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Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
L’Europe, presque absente des débats qui ont suivi le discours sur l’état de la nation, a été évoquée de manière bien sombre
Michel Wolter, Ben Fayot et Gast Gibéryen ont abordé l’Europe sous l’angle des récentes déconvenues du Luxembourg avec ses deux grands voisins
22-04-2009


Mars di Bartolomeo, Jean-Louis Schiltz, Jean-Claude Juncker, Fernand Boden et Luc FriedenA l’image du discours sur l’état de la nation tenu par le Premier ministre la veille, les débats qui se sont tenus à la Chambre des députés le 22 avril 2009 ont été fortement marqués par la crise économique et financière.

Au centre des discussions, les choix à faire en matière de politique budgétaire afin de maintenir l’équilibre entre investissement pour la modernisation du pays et maintien de la cohésion sociale en temps de crise. Ne pas sombrer dans la spirale du surendettement au détriment des générations à venir fut un leitmotiv au cours de la journée et l’Europe a, au bout du compte, brillé par son absence dans les débats, n’apparaissant que ça et là. Et quand il en a été question, les mines étaient bien sombres.

Michel Wolter invite les députés de la Chambre à s’engager pour défendre la cause du Luxembourg en Europe

Michel Wolter, président du groupe parlementaire CSV, a dans un premier temps rebondi sur les louanges adressées la veille par le Premier ministre à Charles Goerens, actuel président du groupe parlementaire DP qui se présente aux élections européennes et renonce de ce fait à être élu à la Chambre des députés pour la prochaine législature. Mais Michel Wolter a tenu à souligner qu’il faut "appréhender avec prudence" le passage éventuel de Charles Goerens, député de l’opposition, à la politique européenne, parce qu’ "on ne peut jamais savoir s’il a Michel Wolterdéfinitivement tourné le dos à la politique nationale".

Revenant sur les grands événements qui ont marqué les cinq dernières années, Michel Wolter a abordé la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’Union européenne de 2005 "très réussie qui a montré que les petits pays ont leur rôle à jouer pour faire avancer le processus d’intégration européenne". Selon le président du groupe parlementaire CSV, le référendum sur la constitution européenne de juin 2005 a frappé les esprits sur le plan politique parce qu’il "a révélé certaines réalités que nous n’avions pas voulu reconnaître auparavant", notamment la façon dont l’Europe est perçue au Luxembourg.

De façon plus générale, "l’intégration européenne n’a pas avancé" au cours de ces cinq dernières années pour Michel Wolter, ce qui n’est pas positif et ce surtout pour les petits pays. Il a ainsi l’impression que "les grands pays profitent de la situation" et "se mettent ensemble pour prendre des décisions sans écouter la voix des petits", chose que selon lui "nous regrettons, mais qui ne doit pas nous décourager".

Michel Wolter est revenu aussi sur le choix du gouvernement de mener une politique de solidarité tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des frontières du Luxembourg. Et cette dernière, qu’il a saluée, est à ses yeux une façon d’intégrer le Luxembourg dans la politique européenne et mondiale. Dans ce cadre, il a également évoqué la réforme de l’armée qui permet, selon lui, au Luxembourg de s’intégrer davantage au niveau européen et mondial.

Le message européen le plus fort du député CSV fut cependant une invitation au prochain gouvernement et à l’ensemble des députés de la Chambre à s’engager pour que le Luxembourg "se vende mieux et soit plus présent en Europe et dans le monde". Il s’agit bien de faire la promotion du Grand-Duché dont l’image s’est, selon lui, "horriblement" ternie en Europe, mais il faut aussi que chacun s’implique pour défendre la cause du Luxembourg au niveau européen, car "à 27, il faut être là en permanence" De là sa proposition de donner au mandat des députés une dimension non seulement locale et nationale, mais aussi européenne.

Ben Fayot se fait du souci pour une Union européenne sans capitaine

Ben Fayot à la Chambre lors des débats du 22 avril 2009La crise tient naturellement une grande place aussi dans les préoccupations de Ben Fayot, président du groupe parlementaire socialiste à la Chambre. Il s’agit là à ses yeux d’un défi que le Luxembourg ne peut relever "sans ses partenaires européens" et la relance doit être selon lui "coordonnée au niveau de l’Union européenne et en particulier de la zone Euro". Dans ce contexte difficile car incertain, "c’est une chance", a déclaré Ben Fayot, "que nous ayons un grand marché intérieur, dans la mesure où protectionnisme et discrimination en restent exclus".

Et pourtant Ben Fayot n’a pas manqué de relever que c’est justement en cette période difficile que le Luxembourg a subi, de la part de deux de ses grands voisins, "des attaques implicites et explicites contre son existence en tant que petit pays indépendant et influent en Europe", et ce au sujet du secret bancaire. Pour le député socialiste, ces attaques de la part de l’Allemagne et de la France ont été nourries de "populisme et de démagogie et furent d’autant plus violentes que la méconnaissance du Luxembourg était grande". Et il n’a donc pas manqué de relever la pertinence de la proposition de son confrère chrétien-social, à savoir qu’il faut améliorer la politique de relations publiques du pays. 

A la lumière des méthodes opaques qui ont caractérisé selon lui le G20, Ben Fayot a souligné que le partenariat européen n’a pas empêché que le Luxembourg, en tant que petit pays, ait été mis sous pression du jour au lendemain. Pour lui "quand le partenariat européen ne fonctionne plus, c’est la porte ouverte à des directoires de grandes puissances". En bref, cette "farce des listes noires, blanches et grises", dans laquelle l’OCDE a selon lui "fait Roger Negri, John Castagnero, Fernand Diederich, Alex Bodry, Ben Fayot et Romain Schneiderle jeu de Nicolas Sarkozy", le Luxembourg n’est pas prêt de l’oublier.

Par ailleurs, les institutions européennes ne sont pour Ben Fayot "pas assez fortes pour garantir discipline et cohésion" dans ce contexte de crise. Le député socialiste explique cette faiblesse par la taille de l’Union européenne ainsi que par la grande diversité de ses membres et de leurs visions de la politique européenne. "L’état de l’Union européenne nous inquiète tous, et ce sont tout particulièrement les petits pays qui doivent se faire du souci à son sujet" a-t-il déclaré avant de conclure que "l’Union européenne est en ce moment sans capitaine, et cela doit cesser, car sinon cette Union risque de sombrer, et nous en subirons les conséquences".

Pour Gast Gibéryen, le gouvernement a été trop passif dans le dossier des paradis fiscaux

Gast GibéryenAbordant la crise financière, Gast Gibéryen, député de l’ADR, a jugé nécessaire une restructuration des relations internationales. Il estime que l’Union européenne a été "absente" dans ce contexte, ce qui aurait particulièrement arrangé les grands pays. Selon lui, il faut le même poids pour tous les partenaires dans l’Union européenne, qu’ils soient grands ou petits. La réunion en cercle restreint du G20 représente, selon le député de l’ADR, une violation des droits des petits pays par les grands. Cet épisode lui a montré que c’est bien dans les moments difficiles qu’on reconnaît ses vrais amis. "Notre gouvernement a accepté ce que les grands pays ont décidé", a-t-il conclu, "au lieu de défendre le Luxembourg contre les attaques des grands pays, qui ont mis leurs propres paradis fiscaux sur la liste blanche. Le gouvernement a été trop passif."