Les chefs d’Etat et de gouvernement des 27 se sont réunis le 29 avril 2017 pour un Conseil européen extraordinaire consacré au Brexit. Cette réunion présidée par le président du Conseil européen, Donald Tusk, est intervenue un mois jour pour jour après la notification formelle par le Royaume-Uni de son intention de quitter l’Union européenne. Il s’est agi pour les 27 d’adopter les orientations qui vont les guider dans les négociations : ces dernières, adoptées à l’unanimité après quelques minutes seulement, définissent le cadre des négociations et établissent les positions et les principes généraux qui seront ceux de l’UE dans ces négociations. "Je tiens à souligner la remarquable unité de l'ensemble des 27 dirigeants concernant les orientations destinées à nos négociations avec le Royaume-Uni", s’est félicité Donald Tusk à l’issue de la réunion en saluant le fait que l’UE dispose désormais d’un "mandat politique fort pour ces négociations."
Les chefs d’Etat et de gouvernement des 27 se sont entendus pour assurer que "l'UE à 27 restera unie et agira comme un seul bloc au cours des négociations". Xavier Bettel, qui représentait le Luxembourg au cours de ce sommet, a insisté devant la presse sur le fait que toutes les discussions concernant le Brexit se ferait à 27, et qu’il n’y aurait en aucun cas de discussion sur cette question incluant le Royaume-Uni. Le "principe de coopération loyale" fait d’ailleurs l’objet d’un chapitre à part entière : s’il est réaffirmé que le Royaume-Uni demeure un Etat membre à part entière de l’UE jusqu’à qu’il quitte l’Union, il est aussi clairement énoncé que "les 27 Etats membres ont besoin de se réunir et de discuter de questions relatives à la situation qui prévaudra après son retrait". Aussi, les négociations avec le Royaume-Uni seront-elles "tenues séparées des activités de l’Union qui sont en cours".
Parmi les principes qu’ils ont retenus, les chefs d’Etat et de gouvernement ont réaffirmé leur souhait de "voir le Royaume-Uni être un partenaire proche". Ils rappellent aussi que "tout accord futur devra reposer sur un équilibre entre droits et obligations et assurer des conditions équitables" et insistent sur le fait que "l'intégrité du marché unique doit être préservée, ce qui signifie que les quatre libertés sont indissociables et exclut tout "choix à la carte"". Ils soulignent une fois de plus le fait "qu'un pays non membre ne peut avoir les mêmes droits et bénéficier des mêmes avantages qu'un État membre", un mot d’ordre qui a été maintes fois répétés par les responsables luxembourgeois au cours des derniers mois.
Les chefs d’Etat et de gouvernement se sont entendus sur "une approche par étapes".
Il s’agit dans un premier temps "d’épurer le passé", ainsi que l’a résumé Xavier Bettel à l’issue de la réunion. En veillant à offrir autant de clarté et de sécurité juridique que possible, l’UE veut organiser "un retrait ordonné".
Il s’agit donc en premier lieu de clarifier rapidement la question des droits des citoyens affectés par le Brexit. Les orientations évoquent à ce sujet "la conclusion d'un accord sur des garanties réciproques en vue de préserver le statut et les droits tirés du droit de l'UE dont bénéficient, à la date du retrait, les citoyens de l'UE et du Royaume-Uni affectés par le retrait du Royaume-Uni de l'Union, ainsi que leurs familles". "Ces garanties doivent être effectives, opposables, non discriminatoires et globales, et inclure le droit d'acquérir un droit de séjour permanent après cinq ans de séjour régulier ininterrompu", annonce d’ores et déjà l’UE dans ses orientations.
L’enjeu est aussi d’éviter que tout vide juridique pour les entreprises, et de veiller à ce que le Royaume-Uni respecte les engagements qu’il a pris en matière budgétaire.
Des priorités qui découlent en toute logique de l’objectif que s’est fixé l’UE dans ces négociations, à savoir "préserver ses intérêts ainsi que ceux de ses citoyens, de ses entreprises et de ses États membres".
La situation de l’Irlande du Nord doit elle aussi être clarifiée, les chefs d’Etat et de gouvernement ayant mis en avant la nécessité de "trouver des solutions souples et imaginatives, notamment pour éviter la mise en place d'une frontière physique, tout en respectant l'intégrité de l'ordre juridique de l'Union."
C’est ensuite sur la base des progrès réalisés dans les négociations sur ces questions que les chefs d’Etat et de gouvernement décideront de passer à l’étape suivante des négociations, qui portera, toujours selon Xavier Bettel, sur "l’avenir des relations entre l’UE et le Royaume-Uni". Il faudra que les progrès soient "suffisants", indique le texte des orientations, tandis que Xavier Bettel et Donald Tusk ont tous deux évoqué des "garanties suffisantes" sur les questions qu’ils ont désignées comme prioritaires, et ce sera au Conseil européen d’en juger et de décider d’engager des discussions préliminaires et préparatoires quant au cadre de ces relations futures. Un accord sur ces relations futures ne pourra toutefois être conclu qu’une fois que le Royaume-Uni sera sorti de l’UE.
Pour la suite, les directives de négociation qui constitueront le mandat détaillé du négociateur de l’UE, Michel Barnier, seront présentées par la Commission européenne dès le 3 mai 2017 en vue d’une adoption formelle lors du Conseil Affaires générales du 22 mai prochain. Et les négociations pourront ainsi débuter très rapidement à l’issue des élections législatives britanniques convoquées en juin 2017. Quant au délai de deux ans visé à l'article 50, il prendra fin le 29 mars 2019, rappellent les orientations adoptées par les chefs d’Etat et de gouvernement.
Face à une si forte unanimité des chefs d’Etat et de gouvernement, la presse s’est beaucoup intéressée à la question du siège des deux agences actuellement sises à Londres, qui, si elle n’était pas directement à l’ordre du jour du Conseil européen, a toutefois fait l’objet de quelques éclaircissements en termes de calendrier. Il est ainsi prévu d’établir la procédure selon laquelle les futurs sièges de l’Agence européenne du médicament (EMA) et de l’Autorité bancaire européenne (EBA) seront choisis, et les critères qui permettront de faire ce choix, pour le mois de juin, a expliqué Xavier Bettel qui reste convaincu que le choix du Luxembourg pour accueillir l’ABE serait "logique et naturel".