"Est-ce que le Non Irlandais est une autre preuve qui illustre que le fossé entre une petite élite politique et les citoyens est en train de se creuser ?", s’interroge Nicolas Schmit dans son article.
Selon le ministre, il semble que l’Europe est un thème qui enthousiasme de moins en moins les citoyens. Pourquoi? "C’est parce que l’Europe est trop souvent mis en relation directe avec l’angoisse du futur des citoyens…". Dans un contexte où la globalisation est perçue comme une menace et où les citoyens se sentent de moins en moins en sécurité, il estime "que l’Europe n’est plus perçue comme une réponse à ce processus, mais plutôt comme faisant partie intégrante de la globalisation". Il estime également que les plus démunis ne se sentent pas assez protégés par l’Europe et que même des secteurs importants des classes moyennes ne voient plus l’Europe comme le meilleur moyen pour garantir le modèle social européen.
Pour Nicolas Schmit, le vote irlandais était avant tout un vote protestataire dont le but "était de donner des leçons à la classe politique". Il poursuit son analyse en soulignant que "ce n’est pas le processus d’intégration européenne en tant que tel qui a été mis en question, mais la façon dont l’UE a été gérée et présentée par les responsables politiques". Nicolas Schmit juge que "ces éléments devraient donner à réfléchir".
Nicolas Schmit relève un hiatus entre l’aspect démocratique des décisions européennes et la manière dont celles-ci sont perçues par les citoyens européens. Selon lui, le traité de Lisbonne apporte des améliorations capables de réduire ce hiatus. Des procédures simplifiées, l’extension de la codécision avec le Parlement européen qui est directement élu et l’augmentation de la transparence sont pour le ministre autant d’éléments qui font "que les gouvernements auront moins d’opportunités de se cacher derrière l’UE". A cela s’ajoute pour Nicolas Schmit le droit d’initiative populaire qui accorde une influence directe aux citoyens sur les politiques et l’extension du pouvoir des parlements nationaux.
S’il est vrai que ces éléments "apportent plus de démocratie", ils n’ont pas selon Schmit "contribué à diminuer le scepticisme des citoyens". Il rappelle dans ce contexte que bien que tous les partis politiques luxembourgeois, à l’exception de l’ADR, aient milité en faveur du projet de traité constitutionnel en 2005, 44 % des citoyens luxembourgeois avaient pourtant rejeté le texte.
Nicolas Schmit a relevé le caractère paradoxal de la campagne référendaire en Irlande. Un pays où le camp du "Non" fut mené par le magnat de la presse Robert Murdoch et Declan Ganley, lequel s’est, Schmit le souligne, surtout enrichi en Irak, dans les Balkans et en Europe de l’Est. L’introduction obligatoire de l’avortement, l’abandon de la neutralité irlandaise, l’introduction de la peine de mort ou la destruction de l’agriculture irlandaise sont autant de thèmes qui ont été instrumentalisés par le camp du "Non" et qui illustrent selon Nicolas Schmit que la campagne référendaire "a surtout été basée sur des mensonges". Ces éléments l’amènent à dire que "tous les mensonges étaient bons pour déstabiliser les gens".
Dans son analyse du rejet irlandais, Nicolas Schmit s’intéresse plus particulièrement au personnage Declan Ganley. Nicolas Schmit relève dans ce contexte, qu’il s’agit "d’un proche des cercles néoconservateurs aux Etats-Unis qui a également servi les Américains en Irak". Il n’est donc pas étonnant pour Schmit "que la propre fondation de Declan Ganley Libertas se mobilise contre l’Europe". Car aux Etats-Unis, et notamment dans les cercles néoconservateurs, il existe selon Schmit "assez d’opposants à une Europe forte et sûre d’elle-même qui soit capable de peser sur la scène international".
De cette campagne référendaire, Schmit tire l’enseignement suivant : "Il est temps de mettre un terme à ces tendances populistes et dangereuses en Europe". Pour tous ceux qui croient à une Europe forte qui agit au nom de ses peuples, il appartient selon Schmit "d’agir en sorte que l’Europe puisse être mieux comprise et vraiment vécue". Pour Schmit, "le projet européen appartient aux citoyens" et les citoyens "ont raison de revendiquer plus de démocratie et de demander des comptes. Ils ont raison de ressentir l’absence d’une dimension sociale qui corresponde à cette aspiration". Pour Schmit, c’est la raison pour laquelle les messages politiques qui sont envoyés par le Conseil qui a adopté une directive comme celle sur le "temps de travail" qui augmenté le temps de travail hebdomadaire en Europe jusqu’à 65 heures et par l’arrêt de la CJCE à l’encontre du Luxembourg au sujet de la transposition de la directive "détachement" ne peuvent pas être compris par les salariés.