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Recherche et société de l'information
Un rapport de la Commission passe au crible les systèmes nationaux de recherche et d’innovation
Le Luxembourg vise pour 2020 un objectif "ambitieux mais réaliste" en termes d’intensité de la R&D
09-06-2011


Tous les deux ans, le rapport sur la compétitivité de l'Union de l'innovation – qui couvre les 27 États membres de l'Union et six pays associés – doit étayer la stratégie Europe 2020 en fournissant une analyse statistique et économique approfondie des principales caractéristiques d'un système efficace de recherche et d'innovation. La Commission européenne a présenté le 9 juin 2011 la première édition de ce rapport, qui remplace l'ancien rapport sur la science, la technologie et la compétitivité.La couverture du rapport 2011 sur la compétitivité de l'Union de l'innovation

Le rapport analyse les points forts et les points faibles des systèmes nationaux de recherche et d'innovation et fournit des données factuelles solides sur lesquelles fonder les orientations politiques nationales. Il repose sur le tableau de bord de l'Union de l'innovation et comprend une fiche détaillant les performances de chaque pays en matière de recherche et d'innovation.

Il ressort du rapport 2011 de la Commission sur la compétitivité de l'Union de l'innovation que, si l'on veut que la stratégie Europe 2020 engendre une croissance intelligente et durable, les performances de l'UE en matière d'innovation doivent être grandement améliorées dans de nombreux domaines.

L'Europe nécessite des investissements plus importants et plus "intelligents" dans la recherche et développement (R&D) sur fonds publics et privés. Cela favoriserait non seulement la croissance à moyen terme, mais produirait aussi un effet contracyclique en temps de crise. Il faudrait aussi développer la coopération scientifique au sein de l'UE et au niveau international et mieux utiliser les résultats de la recherche, notamment à l'aide d'un régime de propriété intellectuelle plus efficace.

Les systèmes éducatifs doivent être adaptés aux besoins d'innovation des entreprises et les PME innovantes à croissance rapide doivent être davantage encouragées. Un effort conjoint s'impose pour exploiter les résultats prometteurs de l'Europe en matière d'innovation afin de relever les défis mondiaux comme le changement climatique. Enfin, il convient de réduire les inégalités entre hommes et femmes dans le domaine des sciences et de la recherche.

Principales conclusions du rapport

L'Europe doit investir plus rapidement dans la recherche et l'innovation. L'UE progresse lentement vers son objectif consistant à investir 3 % du PIB dans la R&D (2,01 % en 2009), mais l'écart avec les principaux concurrents se creuse, notamment à cause d'un niveau plus faible d'investissement de la part des entreprises. En 2008, 24 % des dépenses mondiales de R&D étaient effectuées dans l'UE (contre 29 % en 1995). Relativement au PIB, les entreprises investissent deux fois plus au Japon ou en Corée du Sud qu'en Europe.

En période de crise économique, les investissements cumulés dans la recherche et l'innovation ont un effet contracyclique. Les pays qui ont augmenté leurs investissements dans la recherche et l'innovation ont de meilleures perspectives pour sortir de la crise. Dix-sept États membres ont pu maintenir ou augmenter leur budget de R&D en 2009 et seize en 2010.

Les investissements dans l'innovation doivent être plus "intelligents". Ceux qui réussissent le mieux en matière d'innovation ont concentré leurs investissements sur une stratégie de spécialisation intelligente combinant des politiques de l'offre (subventions publiques à l'enseignement supérieur, R&D d'entreprise, capital-risque et infrastructures scientifiques et technologiques) et des politiques de la demande (marchés publics de produits innovants, normalisation en fonction des performances et réglementation des marchés de produits favorable à la concurrence).

La formation d'une main-d'œuvre hautement qualifiée doit répondre aux besoins des entreprises. Seulement 46 % des chercheurs de l'UE travaillent en entreprise (contre 80 % aux États-Unis). Les États membres devraient adapter leur système éducatif pour accroître cette proportion tout en veillant à mieux répondre aux besoins des entreprises.

L'intégration et l'internationalisation des activités de recherche assurent un rendement plus élevé des investissements. L'internationalisation et le développement efficace de l'excellence scientifique se renforcent mutuellement. Les flux de connaissances (étudiants, copublications, coopération en matière de cobrevetage) à l'intérieur de l'Europe sont un atout majeur et ils s'intensifieront une fois achevé l'Espace européen de la recherche. Toutefois, ils sont encore concentrés dans quelques pays d'Europe occidentale.

