Dans l’Union européenne, plus de six millions de jeunes quittent l’éducation et la formation avec des qualifications correspondant, au mieux, au premier cycle de l’enseignement secondaire. Ils ont beaucoup de difficultés à trouver un emploi et sont plus susceptibles de se retrouver au chômage et de dépendre de l’aide sociale. Le décrochage scolaire nuit au développement économique et social et constitue un obstacle sérieux à la réalisation de l’objectif de croissance intelligente, durable et inclusive que l’Union européenne s’est fixé.
La Commission a approuvé le 31 janvier 2011 un plan d’action qui a pour objectif d’aider les États membres à atteindre un objectif phare de la stratégie Europe 2020 : ramener le taux d’abandon scolaire moyen dans l’Union européenne, actuellement de 14,4 %, en dessous de la barre des 10 % d’ici la fin de la décennie.
La nouvelle initiative de la Commission décrit la situation de l’Europe en matière d’abandon scolaire, les causes principales du phénomène et les risques que celui-ci présente pour le développement économique et social, et propose des manières de combattre le problème plus efficacement.
La proposition de recommandation du Conseil qui l’accompagne contient des lignes directrices visant à aider les États membres à élaborer des politiques de réduction de l’abandon scolaire qui soient globales et fondées sur des éléments concrets.
Le taux moyen d’abandon scolaire dans l’UE, qui est actuellement de 14,4 %, masque des écarts considérables entre les différents pays :
Ainsi au Luxembourg, le pourcentage de la population âgée de 18 à 24 ans dont le niveau d’études ne dépasse le premier cycle de l’enseignement secondaire et ne poursuivant ni études ni formation en 2009 était de 7,7 % en 2009. Et il a connu une chute impressionnante entre 2000 et 2009, baissant de 54,2 %. Alors que ce taux a diminué de 18,2 % dans l’UE sur la même période.
Malgré l’existence de traits communs, les États membres font, en outre, face à des situations différentes en ce qui concerne les groupes les plus touchés, le niveau d’éducation atteint par les jeunes déscolarisés et la situation de ces derniers sur le marché de l’emploi.
Il s’agit d’un problème complexe que les politiques de l’éducation ne suffiront pas à résoudre. Pour être efficaces, les stratégies de lutte contre l’abandon scolaire doivent impliquer les politiques relatives à l’éducation, à la jeunesse et à la protection sociale, être adaptées au contexte local, régional et national et comporter des mesures de prévention, d’intervention et de compensation.
Une meilleure coopération entre les pays de l’Union européenne, l’échange de bonnes pratiques et une utilisation plus ciblée des ressources financières de l’UE pourront contribuer à résoudre le problème.
Les propositions de la Commission seront discutées par les ministres de l’éducation lors de leur réunion au sein du Conseil, du 2 au 4 mai 2011 à Bruxelles. Les États membres seront invités à adopter d’ici 2012 des stratégies globales fondées sur ces propositions, et à les mettre en œuvre à travers leurs programmes de réforme nationaux.
La Commission veillera quant à elle à un financement ciblé dans le cadre du programme d’éducation et de formation tout au long de la vie et du programme-cadre de recherche, pour la mise au point de solutions innovantes au problème, et dans le cadre du Fonds social européen, pour le financement de mesures nationales et régionales de réduction de l’abandon scolaire.
Dans le projet de programme national de réforme (PNR) publié le 12 novembre 2010, le gouvernement luxembourgeois se propose de maintenir le décrochage scolaire en dessous de 10 %.
Pour atteindre cet objectif, le gouvernement entend poursuivre les mesures et réformes amorcées afin de faire face aux deux défis majeurs qui se posent en la matière, à savoir adapter le système d’enseignement à une population scolaire toujours plus hétérogène du fait de l’importante immigration que connaît le pays d’une part, et tenir compte d'autre part du fait que le trilinguisme du système scolaire peut être source d’échec scolaire pour certains élèves.
