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Santé
Déi Greng se positionnent au sujet de la proposition de directive relative à l’application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers
Claude Turmes et Félix Braz plaident pour un équilibre entre la mobilité des patients et la qualité des soins dans le système de santé national
10-03-2009


En juillet 2008, la Commission européenne a présenté une proposition de directive relative à l’application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers. Ce texte doit être voté le 12 mars 2009 en première lecture par la commission Environnement, santé publique et sécurité alimentaire du Parlement européen et Claude Turmes, eurodéputé luxembourgeois des Gréng, qui est membre suppléant de cette commission, a saisi, avec le député Félix Braz, l’occasion pour faire le point sur le texte et défendre leurs positions. Dans un communiqué daté du 9 mars 2009 et qui a pour titre "Coopération plutôt que concurrence", Claude Turmes et Félix Braz annoncent ainsi leur objectif, qui est de "renforcer les droits des patients et de protéger les systèmes de santé nationaux".

La situation actuelle

Les deux députés luxembourgeois font tout d’abord le point sur la situation actuelle en expliquant que, dans le cadre du Règlement 1408/71, qui encadre actuellement la coordination des systèmes de sécurité sociale, il est possible, dans certaines conditions, d’être soigné à l’étranger en voyant les soins remboursés par sa caisse de maladie nationale. Selon Claude Turmes et Félix Braz "les caisses de maladies luxembourgeoises envoient, sur la base de ce règlement, un nombre relativement important de patients à l’étranger sans qu’ils comptent toujours nécessairement parmi les catégories définies". L’application que le Luxembourg fait de ce texte est donc estimée "plutôt généreuse" par les deux députés des Verts.

La proposition de directive de la Commission

L’objectif de la proposition de directive présentée le 2 juillet 2008 par la Commission européenne est d’améliorer la coopération entre les Etats membres dans le domaine de la santé en éclaircissant un certain nombre de zones d’ombre en matière de reconnaissance d’ordonnance, de possibilité de soins pour les patients atteints de maladies rares, d’accès aux soins spéciaux, et ce en particulier pour les personnes vivant dans des régions frontalières.

La directive a par ailleurs pour objectif de fixer la jurisprudence de la Cour européenne de Justice, et ce notamment en ce qui concerne l’accès aux soins hospitaliers à l’étranger pour tous les groupes de personnes, c’est-à-dire aussi dans des cas qui ne répondent pas aux règles fixées par le règlement 1408/71 en vigueur actuellement. Référence est faite notamment aux arrêts Kohll (C-158/96), Decker (C-120/95), Smitt et Perbooms (C-157/99), ou encore Watts (C-372/04).

Ce nouveau texte doit donc clarifier comment ces droits à la mobilité des patients au sein de l’Union européenne peuvent être appliqués, tout en garantissant à tous les acteurs des systèmes de santé nationaux la sécurité juridique.

La nouvelle directive détermine par exemple les conditions selon lesquelles un patient est remboursé dans son pays d’origine pour un séjour à l’hôpital effectué à l’étranger. Elle fixe aussi les possibilités qu’auront les Etats de limiter ce droit à la mobilité.

Le secteur des soins ambulants n’est pas explicitement pris en compte par cette directive et il est prévu que le règlement 1408/71, qui fixe notamment la liberté de circulation pour certaines catégories de patients, continue d’être appliqué.

La position des Verts

Pour les députés verts, il est avant tout question de veiller à l’équilibre entre la mobilité des patients et le principe d’un accès à des soins de santé de qualité pour tous. Les Verts craignent en effet "une trop grande liberté de circulation va réduire la qualité des systèmes nationaux" et il s’agit donc de trouver, pour eux, une "voie intermédiaire". Ils évoquent d’ailleurs dans leur communiqué la position du gouvernement luxembourgeois au Conseil européen, selon laquelle il faudrait "laisser aux Etats membres une certaine mesure de subsidiarité via un système d’autorisation préalable".

Les Verts insistent donc sur la transparence et la rapidité de l’information dont devraient disposer les patients par l’intermédiaire de points de contact nationaux au sujet de la possibilité et de la hauteur du remboursement des soins hospitaliers effectués à l’étranger. Ces points de contacts, qui seraient à mettre en place en collaboration avec les associations de patients, auraient aussi pour mission d’informer les patients sur les standards de qualité en vigueur, le cadre juridique en cas d’erreur médicale ou encore la continuité des soins après le retour dans le pays d’origine.

