Jean Asselborn, le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, a reçu le 17 décembre 2008 son homologue serbe, Vuk Jeremic. Lors d’une conférence de presse, il a exprimé que la Serbie puisse bientôt être une part intégrante du projet de paix qu’est pour lui l’Union européenne et qui a pour objectif la stabilité dans toutes les régions qui font partie de l’Europe géographique. "Il ne suffit pas seulement d’ouvrir nos portes", a ajouté Asselborn, "mais aussi nos cœurs." Une façon de dire qu’il est important de rester à l’écoute des préoccupations et des sensibilités de la population serbe.
Le Luxembourg n’a jamais fait un grand mystère de son soutien à l’Accord de stabilisation et d’association (ASA) signé le 29 avril 2008 en marge d’un Conseil à Luxembourg. Mais ses partenaires du Benelux, la Belgique et les Pays-Bas, ne penchent pas encore dans cette direction et pensent que la Serbie pourrait faire encore plus d’efforts en ce qui concerne sa collaboration avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) qui siège à La Haye. Pour Asselborn par contre, "l’histoire nous dit de saisir l’occasion que représente la dynamique du moment". D’où les efforts que le ministre luxembourgeois déploie dans ses contacts avec ses homologues belges et néerlandais pour les convaincre de ne pas rater l’occasion qui se présente en ce moment avec la Serbie.
Le Kosovo reste malgré tout un point difficile pour Jean Asselborn. "Mais la position de la Serbie nous a aidé dans le déploiement de l’EULEX qui se déroule actuellement, et qui va passer de 1 500 à 3 000 juristes et policiers" qui aideront les autorités du Kosovo à construire un Etat de droit.
Vuk Jeremic a, de son côté qualifié l’année 2008 de dramatique pour une Serbie qui "a su montrer qu’une société démocratique peut survivre à des coups très durs". Pour le chef de la diplomatie serbe, son pays est "sur le chemin de l’intégration européenne". 2008 a été pour la Serbie à la fois celle de la signature de l’ASA, des élections et de la proclamation de l’indépendance du Kosovo. "Nous avons travaillé très durement pour la paix et la stabilité et pour le maintien de l’ordre constitutionnel. Je suis fier que le gouvernement serbe se soit engagé à ne régler ses différends avec autrui que par des moyens politiques et diplomatiques et sans recours à la force. C’est la première fois qu’un pays des Balkans occidentaux ait pris un tel engagement. Le dialogue est très important pour la Serbie et les Balkans occidentaux."
D’où l’espoir de Jeremic que l’année 2009 sera celle de l’intégration européenne, que les Etats membres de l’UE trouveront un consensus sur l’ASA et l’accord intérimaire * et que les Serbes seront bientôt traités comme des Européens et puissent librement circuler et voyager dans l’espace Schengen. Selon Vuk Jeremic, 70 % des Serbes n’ont pas encore été dans un pays de l’Union européenne, "et pourtant, ils se sont prononcés majoritairement pour l’intégration européenne, ce qui constitue un véritable acte de foi". Jeremic pense que la Serbie devrait être en mesure dès 2009 à faire acte de candidature pour adhérer à l’Union européenne.
Jeremic déclara ensuite qu’il fallait agir l’un vis-à-vis de l’autre de bonne foi et s’arranger avec les "lignes rouges" à ne pas dépasser des uns et des autres. La Constitution serbe, ajouta-t-il, oblige par ailleurs le gouvernement serbe à défendre la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays. La politique de Bruxelles devrait respecter cette constitution au risque de compromettre la stabilité et l’intégration des Balkans occidentaux.
Jean Asselborn, lui répondit que l’Union européenne se concentrera sur l’ASA et l’accord intérimaire, sur le déploiement et l’action de l’EULEX et sur l’approfondissement des relations avec la Serbie : "Avec le Kosovo, nous avancerons pas à pas et verrons ce qui est possible et impossible." Une position partagée par Jeremic pour qui "le Luxembourg soutient définitivement une accélération du rapprochement avec l’Europe".
* Cet accord intérimaire prévoit entre l’Union européenne et la Serbie un dialogue politique, un accord sur le libre-échange, une libéralisation du régime des visas, notamment pour les jeunes Serbes qui désirent voyager et étudier en Europe, et une coopération dans le domaine de l’éducation qui doit se traduire par une participation de la Serbie au programme ERASMUS. Ce paquet de mesures reprend une partie des éléments contenus dans l’ASA. Mais à la différence de l’ASA, qui doit être ratifié par le Parlement européen et les 27 parlements nationaux des Etats membres de l’UE, cet accord politique n’a pas besoin de ce type de ratification.