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Agriculture, Viticulture et Développement rural
Texte intégral de l'intervention du ministre de l'Agriculture Fernand Boden sur la réforme du secteur viti-vinicole au Conseil des Ministres européens de l’Agriculture du 16 juillet 2007 à Bruxelles
16-07-2007


Je voudrais commencer par remercier la Commission et Mariann pour nous avoir présenté en détail la proposition sur la réforme du secteur viticole, et je tiens à souligner que le Luxembourg a toujours soutenu et continue à soutenir les efforts de la Commission visant à réformer en profondeur le marché viticole de l’Union Européenne et à l’adapter aux exigences de la concurrence mondiale croissante, par l’intermédiaire d’une amélioration de sa compétitivité et de sa durabilité.

Nous sommes cependant obligés de constater et de déplorer que seulement un nombre très limité des remarques et suggestions faites à la Commission lors de la phase de consultation a été repris et intégré dans la proposition finale.

Il s’ensuit que malheureusement cette proposition législative contient des dispositions qui sont inacceptables pour notre secteur viticole, puisque certaines touchent à des intérêts vitaux et sont susceptibles de mettre en danger l’existence même de ce secteur dans notre pays.

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En effet la Commission projette d’interdire l’enrichissement par le saccharose. L’ajout du sucre au moût, ou chaptalisation, est une pratique œnologique reconnue et traditionnelle, et qui existe en Europe depuis plus d’un siècle.

Or cette interdiction n’est à notre avis nullement justifiée et doit donc être rejetée. En effet nous constatons que l’argumentation de la Commission manque en général de consistance et de cohérence.

En premier lieu la relation supposée entre chaptalisation et surproduction n’est pas du tout pertinente, puisque dans les régions viticoles qui pratiquent l’enrichissement par le sucre, il n’y a justement pas de surproduction de vin. Dans notre pays toutes les quantités de vin produites trouvent un débouché commercial normal.

Par ailleurs il faut relever que la Commission affiche comme objectif primordial d’augmenter la compétitivité de la viticulture européenne, mais veut interdire d’un autre côté la chaptalisation, tout en reconnaissant que cette interdiction entraînera une augmentation des coûts de production, notamment pour les petites exploitations familiales qui constituent l’épine dorsale de notre viticulture.

Cette proposition de la Commission est donc parfaitement contradictoire avec ses objectifs affichés, d’autant plus que les accords bilatéraux conclus avec d’autres pays producteurs de vin, permettent à ces derniers d’importer en Europe leurs vins chaptalisés.

En outre la Commission propose de réduire le taux maximal autorisé d’enrichissement pour la zone A de 1,5 % par rapport à la situation actuelle, alors que pour les zones B et C cette réduction est moindre.

Comme aucune justification pertinente n’est avancée pour ce traitement inéquitable entre producteurs européens, cette proposition n’est pas non plus acceptable pour nous. Elle risquerait en effet de mettre en cause la survie de certains de nos cépages traditionnels.

Il faut conclure sur ce sujet, que l’interdiction de la chaptalisation et la limitation de l’enrichissement constitueraient une mise en danger d’une partie de la viticulture européenne, et ceci sans aucune nécessité. Il s’agit alors à notre avis d’un non respect du principe de proportionnalité.

Par conséquent le Luxembourg demande que le statu quo en matière d’enrichissement du règlement n° 1493/1999 soit maintenu.

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Concernant maintenant l’enveloppe nationale, nous pouvons en soutenir le principe, mais nous estimons que le menu des mesures proposées est trop limitatif, et devrait être adapté aux besoins spécifiques des régions viticoles. Par ailleurs la méthode de répartition du budget entre Etats membres repose pour une part trop importante sur les références historiques.

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Nous sommes par contre opposés au transfert de fonds budgétaires au développement rural. En effet il ne sera guère possible de réserver ces fonds au secteur viticole et en outre ce transfert va engendrer des charges administratives non négligeables, surtout au regard de la modestie des montants budgétaires prévus.

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Le Luxembourg est également réticent face à une libéralisation non maîtrisée des plantations, qui risquerait de provoquer l’abandon des vignobles en pente et en terrasses, qui constituent cependant les meilleurs sites pour la production de vins de qualité et qui font le charme de nos paysages viticoles.

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En définitive, nous sommes d’avis que, contrairement aux objectifs affichés, certaines propositions concrètes de cette réforme vont entraîner non pas une augmentation, mais plutôt une détérioration de la compétitivité de la viticulture européenne.

Vous comprendrez donc, monsieur le président, qu’en l’état actuel notre appréciation globale de cette proposition est négative.

Il faudra donc retravailler cette proposition, afin qu’elle tienne mieux compte des remarques et suggestions que nous venons de formuler.

En conséquence nous vous demandons d’organiser une discussion approfondie sur la justification et la pertinence de certains éléments essentiels de cette proposition, avant de poursuivre le travail d’analyse détaillée de ce texte.