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Economie, finances et monnaie
La Chambre des députés se prépare à participer au "semestre européen"
Dans un entretien accordé au Quotidien, Luc Frieden explique que "les partis politiques et les partenaires sociaux seront mieux intégrés dans le processus budgétaire que par le passé"
18-02-2011


Alors que les ministres des Finances de l’UE se sont entendus le 15 février 2011 sur leurs premières conclusions concernant le semestre européen, Luc Frieden est venu présenter à la Chambre le 17 février 2011 le calendrier de mise en œuvre du semestre européen au Luxembourg. C’est devant les membres de la commission des Finances et du Budget que le ministre des Finances est venu détailler cette nouvelle procédure lancée en janvier dans le but d’améliorer la coordination entre les politiques budgétaires et économiques des différents Etats membres.Luc Frieden est venu présenter à la Chambre le "semestre européen" le 17 février 2011

Sur la base de grandes orientations formulées au Conseil européen de mars, les politiques budgétaire et structurelle de tous les Etats membres devront désormais être préparées par les autorités nationales compétentes, sous la forme du programme de stabilité et du plan national de réforme, pour être ensuite examinées au niveau européen. Selon des signes de déséquilibres et d’incohérences éventuels, les ministres des Finances de l’UE réunis en Conseil formuleront en juin/juillet des recommandations qui influeront dans l’élaboration des budgets nationaux respectifs en automne.

Au Luxembourg, la Chambre, dont un des rôles majeurs consiste à voter le budget annuel, va donc, comme le gouvernement, devoir travailler dans le cadre de cette procédure.

Luc Frieden a insisté devant les députés sur le fait que malgré un calendrier serré, il restera suffisamment de temps aux parlementaires pour débattre publiquement et éclairer ainsi le pays sur les orientations budgétaires à venir.

Au lendemain de cette rencontre, le 18 février 2011, le Quotidien a publié un dossier consacré au semestre européen. Dans un entretien accordé à la journaliste Geneviève Montaigu, Luc Frieden s’explique plus avant sur un premier semestre qui est destiné à "fixer les grandes orientations à la fois en termes de politique budgétaire et de politique économique" et à "faire un examen européen des grands objectifs dans ces matières".

"Les grandes orientations seront débattues dans un esprit européen", se félicite le ministre des Finances qui voit là "une plus-value pour notre politique budgétaire"

Comme le rappelle le ministre, à la fin de ce premier semestre, la Commission européenne et le Conseil des ministres des Finances de l'UE donnent un avis et des recommandations sur ces grandes orientations. "Il appartient par la suite, sur base de cette analyse, de préparer le budget, au niveau national, en automne, comme par le passé", Le Quotidiensouligne enfin Luc Frieden qui insiste sur le fait que "le Parlement restera souverain dans sa décision finale".

"J'ai proposé aux députés de venir discuter au Parlement, vers la fin du mois de mars, de l'objectif que nous nous fixons en termes de finances publiques, pour l'année 2012", a confié Luc Frieden à la journaliste, annonçant ensuite "un débat plus général sur les politiques que nous allons mener" tandis que "le détail du budget sera fait à la fin de l'année".

Aux yeux de Luc Frieden, "l'orientation européenne sera une plus-value pour notre politique budgétaire parce que ce n'est pas simplement nous qui allons discuter de l'objectif". Le ministre se félicite du fait que "nous aurons un avis externe de la part des autres ministres des Finances de l'Union européenne", "un avantage pour nous", et ce d’autant plus qu’il s’agira de faire le "même exercice à l'égard des autres pays de la zone euro". Le ministre luxembourgeois voit là un moyen d’éviter "des dérapages comme ceux que nous avons vus en Grèce et en Irlande", et une assurance que "nous aurons une meilleure politique budgétaire dans tous les États de la zone euro".

"La sagesse luxembourgeoise deviendra à travers cet exercice une sagesse européenne dont nous profitons en tant que petit pays membre de la zone euro", estime Luc Frieden

Aux inquiétudes formulées par les partenaires sociaux dont Geneviève Montaigu se fait l’écho dans ses questions, Luc Frieden répond que "toutes les politiques sont aujourd'hui à la fois nationales et européennes". "Ce n'est pas Bruxelles ou un autre qui fixera notre politique salariale, mais si nous faisons des politiques ou des dépenses budgétaires qui créent un déficit ou qui conduisent à une situation dans laquelle nous ne pouvons plus financer certains domaines, comme le financement des retraites, alors cela devient un sujet européen", explique le ministre qui ne voit là nulle "mainmise d'autrui sur notre politique", mais bien "le bon sens, appliqué à la politique budgétaire et économique, dans un cadre européen que nous nous sommes fixé nous-mêmes".

