Le premier sommet, un Conseil européen extraordinaire convoqué par le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, qui rassemble les 27 chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE, sera consacré à la Libye et à l’Afrique du Nord. Les dirigeants européens discuteront de mesures à prendre pour contribuer à surmonter les événements graves que connaît actuellement la Libye et de la mobilisation de ressources supplémentaires afin de faire face à la situation humanitaire créée par l'afflux de réfugiés en provenance de Libye. Les chefs d’État et de gouvernement examineront également le soutien aux transitions politiques en cours en Tunisie, en Égypte et dans la région au sens large, en vue de la mise en place d’un nouveau partenariat, comprenant un soutien ciblé, adapté aux besoins et à la situation de ces pays.
L’autre sommet, une réunion informelle des chefs d’État et de gouvernement des 17 pays membres de la zone Euro, sera exclusivement consacré à l’examen des travaux en cours en vue du renforcement de la gouvernance économique dans la zone Euro ainsi qu’à la formulation d’une réponse globale pour le maintien de la stabilité de la zone Euro. Ici, les chefs d’État et de gouvernement discuteront du futur "pacte pour l’Euro" et donc du renforcement de la coordination politique en matière de compétitivité et de convergence. Ils feront par ailleurs le point sur les travaux en cours sur le renforcement de l’actuel Fonds européen de stabilisation financière (FESF) ainsi que sur l’établissement et la mise en place du futur Mécanisme européen de stabilité (MES) appelé à succéder au FESF à partir de mi-2013. L’adoption définitive de ce paquet global est prévue pour la prochaine réunion ordinaire du Conseil européen, les 24 et 25 mars 2011 à Bruxelles.
Le sommet des 27 sur la Libye et les transitions en cours en Tunisie et en Egypte se déroule dans un contexte particulier, notamment à cause du rapport de forces incertain entre le régime du colonel Kadhafi et les forces qui se sont rebellées. L’UE a décrété un embargo sur les armes vers la Libye qui va plus loin que celui du Conseil de sécurité. Elle a décidé un gel des avoirs des membres du clan Kadhafi et de leurs proches, un gel qui touche des comptes de personnes physiques, d’entreprises, ainsi que des fonds souverains ou liés au commerce du pétrole. Elle a mis en place des mécanismes d’aide humanitaire et de soutien aux travailleurs immigrés qui sont plusieurs centaines de milliers à avoir fui la Libye ou les zones de combat. Elle a renforcé ces sanctions ce 11 mars 2011. Elle a participé à la coordination du rapatriement de ses ressortissants et d’autres ressortissants étrangers de Libye. Son agence en charge des frontières extérieures, Frontex, a déployé une mission du nom d’Hermes, notamment pour aider l’Italie et d’autres Etats membres riverains de la Méditerranée à faire face à l’afflux massif de réfugiés.
Mais entretemps, des divergences se sont fait jour entre dirigeants européens sur deux questions lourdes de conséquences : l’établissement d’une zone d’exclusion aérienne et la reconnaissance du Conseil national de transition (CNT) libyen, l'organe de l'opposition anti-Kadhafi comme gouvernement légitime du peuple libyen.
La zone d’exclusion aérienne est une question d’intervention militaire. Une telle zone servirait à empêcher les forces du colonel Kadhafi à continuer les bombardements dirigés contre sa propre population. Mais l’opération pour l’établir suppose la mobilisation de moyens aériens qui permettent de clouer au sol l’aviation libyenne et de neutraliser les capacités anti-aériennes des forces de Kadhafi. Pour le Luxembourg, comme pour nombre d’autres pays de l’UE, une telle intervention suppose un mandat du Conseil de sécurité des Nations Unies, une vraie demande de la part des Libyens et des grands acteurs régionaux, dont la Ligue arabe et l’Union africaine, desquels une participation active serait attendue. Paris et Londres, membres permanents du Conseil de sécurité, penchent en faveur de cette solution. Parmi les autres membres permanents du Conseil de sécurité, les USA sont réticents, et si la Chine et la Russie n’ont pas fait opposition à l’embargo sur les armes, leur position sur une zone d’exclusion aérienne n’est pas connue. L’Allemagne et le Portugal, deux autres Etats membres de l’UE qui siègent temporairement au Conseil de sécurité, sont très retenus eux aussi.
Quant à la reconnaissance du CNT libyen, que la France et le Parlement européen souhaitent explicitement, la chancelière Angela Merkel, qui n’a pas été consultée par Nicolas Sarkozy, s'est montrée "surprise". Et Franco Frattini, le ministre des Affaires étrangères italien, donc d’un pays très directement touché par les répercussions des événements en Tunisie d’abord, en Libye ensuite, a déclaré : "Le fait de reconnaître doit être une décision européenne, pas nationale." Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a mis en garde Paris vendredi contre tout "geste théâtral" lors du sommet.
C’est dans ce contexte difficile que les dirigeants européens doivent arriver à des décisions. Un projet de déclaration finale de la réunion qui circule à Bruxelles se montre prudent sur les deux points de divergence. Il y a unanimité sur le fait que le colonel Mouammar Kadhafi"doit quitter le pouvoir immédiatement". Sur le plan militaire, le texte souligne le soutien des 27 pays de l'UE "à la poursuite des préparatifs des alliés de l'Otan et d'autres partenaires en vue d'être prêts à fournir une assistance", y compris avec "une zone d'exclusion aérienne". Enfin, l'Union européenne s'y dit "prête à parler aux nouvelles autorités libyennes" pour aider à la reconstruction du pays. Ce texte traduit donc toujours les divergences et les hésitations au sein de l’UE.
Partant des déclarations des derniers jours sur la gouvernance économique de l’UE, notamment à la Chambre des députés, du Premier ministre Jean-Claude Juncker en vue du sommet de la zone euro du 11 mars, l’on peut résumer sa position en neuf points :