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Economie, finances et monnaie
Angela Merkel, Jean-Claude Juncker, Georges Papandreou et Nicolas Sarkozy réagissent contre les activités spéculatives sur les marchés des titres d’Etats
Ils demandent dans une lettre commune que "la Commission diligente le plus rapidement possible une enquête déterminant le rôle et l’impact de la spéculation sur CDS sur les obligations des Etats européens"
11-03-2010


La chancelière fédérale allemande, Angela Merkel, le Premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker, le Premier ministre grec, Georges Papandreou, et le président français, Nicolas Sarkozy ont adressé le 11 mars 2010 au président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, ainsi qu’au président en exercice du Conseil de l’Union européenne, José Luis Zapatero, une lettre concernant une initiative pour une enquête européenne sur la spéculation sur les produits financiers dérivés.

Europaforum.lu publie le texte intégral de cette lettre.

Monsieur le Président, Monsieur le Premier ministre,

A la suite des développements récents sur les marchés des titres d’Etat, nous souhaitons attirer votre attention sur l’activité de négociation de contrats d’échange sur les risques de défaut (credit default swaps ou CDS) sur les obligations souveraines européennes, afin de limiter la spéculation, renforcer la transparence et accroître la sécurité sur le marché des dérivés.

Premièrement, nous devons empêcher que les activités spéculatives ne créent une telle incertitude sur les marchés que les prix ne donnent plus une information correcte et que le coût de financement des Etats peut atteindre des niveaux injustifiables. Nous proposons donc que la Commission diligente le plus rapidement possible une enquête déterminant le rôle et l’impact de la spéculation sur CDS sur les obligations des Etats européens. Si cette enquête venait à révéler des abus de marchés ou qu’elle mette en évidence que la spéculation a un impact considérable sur les taux d’intérêts, nous devrons examiner rapidement des mesures et le cas échéant, adopter les textes législatifs ou réglementaires nécessaires pour y mettre fin. Cet examen devra aussi envisager des mesures appropriées comme imposer une période minimale de détention des CDS, l’interdiction des transactions spéculatives sur les CDS et l’interdiction de l’achat de CDS qui ne sont pas utilisés à des fins de couverture.

Deuxièmement, nous devons également intensifier les initiatives européennes en faveur d’une plus grande transparence du marché des produits dérivés conformément aux décisions du G20.

Les autorités de régulation doivent avoir accès aux informations sur la négociation et les portefeuilles de produits dérivés y compris les CDS, au travers d’un enregistrement obligatoire de tous les dérivés de gré à gré auprès de bases de données centrales situées en Europe. Ceci permettra aux autorités de régulation d’identifier les principaux acteurs de marché et de surveiller leurs activités. Les régulateurs devraient disposer d’un droit d’accès illimité aux données de marché. Nous devons aussi travailler pour que les régulateurs européens reçoivent les informations détaillées pertinentes des bases de données situées hors d’Europe.

Comme l’ont recommandé la Commission et le Conseil Ecofin, nous devons enfin améliorer la sécurité des marchés de produits dérivés de gré à gré en demandant que tous les produits dérivés éligibles soient négociés sur des marchés réglementés ou sur des plates formes électroniques et compensés par des chambres de compensations centrales (CCP). Ces entités devront être supervisées de manière à garantir une meilleure sécurité. Nous soutenons fortement la localisation de chambres de compensation européennes en zone euro pour renforcer l’intégrité et la stabilité du système financier européen.

L’Europe doit prendre le leadership sur ces sujets. La Commission devra présenter le résultat de ses investigations et les mesures possibles sur ces questions à un prochain Conseil Ecofin afin que nos Ministres des Finances soient en mesure de débattre sur cette base.

Angela Merkel    Nicolas Sarkozy   Georgios Papandreou    Jean-Claude Juncker

 

Les CDS

Les CDS, ou "credit default swaps", permettent à des détenteurs de dette de se prémunir contre le défaut de paiement de l'émetteur. Dans leur forme originale, les CDS permettent de se couvrir contre le risque d'insolvabilité, et ont à ce titre leur utilité. Ils font l'objet d'un énorme marché, fortement spéculatif et déconnecté de la possession des titres qu'ils sont censés couvrir. Ils sont notamment mis en cause dans la crise que traverse actuellement la Grèce fortement endettée, ce qui a conduit plusieurs pays à se prononcer ces dernières semaines pour une meilleure régulation de ce marché très opaque. La Commission européenne s'intéresse déjà de près à la question.