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Environnement - Transports
Le député Serge Wilmes interpelle Carole Dieschbourg et François Bausch au sujet de l’accord trouvé par les experts du CTVM sur les modalités des tests réalisés pour mesurer les émissions des véhicules en conditions de conduite réelles
19-01-2016


Dans une question parlementaire datée du 14 décembre 2015, le député Serge Wilmes (CSV) interpellait les ministres de l’Environnement, Carole Dieschbourg, et des Transports, François Bausch, au sujet de l’accord trouvé le 28 octobre 2015 sur les futures modalités des tests réalisés pour mesurer les émissions des véhicules en conditions de conduite réelles (ECR ou, en anglais, RDE pour "Real Driving Emissions").

Le Conseil a donné son feu vert en novembre pour que les émissions des véhicules à moteur diesel soient mesurées en conditions de conduite réelles

Jusqu’ici, les émissions d’oxyde d’azote (NOx) des véhicules à moteur diesel, que l’UE veille à voire réduire depuis 2000, avec une baisse des plafonds passant de 500 mg/km en 2000 à 80 mg/km en 2014 pour le standard Euro 6, étaient mesurées en laboratoire.  Or, selon la Commission européenne elle-même, les essais en laboratoire ne rendent pas compte avec précision de la quantité de pollution atmosphérique générée dans des conditions de conduite réelles. Les véhicules diesel Euro 6 produits actuellement se situeraient en moyenne 4 à 5 fois au-dessus de la limite d’émission des NOx (400 %) lorsqu’on effectue les mesures dans des conditions de conduite réelles plutôt qu’en laboratoire.

Une nouvelle procédure d’essai en conditions de conduite réelles a été votée en mai 2015 par le Comité technique des véhicules à moteur (CTVM) et devait entrer en vigueur début 2016. Le Conseil a donné son feu vert  à ces mesures le 10 novembre 2015, sous présidence luxembourgeoise, alors que l’affaire Volkswagen battait encore son plein.

La procédure ECR vient en complément de la procédure d’essai en laboratoire et permettra de vérifier que les niveaux d’émission des oxydes d’azote (NOx) – et, à un stade ultérieur, également le nombre de particules (PN) – mesurés au cours de l’essai en laboratoire sont confirmés dans des conditions de conduite réelles. Cela signifie que le véhicule circulera en extérieur et sur une route réelle, selon des schémas d’accélération et de décélération aléatoires. Les émissions de polluants seront mesurées par des systèmes portables de mesure des émissions (PEMS) qui seront fixés au véhicule. Les essais ECR permettront de réduire sensiblement les écarts observés actuellement entre les émissions mesurées en laboratoire et les émissions mesurées sur route, dans des conditions de conduite réelles. Ces essais limiteront en outre dans une large mesure le risque de manipulation par des dispositifs d’invalidation. Au cours de la première phase, qui débutera en janvier 2016, le système portable d’essais ECR sera utilisé à des fins de suivi.

Les experts du Comité technique des véhicules à moteur (CTVM) ont trouvé un accord visant à réduire l’écart entre la limite réglementaire mesurée en laboratoire et les valeurs mesurées en conduite réelle

Le 28 octobre 2015, le CTVM s’est prononcé sur un deuxième train de mesures concernant les limites réglementaires d’émissions à ne pas dépasser (NTE) dans le cadre des essais ECR. Une fois en vigueur, ce train de mesures garantira la prise en compte des essais ECR dans le certificat de conformité émis par l’autorité nationale chargée de la réception par type.

L’accord trouvé entre les experts représentant les Etats membres dans le CTVM prévoit que les nouveaux essais ECR auront un effet contraignant sur les certificats de réception délivrés par les autorités compétentes, et ce à partir de septembre 2017 pour tous les types de véhicules nouvellement réceptionnés (et à partir de septembre 2019 pour tous les véhicules neufs).

Dans la mesure où il existe des limites techniques à la possibilité d’améliorer à court terme les niveaux d’émissions réels sur les véhicules diesel actuellement produits, les États membres ont décidé que les constructeurs automobiles devaient procéder à une réduction en deux étapes de l’écart entre la limite réglementaire mesurée dans des conditions de laboratoire et les valeurs de la procédure ECR, lorsque le véhicule est conduit par un conducteur réel sur une vraie route ("facteur de conformité"):

  • dans un premier temps, les constructeurs automobiles devront réduire l’écart de manière à faire passer le facteur de conformité à 2,1 au maximum (110 %) pour les nouveaux modèles d’ici septembre 2017 (septembre 2019 pour les nouveaux véhicules);
  • dans un deuxième temps, cet écart sera ramené à un facteur de 1,5 (50 %), compte tenu des marges d’erreur technique, d’ici janvier 2020 pour tous les nouveaux modèles (janvier 2021 pour tous les nouveaux véhicules).

