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Traités et Affaires institutionnelles
"Nous ne pouvons pas accepter que la solidarité disparaisse dans l’Union européenne", déclare Jean Asselborn dans un entretien diffusé par la chaîne allemande ARD
07-05-2016


Jean Asselborn interviewé par Rolf-Dieter Krause sur la chaîne allemande ARD le 7 mai 2016. Source : www.tagesschau.deA l’occasion d’un reportage réalisé à Schengen et diffusé sur la chaîne allemande ARD le 7 mai 2016, le journaliste Rolf-Dieter Krause s’est entretenu avec le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, de l’état de l’espace Schengen, et, plus largement, de l’Union européenne.

Sur le parvis du Musée de Schengen, où sont hissés tous les drapeaux des Etats membres de l’espace Schengen, le journaliste fait remarquer au ministre qu’il serait peut-être plus honnête d’enlever de ce monument les drapeaux des pays qui sont en train de dresser à nouveau des frontières. "Vous avez tout à fait raison sur le principe", lui répond Jean Asselborn qui estime qu’il y au sein de l’espace Schengen "certains pays dont les drapeaux pourraient ou devraient presqu’être mis en berne, car ils ont des problèmes à être à la hauteur des valeurs de l’Union européenne".

La discussion se poursuit sur les arguments donnés par certains hommes politiques européens pour ne pas respecter les décisions prises, ce qui, fait remarquer le journaliste, est devenu une habitude. Jean Asselborn se dit très touché par le fait que des pays de l’Union européenne puissent arguer qu’ils n’ont "pas pour tradition d’accueillir des migrants". "En Europe, nous n’avons pas non plus pour tradition que les riches aident les pauvres, de créer des fonds de cohésion, de créer des fonds structurels", remarque-t-il.

Rolf-Dieter Krause évoque ensuite les récents référendums sur les questions européennes,  qui sont devenus, remarque-t-il, autant d’occasions de conspuer l’Europe. Le chef de la diplomatie luxembourgeoise explique dans la foulée que "si, dans une communauté de 28 pays, on permet à chacun d’opérer sur les questions européennes par la voie référendaire  - je ne parle pas là des questions nationales, là chacun fait ce qu’il veut -, alors, l’Europe va mourir". Il prend l’exemple du Premier ministre hongrois, Viktor Orbán, qui dit qu’aucun migrant ne doit venir en Hongrie et veut organiser un référendum à ce sujet, qu’il risque de gagner. "Si la Hongrie fait cela, peut-être que d’autres le feront aussi, et nous pourrons alors jeter à la poubelle la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne", met en garde Jean Asselborn.

Lorsque le journaliste lui demande, à la lumière de la politique des dix dernières années, comment l’Europe va évoluer si les choses continuent de la sorte, Jean Asselborn voit là, indépendamment du référendum britannique, "la question cruciale". "Je crois que certains pays vont se mettre ensemble pour former un noyau dur européen", tandis que "ceux qui ne veulent pas aller à la même vitesse vont devoir prendre une autre importance dans les processus de décision", augure le ministre. "Nous ne pouvons pas accepter que la solidarité disparaisse dans l’Union européenne", déclare le ministre qui estime que chaque pays doit donc répondre à cette question par oui ou par non.

Rolf-Dieter Krause demande alors s’il pourrait être nécessaire, dans certaines circonstances, que l’Europe se sépare d’Etats qui en sont membres aujourd’hui. "Soit l’Europe  se traîne à l’avenir dans une certaine léthargie ou indifférence, soit une nouvelle dynamique émerge et chaque pays devra alors faire son choix", énonce Jean Asselborn. "Et si un pays dit ne pas avoir besoin de Schengen, ne pas avoir besoin d’euro, ne pas avoir besoin de libre circulation, ne pas avoir besoin de solidarité, ne pas avoir besoin de fonds structurels et de fonds de cohésion, on arrive à un point, et c’est ce que nous avons en Europe, où les pays pourraient être, disons, des établissements rattachés", conclut le ministre.