La question de l’accès au dossier médical et à son transfert aux autorités médicales du pays d’origine est elle aussi prégnante aux yeux de Claude Turmes et de Félix Braz. Ils tiennent par ailleurs à ce que la directive soit "d’un point de vue juridique clairement séparée" du règlement 1408/71, auquel il ne faut pas toucher selon eux.

Un autre point essentiel aux yeux des Verts, c’est une meilleure coopération entre les Etats membres dans le domaine de la santé car il est à leurs yeux "pertinent de soutenir la spécialisation de certaines régions ou Etats-membres dans des domaines médicaux spécifiques et d’accélérer les échanges entre centres de compétences". Cela leur semble particulièrement important pour le Luxembourg au vu de sa situation au cœur de la Grande Région.

La protection des systèmes de santé nationaux fait l’objet d’une attention toute particulière de la part des députés verts qui, faisant référence aux visions de la Commission – laquelle considère le secteur de la santé comme un "marché d’avenir" - rappellent que la santé est à leurs yeux "un bien commun digne d’être protégé" et que les différents systèmes nationaux "ne doivent pas être victimes d’une logique de marché". Ces derniers doivent donc être protégés "d’une baisse de qualité et des tendances à la privatisation".

Ainsi, pour Claude Turmes et Félix Braz, il importe de ne pas considérer cette directive seulement comme une "directive marché intérieur sur la base de l’article 95 du Traité UE ". Et ils demandent donc à ce que soit fait référence au principe de subsidiarité, afin que les Etats membres continuent, en vertu de l’article 152 du Traité, d’avoir le droit d’organiser leurs systèmes de santé nationaux selon leurs règles. Cela permettrait notamment aux Etats de disposer du "droit d’accorder ou de rejeter, selon des critères clairs, justes et transparents, une autorisation de séjour hospitalier", ce qui serait une garantie de préserver le principe de la politique de santé qui consiste à offrir "des soins médicaux bons et professionnels aussi près que possible".

Enfin, il importe aux yeux des deux députés que soit indiquée clairement dans la directive la nécessité, pour chaque Etat membre, de travailler à un niveau élevé de protection de la santé pour tous les citoyens. Il s’agit pour eux de veiller à ce que les gouvernements n’aient pas "la tentation de s’abstenir d’investir dans des structures de santé modernes en utilisant le prétexte de la mobilité des patients".

Quelles conséquences pour le Luxembourg ?

La coopération transfrontalière devrait être renforcée dans le domaine de la santé. Les députés des Verts suggèrent donc la conclusion d’un traité transfrontalier qui encadrerait la répartition des tâches et le remboursement des soins.

Le gouvernement luxembourgeois devrait introduire un "système d’autorisation préalable juste et transparent" pour les personnes qui ne sont pas concernées par le règlement 1408/71 dans la mesure où le Luxembourg est particulièrement sujet à une forte mobilité des patients.

Les points de contact nationaux devraient être rapidement mis en place par le gouvernement luxembourgeois et ils pourraient, selon les deux députés, être intégrés à la Caisse nationale de Santé et aux hôpitaux luxembourgeois. Il s’agit à leurs yeux de pallier le manque d’information sur les soins de santé transfrontaliers relevé par les enquêtes Eurobaromètre et d’après lesquelles "un tiers des citoyens européens se sentent insuffisamment informés sur les conditions selon lesquelles ils peuvent bénéficier d’un séjour hospitalier à l’étranger".

Enfin, la directive prévoit que chaque pays dispose de taux de remboursement des frais de certains types de soins qui soient calculés de façon transparente et comparable. Et pour les Verts, il s’agit là d’un "défi difficile et indispensable" dont la conséquence serait aussi "un débat sur la qualité médicale". Pour les deux députés, le Luxembourg "n’est que très peu transparent" en matière de coût et de qualité des soins et le Grand-Duché devra donc être selon eux "plus précis et plus comparable dans sa nomenclature des services médicaux et des taux de remboursement des frais médicaux".