Parmi les mesures déjà prises, le PNR fait état de la mise en place d’un soutien obligatoire aux élèves ayant des difficultés scolaires, de la création de classes-relais, classes-passerelles et de classes d’insertion professionnelle pour donner aux jeunes la possibilité de réintégrer une formation, de la prise en charge préventive des élèves menacés d’exclusion, mais aussi du suivi individuel des décrocheurs afin de les aider à être réintégrés dans une formation. Sont encore cités l’accueil et la prise en charge d’élèves étrangers, notamment des primo arrivants par la création de classes d’accueil, de classes d’insertion et de classes à régime linguistique spécifiques. Le PNR évoque aussi les réformes en cours tant de l’enseignement fondamental, de l’enseignement secondaire et secondaire technique que de la formation professionnelle.
La création à venir d’une école de la deuxième chance est par ailleurs citée par les autorités luxembourgeoises. L’objectif est de permettre aux jeunes décrocheurs de (ré)intégrer les classes traditionnelles de l'enseignement secondaire classique et secondaire technique, l'apprentissage ou le marché de l'emploi.
Qu’entend-on par "abandon scolaire" ?
L’Union européenne définit la catégorie des jeunes en situation d’abandon scolaire comme les personnes de 18 à 24 ans qui ont quitté le système scolaire au niveau du premier cycle de l’enseignement secondaire, voire avant, et ne poursuivent ni études, ni formation .
Les personnes quittant prématurément l’école sont donc celles qui n’ont atteint qu’un niveau d’éducation préscolaire, primaire ou le premier cycle de l’enseignement secondaire, ou ayant brièvement fréquenté le deuxième cycle de l’enseignement secondaire pendant moins de deux ans.
Les données relatives aux jeunes quittant prématurément l’école sont collectées annuellement par l’intermédiaire de l’Enquête européenne sur les forces de travail.
L’abandon scolaire peut revêtir plusieurs formes. Cela inclut les jeunes qui ont abandonné l’école avant la fin de l’enseignement obligatoire, ceux qui ont achevé la scolarité obligatoire mais qui n’ont pas obtenu de diplôme de deuxième cycle de l’enseignement secondaire et ceux qui ont suivi des cursus préprofessionnels ou professionnels qui n’ont pas abouti à l’obtention d’un diplôme équivalent au deuxième cycle de l’enseignement secondaire.
Qui n’appartient pas à la catégorie des personnes en situation d’abandon scolaire ?
La définition de l’abandon scolaire exclut toute personne ayant reçu un enseignement ou une formation au cours des quatre semaines précédant la date de l’enquête. De même, les jeunes qui ont initialement abandonné l’école mais qui ont réintégré le deuxième cycle de l’enseignement secondaire pour obtenir un diplôme avant l’âge de 25 ans ne sont pas considérés comme des jeunes ayant quitté prématurément l’école.
Quel est l’objectif de l’UE ?
La stratégie Europe 2020 comporte cinq objectifs phare. L’un d’entre eux consiste à réduire le taux d’abandon scolaire moyen dans l’UE à moins de 10 % d’ici l’année 2020.
L’objectif en matière d’abandon scolaire est étroitement lié à une croissance intelligente et durable. Il a un impact direct sur l’employabilité des jeunes et contribue à rompre le cycle de la misère, de l’exclusion sociale et de la pauvreté.
Quels sont les coûts économiques et sociaux de l’abandon scolaire ?
L’abandon scolaire engendre des coûts individuels, sociaux et économiques élevés. Les jeunes n’ayant accompli que le premier cycle de l’enseignement secondaire ou un niveau inférieur sont plus souvent touchés par le chômage, davantage susceptibles de dépendre des prestations sociales et présentent un risque d’exclusion sociale plus élevé. Cela se répercute sur les rémunérations perçues au cours de leur carrière, leur bien être et leur santé. En outre, les personnes ayant quitté l’école prématurément ont tendance à moins participer aux processus démocratiques.
