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Fiscalité
Le Luxembourg sera sous pression au Conseil Ecofin du 20 octobre 2009
Le Grand-Duché opposé à un mandat de négociation pour la Commission et à un accord avec le Liechtenstein qui déboucheraient sur l’échange automatique d’informations financières
20-10-2009


Le 20 octobre 2009, les ministres des finances de l’UE se réuniront à Luxembourg à l’occasion d’un Conseil Ecofin qui aura notamment pour objectif de préparer les conclusions du Conseil européen des 29 et 30 octobre 2009.

Au programme des discussions, les mesures à prévoir pour lutter contre le changement climatique, la stratégie de sortie de crise ou la réforme du système de surveillance des marchés de la finance, de l’assurance et des pensions professionnelles par la création d’un Comité européen du risque systémique (CERS), qui avaient été abordées lors du conseil informel des 1er et 2 octobre 2009. Figurent également à l’ordre du jour un projet d’accord anti-fraude avec le Liechtenstein et un projet visant à donner un mandat à la Commission européenne pour négocier des accords de lutte contre la fraude fiscale avec Andorre, Monaco et Saint-Marin, ainsi qu'un nouvel accord de lutte contre la fraude avec la Suisse.

Le Luxembourg a déjà fait part, notamment lors du conseil Ecofin de juin 2009, de son désaccord avec l’idée d’assortir ce type d’accords multilatéraux d’une clause permettant un échange automatique d’informations. Car cela reviendrait à remettre en question de façon indirecte certains points de la directive sur la fiscalité de l’épargne.

Le 16 octobre 2009, le Premier ministre Jean-Claude Juncker a d’ores et déjà annoncé, à l’issue d’un Conseil du gouvernement luxembourgeois, que Luxembourg "pourrait rejeter la proposition de la présidence suédoise" de l'UE au sujet de l’accord avec le Liechtenstein. Ce qui reviendrait à bloquer, peut-être avec le soutien de l’Autriche dont les positions sur la question sont proches, le projet sur un sujet où l’unanimité est requise comme pour toutes les questions de fiscalité. Ce "veto" luxembourgeois, le Premier ministre s’est dit prêt à en assumer les conséquences, fut-ce au prix d’une "carrière européenne", car il s’agit à ses yeux de "défendre les intérêts du Grand-Duché".

L’accord en question devrait permettre d'obtenir du Liechtenstein des engagements similaires à ceux pris dans un accord ratifié en décembre 2008 avec les Etats-Unis, lequel prévoyait une meilleure coopération sur les cas de fraude fiscale concernant des clients américains de banques du pays. Un premier projet d’accord présenté par la Commission européenne fin 2008 avait été considéré comme insuffisant par le Conseil qui, dans ses conclusions adoptées en février 2009, avait demandé de revenir à la table des négociations afin de faire en sorte que la coopération administrative en matière fiscale soit équivalente à celle qui avait négociée avec les Etats-Unis.

Cet accord couvre la fraude en matière de fiscalité tant directe qu’indirecte, il s’appuie sur une définition de la fraude qui compte tant les personnes naturelles que légales, et il inclut non seulement les faux documents et les fausses déclarations fiscales, mais aussi le dépôt de déclarations incomplètes.

Le texte couvre la coopération en matière fiscale par un échange d’informations prévu dans le cadre de l’application des lois nationales. Il permet aux parties de déclencher une assistance administrative qui ne peut être refusée au seul motif que l’information requise est détenue par une banque ou un "investiment vehicle" anonyme (trust, "Anstalt", fondation), et une assistance judiciaire pour des actes délictueux pour les deux parties.

Pour ce qui est de donner mandat à la Commission européenne pour négocier des accords multilatéraux avec Andorre, Monaco, Saint-Marin et la Suisse, ce serait aux yeux du Luxembourg ouvrir la voie à l’échange automatique d’informations. Car ancrer les standards de l’OCDE dans un accord multilatéral aurait pour conséquence de contraindre l’Autriche, la Belgique et le Luxembourg à ne plus bénéficier du régime transitoire prévu par la directive sur les revenus de la fiscalité. Celle-ci prévoit une retenue à la source plutôt que l’échange automatique d’informations, mais ce jusqu'à ce que la Confédération suisse, la Principauté d'Andorre, la Principauté de Liechtenstein, la Principauté de Monaco et la République de Saint-Marin garantissent un échange effectif et complet d'informations, sur demande, en matière de paiements d'intérêts, et jusqu'à ce que le Conseil convienne à l'unanimité que les États-Unis s'engagent à échanger des informations sur demande selon le modèle de convention de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Pour le Luxembourg, qui préfère des accords bilatéraux qui évitent le passage à l’échange automatique d’informations, des accords de ce type devraient être discutés en même temps que l’ensemble des autres textes en préparation dans l’UE sur la fiscalité de l'épargne. Son accord sur les deux textes discutés le 20 octobre est donc conditionné à la mise en œuvre d’un paquet de mesures visant à encourager la bonne gouvernance en matière fiscale garantissant notamment une concurrence loyale entre toutes les parties. Ce paquet de mesures devrait inclure des amendements aux directives sur la fiscalité de l’épargne, sur la coopération administrative dans le domaine fiscal et en matière de recouvrement fiscal.

Au sujet de la réforme de ce paquet législatif, que la Présidence suédoise entend boucler d’ici la fin de l’année, Luc Frieden a annoncé le 14 octobre 2009, à l’occasion d’une réception de l’Association des banques et banquiers Luxembourg (ABBL), que le Luxembourg aurait à "galérer" pour défendre son secret bancaire.