La décision de la Commission européenne d’autoriser la culture, à des fins industrielles, de la pomme de terre génétiquement modifiée Amflora continue de faire débat au Luxembourg. Le Luxemburger Wort s’est ainsi fait l’écho, dans ses éditions du 22 et du 23 mars 2010, d’un échange assez vif entre Viviane Reding, vice présidente de la Commission européenne et Mars Di Bartolomeo, ministre de la Santé, qui s’opposent à ce sujet tant sur le fond que sur la forme.
Le journaliste Jakub Adamowicz a pu s’entretenir il y a peu avec Viviane Reding et il est revenu, comme il le rapporte dans un article du Luxemburger Wort daté du 22 mars 2010, sur la question de l’autorisation d’OGM.
Le 2 mars 2010, la Commission européenne avait en effet annoncé une série de décisions autorisant notamment la culture à des fins industrielles de la pomme de terre génétiquement modifiée Amflora. Une décision qui avait provoqué un tollé au Luxembourg. Le même jour, la Commission européenne avait aussi annoncé son intention de présenter d’ici l’été une proposition visant à laisser aux États membres plus de latitude pour décider de cultiver ou non des OGM.
La commissaire Viviane Reding, à qui Greenpeace avait reproché de ne pas avoir "bougé le petit doigt" lors de la procédure écrite utilisée par la Commission pour prendre cette décision, s’est montrée critique à l’égard du ministre de la Santé Mars di Bartolomeo. Celui-ci n’avait d’ailleurs pas mâché ses mots pour faire part de son indignation au sujet de l’autorisation de la pomme de terre Amflora.
Viviane Reding explique en effet que si la Commission a été "dans l’obligation d’agir", selon la législation européenne sur les OGM, c’est que le Conseil des ministres n’a pas pu trouver d’accord sur le sujet après que des analyses, qui ont duré sept ans, ont démontré que l’utilisation de la pomme de terre Amflora ne présentait pas de risque.
La commissaire renvoie donc la balle à Mars Di Bartolomeo à qui elle reproche de ne pas avoir su convaincre ses collègues de partager sa position : "Le Luxembourg a tenté de trouver des alliés" mais "le ministre luxembourgeois a échoué", résume-t-elle. Et faire de la Commission européenne un bouc émissaire "juste parce que les Etats membres ne sont pas capables de trouver un accord" n’est pas au goût de Viviane Reding.
La commissaire luxembourgeoise a expliqué que les Etats membres devraient, selon la proposition que la Commission entendait présenter d’ici à l’été, "bientôt décider eux-mêmes d’autoriser ou non la culture de plantes génétiquement modifiées".
La réaction du ministre ne s’est pas fait attendre. Dès le 23 mars 2010, le Luxemburger Wort rapporte les propos de Mars Di Bartolomeo qui revient à la charge. "Je considère comme une provocation le fait que la Commission n’ait pas, comme les ministres de l’Environnement le lui avaient demandé en 2008, remanié les procédures d’autorisation mais ait au lieu de cela donné le feu vert à Amflora", plaide ainsi le ministre dans les colonnes du quotidien. Ainsi qu’il l’avait déjà annoncé, Mars Di Bartolomeo entend faire usage de la clause de sauvegarde afin de contrer l’autorisation de mise en culture d’Amflora. "Il s’agit là de défendre les intérêts des consommateurs qui sont très sceptiques à l’égard du génie génétique vert", explique-t-il.
En réponse à la critique de la commissaire luxembourgeoise, Mars Di Bartolomeo rappelle par ailleurs que c’est le ministre de l’Agriculture qui a eu à discuter au Conseil de l’autorisation d’Amflora, ce qui ne change au fond rien à la position du gouvernement. Le ministre de la Santé rappelle aussi que la Chambre des députés s’est prononcée à deux reprises contre le génie génétique vert.
Quant à la procédure que la Commission entend proposer d’ici l’été, si elle laissera plus de marge de manœuvre aux Etats membres, elle offrira aussi à la Commission plus d’espace pour pratiquer sa politique favorable au génie génétique. Cela en fera donc aux yeux du ministre de la Santé, "une arme à double tranchant".