L’abandon scolaire a des effets négatifs à long terme sur le développement social et la croissance économique. L’innovation et la croissance reposent sur une main d’œuvre qualifiée: le fait de réduire de seulement un point de pourcentage le taux européen moyen d’abandon scolaire permettrait à l’économie européenne de disposer chaque année de presque un demi-million supplémentaire de jeunes travailleurs qualifiés potentiels.
Pourquoi les jeunes quittent-ils l’école prématurément ?
De nombreuses raisons peuvent expliquer pourquoi les jeunes quittent prématurément l’école ou la formation. Bien que la situation varie selon les pays, l’abandon scolaire en Europe est fortement lié au handicap social et à un milieu peu instruit. Les groupes vulnérables sont particulièrement touchés, comme les jeunes provenant de l’assistance publique ou ceux ayant des besoins spécifiques en matière d’éducation.
L’abandon scolaire est influencé par des facteurs éducatifs, des situations individuelles et des conditions socioéconomiques. Il s’agit d’un processus qui débute souvent dès l’enseignement primaire, avec les premiers échecs scolaires et une distanciation vis-à-vis de l’école.
À quel moment les jeunes concernés abandonnent-ils généralement le système éducatif ?
Si plus de 70 % des jeunes quittant prématurément l’école dans l’UE parviennent au premier cycle de l’enseignement secondaire, près de 17 % n’achèvent que l’enseignement primaire. Ce dernier groupe est particulièrement important en Bulgarie (38 %) et au Portugal (40 %).
Que font les jeunes qui quittent prématurément l’école?
En 2009, seulement 48 % des personnes ayant abandonné l’école dans l’UE avaient un travail alors que 52 % étaient au chômage ou exclus du marché de l’emploi.
Les pourcentages les plus élevés de jeunes ayant abandonné le système éducatif mais ayant un emploi ont été observés à Malte (74 %), à Chypre (74 %), au Portugal (71 %) et aux Pays-Bas (71 %).
Au Luxembourg, les jeunes ayant quitté prématurément l’éducation et la formation sont plus de 55 % à avoir un emploi.
Un nombre particulièrement élevé de jeunes ayant quitté prématurément l’école étaient sans emploi ou inactifs en Slovaquie (80 %), en Bulgarie (73 %) et en Hongrie (71 %).
Y a-t-il un lien entre l’immigration et l’abandon scolaire ?
En moyenne dans l’UE, le taux d’abandon scolaire des jeunes immigrants de première génération est le double de celui des jeunes autochtones (26 % contre 13 %). Le Luxembourg offre une proportion à peu près équivalente puisque le taux d’abandon des jeunes immigrants est de 11 %, contre 5 % pour les jeunes autochtones.
Toutefois, on observe à nouveau des différences importantes entre les États membres. En Grèce, en Espagne et en Italie, plus de 40 % des jeunes immigrants quittent l’école prématurément. Dans certains pays comme le Portugal, le Royaume Uni et la Norvège, on observe des taux d’abandon scolaire plus faibles chez les immigrants que chez les autochtones.
Dans plusieurs États membres, l’abandon scolaire est particulièrement élevé chez les minorités défavorisées comme les populations roms.
D’où proviennent ces données ?
Ces données sont extraites de l’Enquête européenne sur les forces de travail (EFT), qui est menée dans les 27 États membres, la Croatie, l’ancienne République yougoslave de Macédoine, l’Islande, la Norvège, la Suisse et la Turquie.
Il s’agit d’une grande enquête auprès des ménages, qui fournit des résultats trimestriels sur la participation au marché du travail des personnes âgées de 15 ans et plus, ainsi que sur les personnes qui n’ont pas d’emploi.
Les instituts nationaux de statistique sont chargés de la sélection de l’échantillon, de l’élaboration des questionnaires, de la conduite des entretiens dans les ménages et de la présentation des résultats à l’Office statistique de l’Union européenne (Eurostat). En 2010, environ 1,5 million de personnes dans l’UE y ont pris part.