Le 13 mai 2009, le Comité économique et social de la Grande Région (CESGR) a présenté le rapport sur la situation économique et sociale de la Grande Région qu’il a établi en coopération avec le réseau des instituts spécialisés de l’Observatoire Interrégional du marché de l’emploi (OIE).
Lothar Kuntz, indépendant de l’INFO-Institut pour la Grande Région, a expliqué dans ce contexte que "ce rapport présente sous forme synthétique les informations sur la situation socio-économique de la Grande Région, sa performance, les principaux problèmes auxquels elle se voit confrontée ainsi que les tendances d’évolution par rapport aux autres régions et au niveau européen". Le rapport porte sur une multitude de thématiques telles que le territoire et la population, l’économie, l’emploi et le marché du travail, l’éducation et les conditions de vie.
Entre 1998 et 2008, le nombre d’habitants de la Grande Région a augmenté de 1,8 % pour s’établir à 11,4 millions de personnes. Cette évolution, inférieure à la moyenne européenne depuis début 2006, est imputable au recul de la population observé en Rhénanie-Palatinat ainsi qu’aux pertes démographiques enregistrées en Sarre. Le Luxembourg, la Wallonie et la Communauté germanophone de Belgique, maintiennent une tendance stable – voire largement supérieure à la moyenne dans le cas du Grand-Duché – qui s’est même consolidée depuis 2004. Au cœur de la Grande Région, l’attrait économique du Luxembourg est le premier moteur de la croissance démographique.
Des projections récentes annoncent pour la Grande Région le maintien de la croissance démographique jusqu’en 2025, avant d’amorcer par la suite un recul progressif. Une perte de 890 000 personnes est ainsi attendue dans les classes d’âge des moins de 20 ans et des 20-59 ans tandis que le nombre des plus de 60 ans augmentera de plus d’un million d’ici 2030. Le changement démographique est donc appelé à bouleverser les rapports entre les jeunes et les personnes âgées et à inverser la pyramide des âges au sein de la population active, ce qui entraînera des modifications conséquentes dans la vie économique, active et sociale.
Par rapport à 2000, le PIB de la Grande Région a augmenté d’un quart en valeur nominale. Le Luxembourg a enregistré une croissance très supérieure à la moyenne entre 2004 et 2007. Durant cette période, la Sarre a aussi pu noter une nette tendance à la hausse, se classant ainsi au deuxième rang des composantes régionales. La Wallonie s’est située tout juste au-dessus de la moyenne de la Grande Région, alors que la Lorraine, la Communauté germanophone de Belgique et la Rhénanie-Palatinat ne l’atteignait pas. A l’exception du Luxembourg, la dynamique de croissance est, dans la Grande Région, demeurée sous la moyenne européenne durant l’ensemble de la période sous revue. Il est clair que 2008 marque provisoirement la fin de la croissance de ces dernières années et que la crise a également atteint la Grande Région.
En 2006, le PIB par habitant de la Grande Région était légèrement plus élevé que la moyenne européenne. Le Luxembourg, grâce à sa puissance économique, caracole en tête de ce classement, que ce soit au niveau régional ou communautaire. Son PIB par habitant était, de près de 2,7 fois supérieur à la moyenne européenne – un résultat toutefois fortement influencé par les flux migratoires et la part importante des frontaliers sur son marché du travail. Le PIB par habitant est, par rapport à de tels chiffres, nettement plus bas dans toutes les autres composantes de la Grande Région, la Sarre étant encore la mieux lotie avec un résultat de 12 % supérieur à la moyenne communautaire.
En 2006, environ 4,6 millions de personnes exerçaient une activité dans la Grande Région. L’évolution de l’emploi sur la période 2000 – 2007 est positive autant au niveau de la population active totale qu’à celui des salariés, mais reste cependant inférieure à la moyenne européenne. En raison de sa forte demande de main-d’œuvre dans toutes les branches, le Luxembourg affiche une croissance de l’emploi bien supérieure à la moyenne interrégionale et européenne. Le taux d’emploi global dans la Grande Région atteint en 2007 une valeur de 64,4 %, mais reste cependant inférieur au niveau global de l’UE (65,3 %). La Rhénanie-Palatinat et la Sarre affichent des valeurs supérieures à la moyenne de la Grande Région, alors que les autres régions déclarent des taux plus faibles.
