Une "grande partie de l’économie mondiale est confrontée à des défis majeurs, de sorte que les risques qui pèsent sur la croissance européenne s'accentuent", a estimé la Commission européenne qui a publié le 4 février 2016 ses prévisions économiques d’hiver.
Selon la Commission, les perspectives sont restées globalement stables depuis l’automne, mais les risques d'une croissance moins favorable que prévu augmentent, principalement en raison de facteurs externes.
Dans la zone euro, la croissance devrait atteindre 1,7 % cette année contre 1,6 % l'an dernier, avant de grimper à 1,9 % en 2017. La croissance économique de l’UE devrait rester stable à 1,9 % cette année et augmenter pour atteindre 2,0 % l’an prochain.
Il semble désormais que certains facteurs favorables à la croissance seront plus marqués et plus durables que prévu: la faiblesse des prix du pétrole, le taux de change de l'euro et des conditions de financement favorables.
Par ailleurs, les risques pesant sur l’économie s'accentuent et de nouveaux défis surgissent: un ralentissement de la croissance en Chine et dans d’autres économies de marchés émergents, la faiblesse des échanges mondiaux et l’incertitude politique et géopolitique.
En 2015, l’activité économique a progressé ou est restée stable dans tous les États membres. D’ici à 2017, les économies de tous les États membres devraient connaître une croissance. Toutefois, les taux de croissance du PIB restent très disparates, en raison de caractéristiques structurelles et de positions conjoncturelles différentes.
La consommation privée devrait rester le principal moteur de la croissance cette année et l’an prochain, soutenue par l'amélioration du marché de l’emploi et par l'augmentation du revenu disponible réel. L'investissement devrait lui aussi bénéficier progressivement de l’accroissement de la demande, d'une amélioration des marges bénéficiaires, de conditions de financement favorables et d'un allègement des pressions en faveur du désendettement.
La croissance de l'emploi devrait demeurer modeste. Les taux de chômage devraient continuer de diminuer, mais plus lentement qu’en 2017. "Le recul du chômage devrait être plus prononcé dans les États membres qui ont mis en œuvre des réformes du marché du travail", juge la Commission.
Dans la zone euro, le taux de chômage devrait passer de 11 % en 2015 à 10,5 % en 2016 et à 10,2 % en 2017. Dans l’UE, il devrait passer de 9,5 % en 2015 à 9,0 % cette année et 8,7 % l’an prochain.
Le déficit cumulé des administrations publiques de la zone euro devrait continuer à baisser grâce à la croissance de l’activité économique et, dans une moindre mesure, à la diminution des dépenses d’intérêts.
Dans la zone euro, le déficit public serait tombé à 2,2 % du PIB en 2015 (2,5 % pour l'UE dans son ensemble) et devrait continuer à diminuer pour s’établir à 1,9 % du PIB cette année (2,2 % dans l’UE) et à 1,6 % du PIB en 2017 (1,8 % pour l'UE). L’orientation budgétaire de la zone euro devrait être légèrement plus favorable à la reprise économique cette année. Pour l'UE dans son ensemble, elle devrait rester globalement neutre. Le ratio de la dette au PIB de la zone euro devrait diminuer par rapport à son niveau maximal de 94,5 % en 2014 (88,6 % pour l'UE) pour atteindre 91,3 % en 2017 (85,7 % pour l'UE).
Le taux d’inflation annuel dans la zone euro n’a été que légèrement supérieur à zéro vers la fin de l’année 2015, principalement en raison de la poursuite de la baisse des prix du pétrole. Les augmentations des prix à la consommation dans la zone euro devraient rester très faibles au cours du premier semestre et devraient commencer à s'accentuer au cours du second, lorsque les effets de la chute brutale du prix du pétrole se résorberont.
Pour l’année 2016 dans son ensemble, le taux d’inflation annuel de la zone euro est désormais estimé à 0,5 % seulement, en partie parce que la croissance des salaires reste modérée. L’inflation devrait progressivement remonter et atteindre 1,5 % en 2017, lorsque la hausse des salaires, l’augmentation de la demande intérieure et une progression modérée des prix du pétrole accentueront les tensions sur les prix.
Compte tenu de la dégradation des perspectives économiques mondiales, les prévisions de relance de l’économie mondiale (à l’exclusion de l’UE) se sont détériorées par rapport aux prévisions de l’automne. En effet, selon les estimations pour 2015, la croissance mondiale n'avait jamais été aussi faible depuis 2009. La croissance des exportations de la zone euro devrait s’accélérer au cours de l’année 2016 après un ralentissement au cours du second semestre de 2015. Cela s'explique par les effets différés de la dépréciation de l'euro, une baisse des coûts salariaux unitaires, ainsi qu’une augmentation progressive de la demande extérieure.
Les perspectives économiques restent très incertaines et d'une manière générale, les risques s'accentuent.
Ces risques sont liés notamment à une croissance plus faible dans les marchés émergents, à un ajustement désordonné en Chine et à la possibilité que de nouvelles hausses des taux d’intérêt aux États-Unis entraînent des perturbations sur les marchés financiers ou portent préjudice aux économies émergentes vulnérables et pèsent sur les prévisions. Une nouvelle baisse des prix du pétrole pourrait également avoir un effet négatif sur les pays exportateurs et freiner la demande pour les exportations de l’UE.
