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Traités et Affaires institutionnelles
Brexit – Charles Goerens propose de créer une "citoyenneté européenne associée individuelle", idée que rejette Viviane Reding
21-11-2016


L’eurodéputé luxembourgeois Charles Goerens (ADLE) a déposé un amendement au rapport du Parlement sur l’évolution de la structure institutionnelle de l'Union européenne, dans lequel il appelle à la création d'une citoyenneté européenne associée pour ceux qui se sentent européens et souhaitent faire partie du projet européen, mais sont ressortissants d'un ancien État membre.  

brexitUne idée proposée dans la perspective du Brexit, ainsi que l’explique le parlementaire. Charles Goerens part en effet du constat que "48 % des électeurs britanniques voulaient rester citoyens européens avec tous les avantages que cela apporte". De son point de vue, "l'UE devrait faciliter la citoyenneté européenne associée volontaire pour ceux qui, contre leur gré, sont dépouillés de leur identité européenne". "La citoyenneté européenne associée individuelle pourrait apporter une solution pratique aux citoyens britanniques lésés par le Brexit ", suggère le parlementaire.

Selon l’idée défendue par Charles Goerens, cette affiliation associée devrait octroyer les droits tels que la liberté de circulation et le droit de résider dans les États membres de l'UE. Conformément au principe réciproque "pas d’imposition sans représentation", ces citoyens associés devraient payer directement une cotisation annuelle dans le budget de l'UE, propose encore le député libéral. En contrepartie, les citoyens associés de l'UE pourraient voter aux élections européennes sur les listes européennes transnationales, imagine Charles Goerens.

Un amendement qui impliquerait une modification des traités

En pratique, cette proposition nécessiterait une modification des traités. En l’état, les traités précisent en effet que la citoyenneté européenne découle directement de la citoyenneté nationale de ses États membres.  

L’amendement déposé par Charles Goerens (sous le numéro 882) porte sur un rapport d’initiative intitulé "Evolutions et adaptations possibles de la structure institutionnelle actuelle de l’UE". C’est l’eurodéputé Guy Verhofstadt, chef de file des libéraux, qui en est le rapporteur.

Ce projet de rapport préconise notamment soit "proposé, en lieu et place de ces multiples dérogations, un type de "statut d'association" aux États périphériques qui ne souhaitent participer que partiellement, c'est-à-dire seulement à certaines politiques spécifiques de l'Union", en précisant que "ce statut devrait s'accompagner d'obligations correspondant aux droits associés". Ce statut est présenté comme "une des solutions possibles pour respecter la volonté de la majorité des citoyens du Royaume-Uni de quitter l'Union européenne".

Ce rapport et les amendements soumis devait être discuté en commission des Affaires constitutionnelles (AFCO) le 21 novembre 2016 et devrait faire l’objet d’un vote en commission le 8 décembre.

Viviane Reding rejette une idée qu'elle juge "clairement malavisée et même dangereuse"

Si la proposition de Charles Goerens a suscité un intérêt certain depuis le dépôt de cet amendement, et ce notamment dans la presse britannique, elle a aussi provoqué l’ire de l’eurodéputée luxembourgeoise Viviane Reding (PPE) qui a même adressé une lettre à la présidente de la commission AFCO, Danuta Hübner, son ancienne collègue au sein de la Commission Barroso I, pour faire part de son inquiétude quant à l’amendement proposé par Charles Goerens. Elle y appelle les membres de la commission AFCO à rejeter cet amendement.

Selon Viviane Reding, "l’approche suggérée par Charles Goerens est clairement malavisée et même dangereuse" puisque elle risquerait de saper non seulement la citoyenneté européenne, qui ajoute des droits et des obligations à la citoyenneté nationale, mais aussi la crédibilité de l’Union européenne. Viviane Reding juge par ailleurs "scandaleuse" l’idée de conditionner cette citoyenneté associée à une cotisation : cela reviendrait selon elle à "solder la citoyenneté européenne".

"L’UE et le Royaume-Uni vont devoir travailler à une nouvelle relation basée sur les négociations qui vont suivre l’activation de l’article 50", ajoute Viviane Reding qui souligne que ces négociations vont devoir être "guidées par l’indivisibilité de nos libertés fondamentales et par le principe de la réciprocité". Or, à ses yeux, l’approche suggérée par Charles Goerens ne satisfait aucun de ces deux critères  et ouvre la voie à un "picorage (cherry-picking) encore plus débridé", une pratique qui nuit déjà à l’unité de l’UE et à sa capacité d’agir.