La mobilité transfrontalière des travailleurs continue de croître dans la Grande Région. Avec un total de 196 175 frontaliers, l’espace de coopération affiche le nombre de frontaliers le plus élevé et le plus dense au sein de l’UE. Plus de la moitié d’entre eux (55,1 %) sont originaires de Lorraine et presque les trois quarts (73,4 %) travaillent au Luxembourg. Ces deux régions partenaires jouent ainsi un rôle extrêmement important dans le dynamisme du marché de l’emploi transfrontalier. Comme les années précédentes, le flux de frontaliers vers la Sarre a tendance à baisser. La Rhénanie-Palatinat par contre enregistre à nouveau une légère augmentation du nombre de frontaliers originaires de France. Dans ces deux régions cependant, le nombre de frontaliers se rendant au Luxembourg ne cesse d’augmenter. De plus en plus de Français se rendent en Wallonie pour travailler, alors que plus des trois quarts des frontaliers wallons travaillent entretemps au Luxembourg.
Avec un taux de chômage global de 7,6 % en 2007, la Grande Région a connu – avant la crise - une détente sensible sur le marché de l’emploi. Entre 2005 et 2007, elle a affiché une baisse de 2,3 points. Son taux de chômage n’était à ce moment-là plus que légèrement supérieur à la moyenne de l’UE (7,2 %). La reprise conjoncturelle des années en question a eu un effet positif sur la réduction du chômage en Sarre et en Rhénanie-Palatinat. La Lorraine a également obtenu de bons résultats. Le taux de chômage n’a que faiblement baissé au Luxembourg qui affichait en 2007 le taux de loin le plus faible (4,1 %). La situation était à ce moment-là toujours difficile en Wallonie qui affichait un taux de chômage nettement supérieur à la moyenne (10,5 %). La Communauté germanophone de Belgique était de son côté la seule région partenaire où le chômage avait augmenté entre 2005 et 2007.
A cause du vieillissement de la population accompagné d’une diminution du nombre de jeunes dans la Grande Région, l’espace de coopération peut s’attendre à un recul sensible de la population en âge de scolarité obligatoire au cours des 10 à 20 années à venir. Ces bouleversements font apparaître de nouveaux enjeux en matière d’éducation et de formation. Le relèvement du niveau de formation générale, l’égalité d’accès à la formation et aux qualifications ainsi que l’amélioration de la qualité et de l’efficacité à tous les niveaux du système éducatif sont les principaux défis à relever. Ces perspectives mettent en évidence un besoin important d’informations exprimé par les acteurs politiques et sociaux sur la situation actuelle ainsi que sur les tendances et les problèmes dégagés à tous les niveaux du domaine de l’éducation.
La Grande Région forme une zone de contact entre deux cultures, trois langues, cinq territoires et quatre systèmes d’éducation qui empruntent des voies différentes pour préparer l’avenir des jeunes générations. Les systèmes éducatifs se différencient du point de vue de leur architecture, des déroulements, des contenus, des durées de formation ainsi que des conditions d’accès. Ceci rend d’autant plus difficile la mise en commun des données relatives à l’enseignement. Les statistiques régionales d’Eurostat ont néanmoins permis d'établir un certain nombre de données de référence concernant le degré d’instruction et la participation à l’éducation et à la formation de la population de la Grande Région. Il a ainsi pu être constaté que près de 74 % de la population adulte dans la Grande Région avait au moins atteint le niveau secondaire supérieur en 2007, ce qui correspond généralement au niveau de qualification minimum requis internationalement pour le développement des sociétés basées sur la connaissance.
Le revenu moyen des ménages de l’ensemble des composantes de la Grande Région analysées (pour le Luxembourg, il n’existe pas de données dans cette catégorie) se situaient ainsi au-dessus de la moyenne européenne, mais sous leur moyenne nationale respective. Au sein de la Grande Région, l’éventail des rémunérations de salariés s’étendait, en 2004, d’environ 47 000 euros en moyenne par tête au Luxembourg à près de 32 000 euros en Rhénanie-Palatinat. Les chiffres du Luxembourg sont à cet égard largement supérieurs à la fois à la moyenne régionale et européenne. Le Grand-Duché est également en tête de la dynamique de progression entre 1996 et 2004. En revanche, les rémunérations des salariés ont le plus faiblement progressé dans les deux composantes régionales allemandes. D’un point de vue économique global, les salariés au Luxembourg pouvaient, en 2004, disposer, en raison de la faible charge fiscale, d’un salaire ou d’appointements nets équivalant à près de 70 % de leur rémunération, alors qu’en Allemagne et en Belgique, ce taux s’établissait à un peu plus de 50 % seulement.