La nouvelle édition 2010 du "Bilan Compétitivité" vient de paraître le 28 octobre 2010. Avec son titre, "Vers une croissance intelligente, durable et inclusive", il s’aligne sur la stratégie Europe 2020 qui est en train d’être élaborée au niveau communautaire, avec et dans les Etats membres.
Ce bilan, qui a été présenté le 28 octobre 2010 à la presse par le directeur du Statec, Serge Allegrezza, en présence du ministre de l’Economie, Jeannot Krecké, montre que la position compétitive globale du Luxembourg, basée sur 81 indicateurs, s’est marginalement redressée, faisant suite à une dégradation continue au fil des dernières années. En revanche, la compétitivité-coûts, basée sur le taux de change effectif réel, continue de se dégrader.
L’analyse de la compétitivité structurelle, assise sur 81 indicateurs dans dix domaines économiques, sociaux et écologiques, a conduit l’Observatoire de tirer deux conclusions:
Premièrement, il constate une amélioration marginale de la position du Luxembourg dans les classements de pays élaborés par des organisations internationales, comme par exemple l’IMD, le Forum économique mondial, la Heritage Foundation ou la Commission européenne avec son Summary Innovation Index.
Même si ces "benchmarks" internationaux se réfèrent à des éventails de pays, régions et villes très différents, et si l’on ne connaît pas toujours la liste exacte des indicateurs de base utilisés, la pondération des indicateurs et la méthode d’agrégation utilisée, même si lui-même n’y croit pas toujours, le ministre de l’Economie, Jeannot Krecké, qui assistait à la présentation du Bilan de compétitivité a insisté sur le fait que les investisseurs à l’étranger s’y fiaient et que le positionnement du Luxembourg dans ces indicateurs avait des implications fortes sur les décisions d’y investir ou non.
Deuxièmement, il constate également une amélioration marginale de la position du Luxembourg dans la mise à jour du Tableau de Bord Compétitivité "structurel" de l’Observatoire de la Compétitivité. Ce classement se base sur 81 indicateurs économiques, sociaux et environnementaux retenus ensemble avec les partenaires sociaux déclinés en 10 catégories pour lesquels il existe un classement UE:
En gros, le Luxembourg se positionne en 2009 en 9e place parmi les 27 Etats membres de l’UE, et gagne deux positions par rapport à 2008. Cette amélioration s’explique notamment par une relativement bonne résistance de l’emploi au Luxembourg, pendant la crise économique et financière, par rapport aux autres Etats membres de l’UE.
Pour s’assurer de la solidité de la méthodologie, l’Observatoire de la Compétitivité avait commandité un audit externe du Tableau de Bord Compétitivité auprès du Joint research centre de la Commission européenne à Ispra. Son objectif était d’identifier les limites de la méthodologie actuellement utilisée, et de faire des recommandations afin de l’optimiser. Cet audit constate notamment comme point fort la définition précise du phénomène à mesurer et constate aussi que la construction de l’indicateur synthétique assure une certaine transparence du processus. L’audit préconise aussi certaines recommandations techniques que l’Observatoire de la Compétitivité va mettre en œuvre.
Le Tableau de Bord Compétitivité a révélé un certain nombre de déficits. Ainsi, la compétitivité-prix et la compétitivité-coûts du Luxembourg, deux déterminants essentiels permettant aux entreprises nationales d’exporter leurs biens et services, continuent toujours de se détériorer par rapport à ses principaux partenaires commerciaux, notamment par rapport à la France et la Belgique.
Ces résultats sont concordants avec ceux présentés par d’autres organismes internationaux (OCDE, FMI, BCE), mais aussi avec ceux de la Banque centrale du Luxembourg. Pour le ministre, l’évolution du facteur compétitivité-coût a évolué si mal "que nous nous trouvons au seuil où cela fera mal à l’économie".
Bien que la compétitivité-coûts, à laquelle les entreprises s’intéressent fort légitimement, constitue un volet à surveiller de près, les défis qui se posent au pays ne peuvent cependant pas, selon l’Observatoire, se résumer à la seule maîtrise des coûts.
L’innovation et la productivité, l’inclusion sociale et une utilisation efficace des ressources naturelles doivent constituer les piliers d’un programme national de réforme structurel à long terme. Ces défis et objectifs sont intimement liés. De meilleurs niveaux d’éducation améliorent les chances de trouver un emploi et permettent d’accroître le taux d’emploi aidant à réduire la pauvreté, et une plus grande capacité de R&D et d’innovation, combinée à une efficacité accrue des ressources, améliore la compétitivité et favorise la création d’emplois.
Dans ce cadre, le Conseil européen a arrêté la stratégie Europe 2020, le successeur de la stratégie de Lisbonne, qui entend permettre à l'UE et aux Etats membres de sortir renforcés de la crise à travers "une croissance intelligente, durable et inclusive". Le Conseil européen a notamment confirmé cinq grands objectifs:
Le Luxembourg devra définir ses objectifs nationaux sur base de ces cinq grands objectifs européens.
La stratégie Europe 2020 constitue également une nouvelle étape dans la gouvernance de la politique économique et sociale étant donné que la politique budgétaire, par le biais du Pacte de stabilité et de croissance, s’articulera plus étroitement autour d’un nouveau programme national LU2020 à mettre en place
Le Bilan 2010 se penche aussi sur la foison d’études consacrées au mécanisme de l’indexation automatique des salaires, et son impact sur l’inflation, qui ont été réalisées au cours des dernières années sur le cas luxembourgeois.
Les études attestent un lien significatif entre inflation et salaires, dans les deux directions. L’effet de l’adaptation des salaires est faible à court terme, l’ampleur de l’effet étant plus important à long terme. Parmi les résultats que l’Observatoire a mis en exergue, une hausse du coût salarial de 2,5 % (équivalant à une tranche indiciaire) a un effet de 0,4 % sur l’inflation après 4 ans. Les salaires augmentent de 3,1 %, le coût salarial de 0,5 %. Les exportations diminuent, le PIB aussi, et l’emploi diminue, ce qui augmente le chômage,
Néanmoins, l’Observatoire reconnaît que les coefficients sont entachés d’une certaine incertitude ne serait-ce qu’à cause de l’insuffisante longueur des séries statistiques. Le rôle précis que joue le mécanisme particulier de l’indexation automatique, par rapport à d’autres mécanismes d’adaptation des salaires, reste cependant à déterminer et appelle d’autres approfondissements.
Le Bilan 2010 synthétise ainsi les diverses facettes de la relation entre inflation et salaires dans une petite économie ouverte qui ont déjà été mises en lumière.
Pour conclure, le Bilan 2010 fait le point sur le grand projet "IBien-être"qui vise à dépasser les indicateurs traditionnels pour mesurer le bien-être de la population dans la foulée du fameux rapport Stiglitz-Sen-Fitoussi.
Ce projet est réalisé dans le cadre du programme gouvernemental 2009 par le Conseil économique et social (CES) et le Conseil supérieur pour un Développement durable (CSDD), avec l’aide de l’Observatoire de la Compétitivité ainsi que du STATEC. La démarche vise à trouver des indicateurs qui complètent ceux du Tableau de Bord dans la dimension essentielle de la qualité de vie ressentie par les citoyens.
Le ministre de l’Economie et du Commerce extérieur, Jeannot Krecké, a invité les partenaires sociaux à discuter le Bilan d’une manière controverse mais constructive.