Les risques provenant de l’UE même pourraient également avoir une incidence sur la confiance et l’investissement. Parmi ces risques, la Commission mentionne un éventuel échec de l’UE à gérer la gestion de la crise migratoire qui pourrait avoir un impact sur la croissance et la perception par l’opinion publique du nombre croissant de réfugiés qui pourrait infléchir la confiance économique et conduire à une baisse de la consommation des ménages. La Commission européenne met également en exergue les risques de la fin de la libre circulation dans l'espace Schengen, remise en cause par la crise migratoire. "Une suspension plus généralisée et des mesures mettant à mal les réalisations du marché intérieur pourraient avoir potentiellement un impact perturbateur sur la croissance économique", prévient-elle. Elle évoque aussi parmi les risques majeurs un retour de la crise économique en Grèce.
À l'inverse, la combinaison actuelle de facteurs favorables comme des prix bas pour les marchandises, un bas coût de financement et la dévaluation de l’euro, pourrait se traduire par une dynamique plus forte que prévu, en particulier si l'investissement devait redémarrer.
En résumé, la croissance du Luxembourg aura été de 4,7 % en 2015, la troisième plus forte de l’UE après l’Irlande et Malte, et très largement supérieure à celle de ses voisins et à la moyenne dans l’UE ou la zone euro. Cette croissance est avant tout due au bond en avant des exportations nettes de services. D’autre part, malgré une hausse des taux de TVA, l’inflation est restée très basse. La croissance de l’emploi restera solide mais le chômage ne devrait baisser que de façon marginale. Les finances publiques continueront à rester saines.
En 2016, la croissance du PIB sera de 3,8 %, toujours sous la poussée de l’exportation des services financiers et non-financiers, dont la contribution aux exportations nettes diminuera toutefois vu notamment les turbulences sur les marchés financiers. Ce sera la demande intérieure qui sera un fort facteur de croissance. La consommation des ménages augmentera sous le coup de plusieurs facteurs : les carburants à bon marché, des conditions de financement favorables, des perspectives positives en termes d’emploi et une hausse des salaires due à l’indexation des salaires au cours de la seconde partie de l’année. Les bonnes conditions de crédits devraient stimuler l’investissement, notamment dans le domaine de la construction, tant du côté des particuliers qui investissent dans le logement qu’à cause des plans d’investissements publics, notamment dans de grandes infrastructures. L’investissement dans les équipements restera par contre médiocre, vu le bas niveau de l’utilisation des capacités à disposition.
En 2017, une année pour la laquelle la Commission prévoit une croissance du PIB de l’ordre de 4,4 %, la plus forte de l’UE et de la zone euro, la contribution des exportations nettes à la croissance sera de nouveau plus prononcée, alors que la consommation des ménages le sera moins. Cela à cause d’un marché du travail qui croîtra moins vite (2,5 % au lieu de 2,7 %) et d’un chômage qui stagnera à 6 %, dans la mesure où ce seront d’abord les non-résidents qui bénéficieront de la création d’emplois.
Pendant cette période, le secteur financier sera le moteur de la croissance du Luxembourg, de sorte que celle-ci dépendra largement de la manière dont ce secteur abordera les défis auxquels il fait face.
L’inflation qui a été de 0,1 % seulement en 2015 et ne dépasserait pas les 0,4 % en 2016, ne redémarrerait pas avant 2017 avec 2,4 %, "reflétant alors mieux l’impact de la hausse des taux de la TVA du début de 2015".
La Commission constate du côté des rentrées de l’Etat, que la baisse des revenus de la TVA provenant de l’e-commerce qui a été de l’ordre de 1,25 % du PIB n’a été que partiellement compensée par l’augmentation des revenus provenant de l’impôt sur les revenus et du taux de la TVA. Néanmoins, les revenus de la taxe d’abonnement provenant des OPC ont été plus élevés que prévu.
Du côté des dépenses budgétaires, l’effet de la non-indexation des dépenses sociales a été selon la Commission annulé par la hausse de l’investissement public et les frais de consommation intermédiaire qui y sont liés. Les frais induits par la Présidence du Conseil de l’UE et l’application de l’accord salarial dans la fonction publique ont aussi conduit à une hausse de la dépense publique.
L’excédent budgétaire est passé par conséquent de 1,4 % en 2014 à 0,2 % du PIB en 2015. Vu les mesures d’économie budgétaire qui seront progressivement mises en œuvre, la situation devrait s’améliorer en 2016 et 2017, cet excédent passant pour ces années à 0,5 % et ce malgré le fait que les revenus provenant de la TVA sur l’e-commerce continueront de baisser, pour finir à 15 % de la TVA payées sur ces opérations en 2017.
La Commission n’a pas pu tenir compte pour 2017 des effets de la réforme fiscale qui est prévue pour cette année, dans la mesure où les éléments de celle-ci ne sont pas encore connus.
L’excédent budgétaire structurel, de 0,8 % en 2015, passera à 0,9 % en 2016 mais diminuera à 0,4 % en 2017, mais la dette publique, qui a été de 23 % en 2014, oscillera entre 21,3 % en 2015, 22,7 % en 2016 et 22 % en 2017, se classant parmi les deux ou trois dettes publiques les moins élevées de l’UE.
Les prévisions de la Commission prennent en compte tous les facteurs et données disponibles et pertinents, y compris les hypothèses relatives aux politiques, jusqu’au 22 janvier 2016. Seules les politiques annoncées de façon crédible et définies de manière suffisamment détaillée sont intégrées et les projections reposent sur l’hypothèse de politiques inchangées. Les prévisions d’hiver se fondent également sur un ensemble d’hypothèses externes concernant les taux de change, les taux d’intérêt et les prix des produits de base. Les chiffres utilisés correspondent aux attentes des marchés des produits dérivés à la date des prévisions.
La Commission doit mettre à jour ses prévisions économiques en mai 2016.