrocher un emploi durable. La recommandation sur le chômage de longue durée, adoptée par le Conseil EPSCO du 7 décembre 2015, confirme ces constatations.

Enfin, selon le rapport, le dialogue social doit jouer un rôle essentiel dans la promotion d’une relance économique durable et inclusive. Rappelant que les partenaires sociaux ont participé à l’élaboration et à la mise en œuvre de plusieurs réformes et politiques majeures, le rapport note que pour que le dialogue social joue ce rôle de manière efficace, les capacités des partenaires sociaux doivent être renforcées, en particulier dans les États membres où le dialogue social est faible ou a été affaibli en raison de la crise économique.

Investir dans le facteur humain

Selon le rapport, même si le chômage reste élevé dans l’Union, les employeurs continuent à avoir des difficultés à pourvoir certains postes. Outre une véritable inadéquation des compétences, la capacité à pourvoir les postes vacants est également limitée par l’impossibilité d’offrir une rémunération ou des conditions de travail attrayantes, des formations de qualité ou de bonnes perspectives de carrière. Le rapport ESDE 2015 fait le constat qu’une part importante des travailleurs ressortissants des pays tiers occupe des emplois inférieurs à leur niveau de qualification. La stratégie pour des compétences nouvelles en Europe, que la Commission élabore pour cette année, visera à relever ces défis. "Nous devons mieux anticiper les besoins des employeurs et faire une meilleure utilisation des compétences existantes", a indiqué Marianne Thyssen.

En outre, le taux d’emploi des femmes avec enfants et des travailleurs plus âgés demeure très faible. "Les efforts pour encourager ces personnes à participer davantage au marché du travail seront déterminants, dans le contexte du vieillissement de la population", signale la Commission dans son communiqué.