Dans un article paru le 9 décembre 2010, l’hebdomadaire allemand Die Zeit se fait l’écho de critiques exprimées par le Premier ministre luxembourgeois et président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, au sujet du refus allemand de s’intéresser plus avant à l’idée d’euro-obligations qu’il a défendue notamment dans une tribune du Financial Times datée du 6 décembre 2010. Les réactions y avaient été nombreuses, comme en avait rendu compte Europaforum.lu à l’issue de la réunion de l’Eurogroupe qui se tenait le même jour.
"On rejette notre proposition avant même de l'avoir étudiée", regrette ainsi Jean-Claude Juncker qui dit s’en "étonner beaucoup". "Cette façon de créer en Europe des sujets tabous et de ne pas du tout s'occuper des idées des autres, est une manière très anti-européenne de gérer les affaires européennes", a-t-il confié encore à l’hebdomadaire, allant même jusqu’à déclarer que "l'Allemagne raisonne de manière un peu simpliste" au sujet des euro-obligations.
Pour défendre son idée, le président de l’Eurogroupe a fait valoir, face à l’argument d’Angela Merkel qui s’inquiétait d’un taux d’intérêt unique valable pour les obligations d’Etat européennes, qu’il s’agirait de "mettre en commun une partie des dettes nationales à l'échelle européenne pour les servir avec des euro-obligations"."La plus grande partie des dettes nationales serait soumise aux taux d'intérêt nationaux", précisait ainsi Jean-Claude Juncker aux journalistes de l’hebdomadaire allemand.
La presse allemande et, dans une moindre mesure européenne, a fait ses choux gras de ces déclarations au matin du 9 décembre 2010, et côté allemand, les réactions n’ont pas tardé.
"Je réponds à cela que nous travaillons calmement et qu'il ne faut pas perdre de vue l'objectif de vendredi prochain", à savoir le 17 décembre où se tiendra le Conseil européen, a réagi la chancelière allemande Angela Merkel qui entend faire de "cette manière calme" sa "contribution au succès de vendredi". La chancelière a saisi l’occasion pour réaffirmer son opposition à l’idée proposée par Jean-Claude Juncker, rappelant notamment que, selon elle, de telles euro-obligations ne seraient pas "compatibles" avec les traités actuels.
Steffen Seibert, porte-parole du gouvernement allemand, s’est lui aussi montré critique à l’égard des propos de Jean-Claude Juncker rapportés par Die Zeit, jugeant que "cela n'aide pas l'Europe si ses membres se qualifient les uns les autres d'anti-européen". S’inquiétant de l’impact éventuel de telles déclarations, il a par ailleurs souligné "que les marchés prennent note de cette manière de montrer du doigt". Steffen Seibert, qui a opposé à Jean-Claude Juncker que sa proposition avait été étudiée avec sérieux, a souligné que l’Allemagne n’était pas le seul pays à qui la proposition d’émettre des euro-obligations "pose problème". Selon lui, de telles euro-obligations nécessiteraient "une autre Europe".