Quant à ceux qui, comme Jacques Delors, jugent que le semestre européen est trop centré sur des sanctions et pas assez sur des incitations, Luc Frieden leur rappelle que s’il y a besoin de sanctions, c’est que "certains n'ont pas respecté les règles que nous nous étions données". S’appuyant sur le respect exemplaire de ces critères par le Luxembourg, Luc Frieden en vient même à déclarer que "la sagesse luxembourgeoise deviendra à travers cet exercice une sagesse européenne dont nous profitons en tant que petit pays membre de la zone euro".

Selon le ministre des Finances, "les partis politiques et les partenaires sociaux seront mieux intégrés dans le processus budgétaire que par le passé"

Luc Frieden s’inscrit enfin en faux contre l’idée que le semestre européen ne serait pas suffisamment ouvert à la participation des différents acteurs dans le processus. "Je dirais, au contraire, qu'à la fois les partis politiques et les partenaires sociaux seront mieux intégrés dans le processus budgétaire que par le passé", avance le ministre qui précise que "désormais, nous aurons un débat budgétaire tout au long de l'année au moins à partir du moment où je présenterai les grandes orientations des finances publiques vers la fin mars".

Geneviève Montaigu s’est appliquée aussi à recueillir pour son papier les commentaires de députés des principaux groupes parlementaires.

Pour Lucien Thiel, il va s’agir de "trouver un calendrier"

Ainsi, elle rapporte que, pour Lucien Thiel (CSV), le semestre européen n’est pas "une surprise". "Nous étions déjà familiarisés avec l'idée", explique le député, précisant qu’il va s’agir de "trouver un calendrier", ce qui "fera un peu plus de travail pour le Parlement". 

"Le tout c'est de se demander s'il y a un sens à faire un débat sur le budget au printemps et en décembre, désormais", s’interroge Lucien Thiel qui estime que "maintenant l'implication européenne précédera nos orientations, mais nous allons devoir greffer les vues de Bruxelles sur les vues du Parlement, en amont".

"Il va bien falloir expliquer à la population que ce n'est pas Bruxelles qui dictera les règles", prévoit François Bausch

François Bausch (déi gréng) voit dans cette "procédure tout à fait nouvelle" un "exercice très difficile". "Il va falloir discuter de détails pour éviter le double emploi d'un débat sur le budget en avril et en octobre", explique-t-il, prévoyant que "cela va être intensif pour un petit Parlement comme le nôtre qui a peu de moyens".

Selon le député, "il faut voir cette première expérience comme une période de rodage" et "surtout, il va bien falloir expliquer à la population que ce n'est pas Bruxelles qui dictera les règles".

"On est tous dans le même bateau", rappelle Roger Negri

Pour Roger Negri (LSAP), "on ne peut pas faire autrement", "on ne peut pas d'un côté demander aux Grecs, par exemple, de faire des économies et, de l'autre, continuer, nous, à faire comme si de rien n'était".

"Et si on demande à présent aux Grecs de présenter leurs stratégies budgétaires pour voir si elles sont viables, c'est tout à fait naturel qu'on attende la même chose des 26 autres États membres", poursuit-il, avant de conclure "on est tous dans le même bateau".

Le débat parlementaire sur le budget va se trouver "fortement anticipé", constate Gast Gybéryen

Gast Gibéryen (ADR) a pour sa part expliqué que le débat parlementaire sur le budget va se trouver "fortement anticipé" et qu’il va commencer "alors que les avis des chambres professionnelles ne seront pas encore disponibles, à moins qu'elles ne portent que sur des informations assez sommaires".

Pour Xavier Bettel, l'essentiel est "que cette nouvelle mesure n'aboutisse pas à un débat budgétaire tronqué"

Prudent, Xavier Bettel (DP), n’a pas souhaité s’engager "dans un débat sur le pour ou le contre de cette mesure, car c'est une discussion qui doit être réalisée avec les membres du parti". Pour autant, souligne le député, "il est certain qu'il faut mettre en place une certaine rigueur au niveau européen". L'essentiel à ses yeux est "que cette nouvelle mesure n'aboutisse pas à un débat budgétaire tronqué". Lui aussi souligne qu’il y aura "certainement un effort à faire pour mieux faire connaître cette mesure auprès du grand public".