Serge Wilmes observe que les valeurs retenues par le CTVM sont nettement moins ambitieuses que celles proposées par la Commission avec le soutien du Luxembourg

Serge Wilmes rappelait pourtant que la Commission proposait encore mi-octobre, avec le soutien du gouvernement luxembourgeois, un facteur de conformité de 1,6 (60 %) pour 2017 et 1,2 (20 %) pour 2020. Le député soulignait que ces valeurs étaient proches des exigences du Parlement européen.

Le député soulignait que les valeurs adoptées dans le cadre de la procédure de comitologie par des fonctionnaires mandatés étaient nettement supérieures et n’avaient pas de légitimité parlementaire. Il demandait ainsi aux ministres quel était le mandat du représentant du Luxembourg, pour quelles raisons de tels plafonds ont été adoptés et enfin comment le gouvernement luxembourgeois se positionne à l’égard de telles valeurs limites.

"Il n’y avait pas de majorité pour une proposition plus ambitieuse et une décision rapide était nécessaire", expliquent Carole Dieschbourg et François Bausch

Dans leur réponse transmise le 19 janvier 2016, Carole Dieschbourg et François Bausch confirment que le Luxembourg a soutenu la proposition ambitieuse de la Commission européenne au sein du Comité, mais expliquent aussi qu’aucune majorité ne pouvait être trouvée en faveur de la proposition de la Commission dans la mesure où les positions des Etats membres divergeaient fortement. La Commission a donc elle-même mis sur la table les facteurs de conformité révisés de 2,1 pour la première phase et de 1,5 pour la deuxième phase, rapportent les deux ministres.

Ces plafonds correspondent aux normes techniques actuelles, ainsi qu’aux recommandations du Comité de liaison européen des fabricants d’équipements et de pièces automobiles (CLEPA), dont les deux ministres relèvent la compétence et l’expertise en ce qui concerne les capacités d’innovation du secteur automobile.

"Le Luxembourg a une préférence claire pour des plafonds plus ambitieux et n’a eu de cesse de défendre cette position", poursuivent les deux ministres qui expliquent que le représentant luxembourgeois au sein du Comité a voté, après avoir consulté les deux ministres, en faveur des valeurs revues par la Commission "car il n’y avait pas de majorité pour une proposition plus ambitieuse et qu’une décision rapide était nécessaire afin que l’on exige enfin de l’industrie automobile des avancées concrètes après des années de bras de fer".

Une fois mise en œuvre, cette décision signifierait un net recul des émissions de véhicules, soulignent toutefois les ministres en se référant à une étude de l’International Council on Clean Transportation (ICCT) d’octobre 2014 selon laquelle les véhicules Euro 6 testés dépasserait en moyenne de 5 à 7 fois les plafonds. Or, les nouvelles règles permettraient une amélioration de 58 à 70 % pour la première phase et de 70 à 80 % pendant la deuxième phase, notent les ministres que cette nette amélioration" a poussés à adopter les facteurs de conformité proposés pour éviter un nouveau retard et pour faire en sorte que des véhicules diesel plus respectueux de l’environnement soient sur  les routes au plus vite.

Les ministres mentionnent la proposition de la commission ENVI d’opposer un veto à cette décision lors d’un vote du Parlement européen prévu lors de la plénière de février

Les ministres mentionnent toutefois que la mise en œuvre de la décision du Comité technique est "retardée" du fait que les eurodéputés de la commission de l’Environnement (ENVI) ont proposé le 14 décembre 2015 que le Parlement européen oppose son veto à ce projet d’acte délégué. Si la plénière devait suivre cette recommandation lors de son vote prévu en février prochain, il faudrait à nouveau discuter de la mise en place des nouveaux tests au niveau européen, commentent les ministres.

"Le gouvernement luxembourgeois a pris acte des objections du Parlement européen pendant la présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE et continue de se montrer en principe ouvert à toute proposition qui permettrait de garantir à court terme des valeurs limites ambitieuses en conduites réelles", assurent en conclusion les deux ministres.