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Emploi et politique sociale - Transports
La commission Emploi et Affaires sociales du Parlement européen a voté contre l’exclusion des conducteurs indépendants de la directive sur le temps de travail des chauffeurs routiers
Claude Turmes et Georges Bach ont exprimé leur opposition à cette proposition de la Commission européenne, tandis que Frank Engel est en désaccord avec ce vote
28-04-2010


Logo du Parlement européenAdoptée en 2002, la directive sur le temps de travail des chauffeurs routiers (2002/15/CE) stipule que les chauffeurs routiers indépendants devraient, à compter de 2009, suivre les mêmes règles que ceux salariés par des sociétés de transport. De fait, cela limitait leur temps de travail pour les activités autres que la conduite, telles que les formalités administratives, les formations ou la recherche de contrats.

Fin 2008, la Commission européenne proposait d’exclure les chauffeurs routiers indépendants du champ de la directive. Depuis, le Parlement européen est divisé sur la question. La Droite soutient majoritairement cette proposition pour protéger le statut d'indépendant et la Gauche s'y oppose, arguant que "la fatigue tue et cela ne fait pas grande différence qu'un chauffeur soit indépendant ou salarié".

Lors d'un premier vote en session plénière en mai 2009, les socialistes, les Verts et la gauche unitaire européenne ont réussi à rejeter la proposition de la Commission en première lecture en revendiquant que les indépendants soient soumis aux mêmes règles que les autres chauffeurs. Suite aux élections européennes, le rapport de force a cependant évolué. En septembre dernier, la commission parlementaire Emploi et Affaires sociales (EMPL) a désavoué le vote en plénière. Le centre-droit, les libéraux, et les conservateurs et réformateurs européens prenaient le dessus par une voix d'écart.

Le 28 avril 2010, la proposition de la Commission d’exclure des conducteurs indépendants de la directive sur le temps de travail pour les travailleurs du transport a de nouveau été soumise au vote de la commission parlementaire EMPL, qui a rejeté le rapport d’Edit Bauer y relatif avec 19 voix pour et 30 voix contre. Il s'agit de la première lecture devant la commission parlementaire, la procédure reprenant de zéro. Avant de devenir la position officielle du Parlement européen, les textes législatifs doivent être approuvés en session plénière. Le vote sur cette proposition est  programmé pour la session du 14 au 17 juin.

Manifestation syndicale à Schengen

Le 16 avril 2010, l’OGBL a eu une entrevue avec Robert Goebbels au sujet de la proposition de la Commission. L’eurodéputé socialiste a estimé que "la sécurité publique serait là gravement menacée" et il a assuré que les 180 parlementaires européens du groupe socialiste (S&D) soutenaient les revendications de la Fédération Européenne des Travailleurs du Transport (ETF).

Le 27 avril 2010, à la veille du vote au Parlement européen, l’OGBL et le LCGB ont participé à un convoi syndical européen qui a traversé les Pays-Bas, l’Allemagne, le Luxembourg, la France et la Belgique. Le convoi a fait étape à Schengen, où l’OGBL et le LCGB ont manifesté avec d’autres syndicalistes européens de l'ETF contre la politique de la Commission européenne en matière de temps de travail des conducteurs indépendants.

Selon les syndicalistes, l’exclusion des conducteurs indépendants de la directive sur le temps de travail pour les travailleurs du transport, telle que prévue par la Commission, aurait pour conséquence que les conducteurs indépendants pourraient travailler jusqu’à 86 heures par semaine, alors que les conducteurs salariés travaillent 48 heures. Les syndicats ont en outre rappelé à la Commission européenne qu'"elle aussi a une responsabilité sociale envers ses citoyens". Pour eux, "ni la sécurité, ni le bien-être de l'être humain ne devront être sacrifiés au nom d'une politique ultralibérale et orientée vers le simple profit."

Claude Turmes : contre le dumping social

Claude Turmes, qui était sur les lieux de la manifestation, a également critiqué la politique de la Commission Barroso. Il a notamment dénoncé la pression émanant de l’Europe pour un transport à bon marché qui se fait aux dépens des personnes qui travaillent dans ce secteur. Par ailleurs, il a estimé qu’"une semaine de travail de 86 heures remettra en cause la sécurité de tous les usagers de la route."

Le jour même du vote, Claude Turmes a déclaré dans un communiqué qu’il craignait que la proposition de la Commission ne détériore les conditions de travail dans le secteur des transports. Lors d’une entrevue avec l’OGBL en date du 23 avril 2010, Claude Turmes avait déjà annoncé vouloir s’opposer par tous les moyens à la politique de la Commission Barroso. L’eurodéputé vert, qui a assuré au syndicat le soutien de son groupe politique sur cette question, craignait que par cette initiative la Commission ne favorise le développement du dumping social.

Quant aux eurodéputés luxembourgeois Frank Engel et Georges Bach (PPE), membre respectivement membre suppléant de la commission EMPL, Claude Turmes a déclaré qu’ils devraient faire suivre l’acte à la parole et voter clairement pour une Europe plus sociale. L’eurodéputé vert a jugé "curieux de voir à quelle mesure le CSV s’était engagé pour une Europe sociale pendant la campagne pour les élections européennes" et comment ses représentants devenaient maintenant "des complices de la politique néolibérale lors de chaque vote important au Parlement européen".

Georges Bach salue le rejet de la proposition

Avant le vote, l’ancien syndicaliste Georges Bach (PPE) avait informé l’OGBL et le LCGB que son groupe politique était favorable aux plans de la Commission européenne. Lui personnellement, a déclaré soutenir les revendications de l’ETF, contrairement à la grande majorité des députés du PPE qui voyaient l’exclusion des conducteurs indépendants de la directive temps de travail comme une "entrave aux libertés entrepreneuriales".

Suite à la décision de son groupe politique PPE, Georges Bach ne pouvait pas participer au vote. A l’issue du vote, l’eurodéputé a toutefois salué le rejet de la proposition de la Commission. L’ancien syndicaliste, qui n’est pas du tout d’accord avec cette politique, a l’intention de continuer à se mobiliser pour le rejet de la proposition. Pour lui, les changements impliqués par la proposition de la Commission auraient signifié une "énorme régression sociale" qui aurait entraîné un danger pour la sécurité sur les routes et une concurrence déloyale dans le secteur des transports. Georges Bach espère que "le premier pas important dans la bonne direction" se répète pendant l’été et que la proposition de la Commission soit de nouveau rejetée en session plénière.

Pour Frank Engel, les indépendants doivent pouvoir organiser leur temps de travail à leur guise

Frank Engel du PPE, qui n’a pas participé au vote parce qu’il a assisté à un vote de la commission Marché intérieur et Protection des consommateurs (IMCO) en tant que rapporteur fictif, a déclaré qu’il aurait évidemment voté pour le rapport d’Edit Bauer. L’eurodéputé est notamment d’avis que les personnes indépendantes, qu’il s’agisse de chauffeurs, d’avocats ou de dentistes, doivent pouvoir "organiser leur temps de travail de façon indépendante". Il a par ailleurs tenu à souligner la différence entre temps de travail et temps de conduite. Le temps de conduite, qui est "régulé par d’autres textes", est le même pour tous les chauffeurs et cela doit, selon Frank Engel, rester inchangé. Mais il pense que c’est totalement absurde d’interdire aux chauffeurs indépendants d’organiser leur bureau et leur route avant qu’ils ne se mettent derrière le volant. Concernant la sécurité, il est d’avis qu’on n’a jamais de garantie que les chauffeurs – indépendants ou employés - aient dormi huit heures avant de commencer à travailler.