Le 25 janvier 2010, le député Jean Colombera (ADR) a adressé une question parlementaire au ministre de l’Agriculture, Romain Schneider, dans laquelle il a abordé la production de semence brevetée. En effet, le député de l’ADR a expliqué que lors de la dernière assemblée générale de la "Luxemburger Saatgenossenschaft" (LSG), le président aurait critiqué la propre production de semence des agriculteurs. Il aurait déclaré que si la tendance se confirme, la culture des variétés hybrides s’intensifierait et, pour contrer la production pour le propre usage des agriculteurs, les producteurs de semence utiliseraient des semences génétiquement modifiées.
Dans ce contexte, Jean Colombera a demandé au ministre quelle était son attitude par rapport à ces propos. Par ailleurs, il a voulu savoir si des semences génétiquement modifiées circulent au Luxembourg, et dans l’affirmative, quelles quantités en ont été vendues à quel endroit. Enfin, le député a demandé pourquoi la semence ne peut pas être utilisée plusieurs fois et dans quelle mesure cela porte atteinte à la législation sur les brevets.
Dans sa réponse datée du 11 février 2010, le ministre de l’Agriculture a expliqué que la propre production de semence des agriculteurs est autorisée dans toute l’UE. Ce principe, connu comme le "privilège de l’agriculteur" est ancré dans la législation communautaire, et notamment dans l’article 14 du règlement 2100/94 du Conseil du 27 juillet 1994 instituant un régime de protection communautaire des obtentions végétales.
Selon ce règlement, les agriculteurs sont autorisés à utiliser, à des fins de multiplication dans leur propre exploitation, le produit de la récolte obtenu par la mise en culture, même s’il s’agit de semence brevetée. Le commerce avec cette semence propre à l’exploitation agricole, par contre, est interdit, a tenu à souligner le ministre.
Selon Romain Schneider, la semence produite pour le propre usage ne garantit pas la même qualité que la semence brevetée dont la production est officiellement contrôlée, notamment par des analyses de laboratoires. Par ailleurs, la semence brevetée remplit les normes minimales fixées par l’UE en ce qui concerne la pureté, la capacité de germination et l’état sanitaire de la semence. Par conséquent, a souligné le ministre, la semence produite pour le propre usage, qui n’est pas soumise à ces normes, est exposée à de plus grands risques.
Abordant les propos du président de la LSG, Romain Schneider a expliqué que la propre production de semence des agriculteurs fait diminuer la production et le commerce de la semence brevetée, ce qui fait aussi baisser le chiffre d’affaires des producteurs de plantes. Aux Etats-Unis, la propre production des agriculteurs a ainsi ruiné les petites entreprises de production, qui ont par conséquent été rachetées par des grandes entreprises de semence. Ensuite, ces dernières se sont avant tout spécialisées sur la production de variétés hybrides et génétiquement modifiées pour ainsi empêcher la culture destinée au propre usage. Ceci notamment parce que la production propre de variétés hybrides n’est pas rentable et la production propre des variétés génétiquement modifiées, qui sont brevetables, peut être interdite.
Abordant la deuxième question de Jean Colombera, le ministre de l’Agriculture a tenu à souligner qu’aucune semence génétiquement modifiée ne circule au Luxembourg, vu que le commerce et la production en sont actuellement interdits au Grand-Duché.
Enfin, Romain Schneider a déclaré que, contrairement aux Etats-Unis, les variétés de plantes ne sont pas brevetables dans l’UE, mais que les producteurs de plantes peuvent légalement protéger de nouvelles variétés dans le cadre de la protection communautaire des obtentions végétales inscrite dans le règlement 2100/94 du Conseil du 27 juillet 1994. La propre production de semence, autorisée par l’article 14 de ce règlement, est limitée aux plus importantes plantes utiles à l'agriculture, comme le blé, l’orge, l’avoine, le colza, etc. De plus, les producteurs peuvent demander des indemnités aux agriculteurs luxembourgeois qui cultivent des semences brevetées pour leur propre usage. Etant donné que la production pour le propre usage était très peu répandue au Luxembourg jusqu’il y a peu, les producteurs de semence n’ont pas encore fait usage de ce droit.