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Protection des consommateurs - Santé
Après trois ans de négociations, la conciliation sur les nouveaux aliments a échoué
29-03-2011


Au terme de trois ans de négociations, la Commission, le Conseil et le Parlement européen ont constaté le 29 mars 2011, à l’occasion d’une ultime réunion de conciliation, leur échec à trouver un accord sur les nouveaux aliments, qui devait permettre de contrôler le clonage animal et la mise sur le marché d’aliments génétiquement modifiés.Gianni PITTELLA et Kartika LIOTARD s'exprimant devant la presse à l'issue de l'échec de la conciliation le 29 mars 2011 	© European Union 2011 PE-EP

En 2008, une enquête Eurobaromètre montrait que 63 % des citoyens européens ne souhaitaient pas consommer de viande issue d'animaux clonés.

La législation européenne, qui date de 1997, stipule que la viande d'animaux clonés doit être soumise à autorisation pour être mise sur le marché. La viande issue de la descendance des animaux clonés est, elle, libre de toute réglementation.

Le Parlement européen voulait interdire la commercialisation, sur le marché européen, de viande d'animaux clonés ou de leurs descendants.

L'Agence européenne de sécurité des aliments n'a mis en lumière aucun risque de santé publique mais les députés s'inquiètent du bien-être animal (de nombreux animaux clonés meurent prématurément ou sont malformés), de questions éthiques ainsi que de la réduction de la diversité génétique et, partant de là, de la résistance aux maladies.

Les Etats membres et la Commission européenne, de leur côté, se disaient favorables à la commercialisation de la viande issue de la progéniture d'animaux clonés.

Les pourparlers ont achoppé sur la question de la traçabilité

C’est finalement sur la question de l’information aux consommateurs qu’ont achoppé les pourparlers, le Parlement européen s’étant montré prêt à faire une concession majeure en proposant d’abandonner l'interdiction de mise sur le marché contre un étiquetage des produits dérivés d'animaux clonés.

Le Parlement exigeait une traçabilité très poussée pour informer les consommateurs de toute trace de viande issue de bête clonée en remontant à plusieurs générations.

L'Union européenne, qui ne produit pas de viande clonée, importe chaque année entre 300.000 et 500.000 tonnes de viande bovine destinées à la consommation. Une bonne partie vient des Etats-Unis et d'Argentine, pays qui ont autorisé eux le clonage à des fins commerciales, mais n'ont aucun système de traçabilité.

"La viande de bœuf en provenance de ces pays peut être issue d'animaux clonés, mais il est impossible de le vérifier" aujourd'hui, a souligné la Commission.

Un étiquetage très poussé, réclamé par le Parlement européen, aurait imposé à ces pays des contrôles qu'ils ne veulent pas réaliser et l'Union européenne aurait été obligée de bloquer les importations, au risque d'une nouvelle guerre commerciale similaire à celle provoquée par l'interdiction jadis du bœuf aux hormones américain.

"Nous avons fait un effort énorme pour arriver à un compromis mais nous n'étions pas prêts à trahir les droits des consommateurs", ont expliqué le président de la délégation du Parlement Gianni Pittella (Socialistes et démocrates) et le rapporteur Kartika Liotard (Gauche unitaire), affirmant que "l'étiquetage de tous les produits alimentaires issus de la descendance des animaux clonés représente un strict minimum".

"Les Etats étaient d'accord pour un étiquetage de la viande fraîche ou congelée de la première génération de descendants de bovins clonés, mais ils refusaient d'étiqueter toutes les denrées", a raconté John Dalli, se demandant "en quoi il est nécessaire d'informer les consommateurs si les scientifiques disent qu'il n'y a pas de problèmes entre la première génération des animaux clonés et les suivantes".

Du côté de la Présidence hongroise, le ministre du Développement rural, Sandor Fazekas, a dénoncé dans un communiqué "la voie de la démagogie" choisie par le Parlement qui a selon lui "tenté de forcer le Conseil à adopter une soi-disant solution trompeuse et inapplicable qui, dans la pratique, aurait exigé de retracer la généalogie de chaque tranche de fromage ou de salami".

Le Conseil a insisté sur sa volonté de "trouver une solution qui pourrait être mise en œuvre  dans la pratique" et qui respecte aussi les règles en matière de commerce international auxquelles l'UE a souscrit, en évitant de provoquer un différend commercial.

Du point de vue du Conseil, "les travaux ont échoué car le Parlement européen n'a pas été en mesure de transiger sur sa demande d'étiquetage obligatoire pour les denrées alimentaires produites à partir de descendants d'animaux clonés, indépendamment de la faisabilité technique et des conséquences pratiques de cet étiquetage obligatoire".

En l'absence d'un accord, l'UE va maintenir le statu quo. La législation de l'UE en vigueur prévoit que les denrées alimentaires issues d'animaux clonés font l'objet d'une autorisation préalable de mise sur le marché. La technique du clonage n'est pas interdite au niveau de l'UE.

La déception s’affiche chez toutes les parties

Pour le Conseil, l'UE a "raté l'occasion d'adopter des règles de l'UE avant que la technologie en matière de clonage prenne encore de l'ampleur".

Le commissaire européen en charge des consommateurs John Dalli s'est dit lui aussi "déçu de cette occasion manquée de codifier le clonage animal".

Du côté du Parlement européen, les négociateurs ont jugé "très frustrant de constater que le Conseil n'a voulu pas écouter l'opinion publique et soutenir les mesures d'urgence nécessaires à la protection du bien-être des consommateurs et des animaux".

L’eurodéputé luxembourgeois Georges Bach (PPE) a aussitôt réagi par voie de communiqué, regrettant l’échec des négociations. "Pour les citoyennes et les citoyens, cela signifie qu’ils vont continuer à trouver sur le marché européen et à consommer, sans le savoir, de la viande provenant d’animaux clonés", déplore Georges Bach avant de préciser cependant que cela ne concerne à ce stade que la viande d’importation dans la mesure où aucun Etat membre ne produit à ce jour de viande clonée.