François Biltgen a assisté, en sa qualité de ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, à la conférence anniversaire du lancement de l’Espace européen de l’Enseignement supérieur (EEES), conférence qui s’est tenue les 11 et 12 mars 2010 à Budapest et à Vienne. Cette conférence a réuni les ministres de l’Enseignement supérieur des 47 pays signataires du "Processus de Bologne" et a marqué l’aboutissement des engagements pris par 29 pays à Bologne en 1999.
La modernisation de l’enseignement supérieur européen et l’espace européen qui en résulte constituent des exemples inédits de coopération régionale et transfrontalière. La réforme des diplômes prévoit notamment l’introduction de trois cycles "bachelor", "master" et "doctorat". L’assurance de la qualité, la reconnaissance des diplômes et surtout la mobilité des étudiants constituent d’autres éléments piliers du processus qui ont profondément transformé le contenu et l’image de l’enseignement supérieur au cours des dix dernières années.
Les ministres ont convenu d’intensifier leurs efforts pour réaliser pleinement les réformes déjà en cours, et ce notamment en vue d’accroître l’insertion professionnelle des diplômés et d’offrir à chacun un enseignement supérieur de qualité. Lors de la conférence, les ministres ont également réaffirmé leur ferme engagement pour la liberté académique, ainsi que pour l’autonomie et la responsabilité des établissements d’enseignement supérieur comme principes de l’enseignement supérieur européen.
C’est la quatrième fois, déjà, que François Biltgen participe à une conférence ministérielle du processus de Bologne. Dans le passé il en a co-présidé deux, la dernière en date ayant été celle de Leuven/Louvain-la-Neuve en 2009. François Biltgen s’est plus particulièrement félicité du fait que la dimension sociale telle que définie en 2009 a été renforcée au cours de la conférence anniversaire du lancement de l’espace européen de l’enseignement supérieur.
Dans une interview publiée le 12 mars 2010 dans le Luxemburger Wort, François Biltgen a donné des explications au sujet des progrès réalises depuis 1999 dans le cadre du Processus de Bologne. Le ministre a déclaré que l’Espace européen de l’enseignement supérieur n’est toujours pas entièrement réalisé, comme c’était prévu pour 2010 par Bologne. "Mais Bologne en a créé les conditions préalables", a-t-il souligné. Il a ajouté : "Le cadre de l’espace de l’enseignement supérieur existe (…), mais la vraie mobilité des étudiants et des enseignants au sein de l’Europe n’existe pas encore telle que nous la voulons."
Résumant les grandes lignes qui ont changé depuis le lancement de la réforme de Bologne, le ministre a souligné que c’est surtout l’emploi qui importe, et que les universitaires ne se retrouvent pas au chômage. Par ailleurs, il pense qu’il faut prendre en considération l’attitude des pays participants à Bologne par rapport au reste du monde. Pour le ministre, c’est la question du "brain circulation" qui se pose, et non celle du "brain drain" - notamment entre les hémisphères nord et sud. Puis, il faut assurer la mobilité des étudiants et des enseignants. "Et la dimension sociale est un nouveau sujet", a-t-il expliqué. "Si on sait que nous avons besoin de 50 % de diplômes universitaires, nous devons faire en sorte que chacun, jeunes et moins jeunes, puisse obtenir un diplôme universitaire", a souligné François Biltgen. Il est d’avis que le Luxembourg a résolu cette question, d’autres pays pas encore.
Abordant la dimension sociale de la question, François Biltgen a expliqué qu’au Luxembourg, le problème se situe en amont des études universitaires et qu’il faut se demander si assez d’élèves passent le baccalauréat. "Aujourd’hui, plus de la moitié des emplois sont des postes ‘Bac plus’, tandis que nous avons seulement 30 % de diplômes universitaires", a souligné le ministre. Il s’agit donc, dans le cadre de la réforme de l’enseignement supérieur, de rendre les gens capables d’aller à l’université et d’y rester. Le Processus de Bologne est confronté à de nouveaux défis, qui ne sont pas uniquement en relation avec l’enseignement supérieur mais qui se posent plus tôt - et aussi plus tard, dans le monde du travail. Pour le ministre, il faut donc collaborer étroitement avec le marché du travail, et "beaucoup de choses sont en cours au Luxembourg" dans ce domaine.
En ce qui concerne les divers obstacles qui entravent l’entière mise en œuvre du Processus de Bologne, François Biltgen a expliqué que les universités dans de nombreux pays se concentrent jusqu’à présent sur la transmission de savoir. Mais pour le ministre, il s’agit plutôt de mettre en évidence la façon dont on assimile ce savoir. Pour lui, l’auditoire classique ne correspond plus à notre société postindustrielle, et il ne s’agit plus de "savoir", mais de "savoir-faire" Concernant la recherche, il pense par ailleurs qu’aujourd’hui, l’étudiant doit travailler plus tôt, dans le cadre de ses études, pour faire de son savoir quelque chose d’autonome.
Abordant le fait que Bologne est souvent mis en relation avec tout ce qui ne fonctionne pas dans la politique européenne d’enseignement supérieur, François Biltgen pense que "de nombreuses réformes auraient également dû se faire sans Bologne". Selon lui, le Luxembourg a eu la chance d’avoir une université jeune, ce qui a facilité la mise en œuvre.
Le ministre pense qu’il est étonnant de voir à quel point Bologne, qui ne dispose pas d’un traité contraignant pour les Etats participants, peut créer une dynamique si grande. "Il est clair que rien ne se passe si quelqu’un ne s’y tient pas, mais les pays participants ont un avantage par rapport à la concurrence, ce qui est une motivation", a-t-il souligné.
En guise de conclusion, François Biltgen a tenu à expliquer que le Luxembourg, qui a presque entièrement mis en pratique les idées de Bologne, connaît un changement structurel de sa société. "Nous ne pouvons plus vivre de nos richesses minières ou des niches de souveraineté telles que le secret bancaire", a-t-il déclaré. Pour lui, "nous devons donc faire avancer la recherche, l’innovation et l’enseignement. Parce que nous ne devons pas être dépendants des travailleurs qualifiés étrangers."