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Agriculture, Viticulture et Développement rural
Manifestations des producteurs de lait au Kirchberg : pour un prix équitable et une régulation moderne et souple du marché
27-10-2008


VéhiculeLe 27 octobre 2008, 180 producteurs de lait en provenance de l’Allemagne, de la Belgique et de la France ont manifesté devant le Conseil européen où les ministres de l’Agriculture étaient réunis en Conseil pour se pencher sur le "Health check" de la Commission européenne. Dès 13 heures de l’après- midi, les agriculteurs, juchés sur leurs tracteurs, ont envahi les quartiers du Kirchberg et ont défilé devant les bâtiments de la foire. Ils étaient partis tôt ce matin et sont venus de toutes les directions du pays pour brandir des slogans "en faveur d’une politique responsable pour le marché européen du lait". Leur revendication principale était d’obtenir un prix convenable pour les produits laitiers qui permettrait aux agriculteurs de couvrir leurs frais de production.

Une manifestation placée sous le signe de la solidarité

Lors de la conférence de presse, Romuald Schaber, président du European Milk Board (EMB), association qui représente les intérêts des producteurs laitiers de 14 pays européens, a d’emblée souligné qu’"il existe un consensus entre les agriculteurs sur la manière dont l’agriculture devrait être organisée en Europe."

La position du European Milk Board

Guy DiederichAfin d’atteindre cet objectif, Romuald Schaber a prôné l’introduction d’une régulation moderne et souple du marché du lait. Avec cette position, le European Milk Board s’est distancié de la position des associations paysannes en Europe qui "défendent surtout une politique dans l’intérêt des grandes entreprises et non pas des agriculteurs concernés".

Le European Milk Board a rejeté la proposition de la Commission européenne d’augmenter les quotas laitiers de 1 % par an de 2009 à 2013 afin de répondre à la forte hausse de la demande de produits laitiers dans l'Union européenne ainsi que sur les marchés mondiaux. Cette méthode ne tient, selon Romuald Schaber, "absolument pas compte des réalités sur le marchés" et aggravera encore plus la situation sur les marchés en créant des excédents de lait. Un prix qui couvre les frais de production devra selon l’EMB être le critère déterminant pour décider l’augmentation ou la réduction de la production laitière.

Les producteurs laitiers se sont prononcés pour une flexibilité accrue dans la fixation des quotas laitiers et en faveur d’une régulation de l’offre qui s’oriente sur les besoins des marchés et qui propose "uniquement une augmentation des quotas si le marché est capable d’absorber l’excédent de lait".

Malgré cela, une régulation efficace du marché européen du lait sera selon l’EMB encore nécessaire à l’avenir pour équilibrer l’offre et la demande. Pour cela, l’EMB revendique le maintien des quotas laitiers après 2015. Car si le marché n’est encadré d’aucune règle juridique, alors le risque est réel que les grandes multinationales vont s’approprier l’organisation du marché du lait. Si l’on va vers une libéralisation complète du marché du lait, la conséquence sera que l’agriculteur sera de moins en moins impliqué dans les décisions au niveau européen et la fixation d’un prix juste.

Selon l’EMB, les producteurs laitiers doivent devenir des acteurs actifs du marché et assumer leurs responsabilités sur les marchés laitiers. Dans l’analyse du EMB, il appartiendra à l’Etat d’encadrer juridiquement l’action des producteurs laitiers qui pourront prendre en main eux-mêmes les instruments.

Finalement, l’EMB s’est exprimé pour une projection extérieure suffisante. Schaber a également estimé que la création d’un fonds du lait n’est pas une alternative car "il ne peut compenser les pertes en revenu causées par la suppression prévue des quotas ".

Les manifestations de mai étaient un succès

Pour Guy Diderich, le représentant du Luxembourg Dairy Board (LDB), la manifestation doit surtout servir pour" donner un signal aux responsables politiques et leur dire que nous ne sommes pas d’accord avec les propositions de la Commission". "Nous avons besoin de quotas flexibles. Sinon, nous ne pourrons pas réduire la distorsion entre l’offre et la demande", a martelé Guy Diderich, pour qui les producteurs laitiers sont "les premières victimes des politiques européennes".

Un premier pas a cependant déjà été franchi en mai 2008 avec le boycott laitier. "Les manifestations en juillet étaient un succès, parce que les prix des produits laitiers sont restés stables au cours des derniers mois", a souligné Guy Diderich, en ajoutant : "Mais les pronostics pour les mois à venir sont plus mauvais, parce qu’il y a encore trop de lait sur le marché".

La Suisse, un exemple comment la libéralisation du marché nuit aux producteurs

Des représentants des producteurs d’Allemagne, d’Autriche, des Pays-Bas, de France et du Danemark ont ensuite décrit la situation des producteurs laitiers dans leur pays. Partout, les agriculteurs sont confrontés au même problème : les prix diminuent, parce qu’il y a trop de lait sur le marché.

Erwin Schöpges par exemple, représentant des producteurs belges, a estimé que nombre de producteurs belges ne pourraient pas garder leurs fermes si la libéralisation du marché devenait réalité. Un autre représentant d’une association suisse s’est penché sur la situation dans son pays, où l’abolition des quotas aura lieu en 2009.

La Suisse se trouve actuellement dans une période de transition. "C’est le chaos", a témoigné Martin Haab, "beaucoup de petits fermiers peinent à s’adapter". 80 % des producteurs laitiers suisses revendiquent aujourd’hui la négociation d’une solution nationale basée sur une proposition élaborée par les producteurs eux-mêmes.

Fernand Boden : préparer les agriculteurs le mieux à la suppression des quotas

Le ministre luxembourgeois de l’Agriculture Fernand Boden s’est réjoui de voir les agriculteurs européens s’engager ensemble pour leurs propositions. Le ministre a soutenu la revendication des producteurs laitiers pour obtenir un prix équitable pour leurs produits laitiers. "Il leur faut un prix qui permette de couvrir les frais de production mais aussi de vivre de la production", a souligné le ministre. Par contre, en matière de suppression des quotas laitiers, Fernand Boden a rappelé que la décision dépendait de la Commission européenne. "La Commission n’a pas prévu de changer sa proposition", a-t-il souligné. Aux yeux du ministre, les responsables politiques devront surtout s’engager pour préparer les producteurs de la meilleure manière à la période de l’après 2015. Une des mesures privilégiées par Fernand Boden est par exemple la suppression progressive des pénalités pour les surproductions.