Sans encadrement solide, les connaissances ne peuvent être transformées en produits et services commercialisables. L'Europe prend du retard sur le terrain de l'exploitation des résultats de la recherche. Alors que l'UE est le premier producteur mondial de publications scientifiques revues par des pairs (29 % en 2009), le nombre de demandes de brevet, au titre du Traité de coopération en matière de brevets, augmente presque deux fois plus au Japon et en Corée du Sud que dans l'UE. Et la moitié des États membres ne déposent aucun brevet de haute technologie à l'Office européen des brevets. De nouvelles mesures s'imposent pour assurer une protection et une gestion plus rentables de la propriété intellectuelle et le brevet UE, faisant actuellement l'objet de négociations, marquera une étape importante à cet égard.

L'Europe a un fort potentiel en matière d'innovations techniques répondant aux problèmes de société. En 2007, l'UE a déposé 40 % des brevets concernant les technologies relatives au changement climatique. Cela montre que des investissements ciblés dans des activités de recherche et de démonstration sur des sujets importants, combinés à des mesures de soutien du développement commercial, peuvent être à l'origine de nouvelles technologies et d'innovations. Tel est l'esprit des partenariats d'innovation européens lancés au titre de l'Union de l'innovation.

Nous avons besoin de PME innovantes à croissance rapide. L'UE doit rattraper les États-Unis en matière d'intensité de recherche des secteurs de haute technologie et de moyenne à haute technologie. En d'autres termes, elle doit procéder à des changements structurels tant à l'intérieur des secteurs qu'entre les secteurs. Certains pays européens, comme l'Autriche et le Danemark, ont opéré une transition structurelle vers une économie à plus forte intensité cognitive et nombre d'entre eux se sont aussi mieux remis de la crise économique. Un tel succès s'explique à chaque fois par l'existence de PME innovantes à croissance rapide, qui jouissent d'une excellence scientifique en matière de recherche publique ainsi que de conditions générales favorisant le passage des nouvelles connaissances vers le marché.

L’objectif que s’est fixé le gouvernement luxembourgeois en termes d’intensité de la recherche pour 2020 est ambitieux, mais réaliste

Au Luxembourg, l’intensité de la R&D n’a cessé de fluctuer tout au long de la dernière décennie : elle est ainsi passée de 1,65 % en 2000 à 1,56 % en 2005, pour remonter ensuite à 1,66 % en 2006. Elle est redescendue à 1,56 % en 2008 pour atteindre 1,68 % en 2009. Des fluctuations qui, selon les auteurs du rapport, sont le reflet des fluctuations de l’intensité de la R&D dans le secteur privé sur la même période. En effet, la hausse de l’intensité en R&D, bien qu’elle reste relativement basse, a augmenté de façon constante, passant de 0,12 % en 2000 à 0,44 % en 2009.

La crise économique n’a pas entraîné de coupes dans les dépenses publiques en R&D, le budget nominal de la R&D ayant même augmenté. C’est une preuve pour les auteurs du rapport que le Luxembourg considère la R&D comme une priorité et comme un moyen d’assurer une reprise rapide et une croissance économique à long terme.

Les auteurs du rapport jugent dans ce contexte que le Luxembourg s’est fixé en termes d’intensité de la recherche, avec un objectif de 2,6 % du PIB en 2020, un objectif ambitieux, mais réaliste. Le secteur privé contribuerait à hauteur de 70 %, soit 1,8 - 1,9 % du PIB, et le secteur public à hauteur de 30 %, soit 0,7 - 0,8 %.

Les forces et les faiblesses du Luxembourg

Les performances du Luxembourg en matière de recherche et d’innovation montrent des forces et des faiblesses.

Ainsi, le Luxembourg est au-dessus de la moyenne européenne pour ce qui est de la part des revenus issus des brevets étrangers, des publications scientifiques et des licences dans le PIB, ainsi que pour ce qui est de l’emploi dans des activités à haute intensité de connaissance. De plus, bien que le système d’enseignement supérieur luxembourgeois produise, par rapport à sa population âgée de 25 à 34 ans, moins de titulaires d’un doctorat que la moyenne, le pays est aussi au-dessus de la moyenne européenne pour ce qui est du nombre de chercheurs employés.

Mais le fait que l’intensité de la recherche est en-deçà de la moyenne européenne, qui s’explique en raison d’investissements publics en matière de recherche qui restent, proportionnellement au PIB, en dessous de la moyenne européenne, a aussi pour conséquence que la créativité technologique du pays est elle aussi en-dessous de la moyenne. Sans compter que la contribution de biens manufacturés de haute et moyenne technologie à la balance commerciale est elle aussi en-dessous de la moyenne européenne. Les auteurs du rapport expliquent cela essentiellement par la structure de l’économie luxembourgeoise, qui est très largement basée sur le secteur financier et les services.

Le rapport fait état des progrès réalisés sur plusieurs fronts pendant les dix dernières années, en termes d’investissements publics, de performance de haute qualité scientifique, laquelle est mesurée par le nombre de publications à fort impact, et de transition vers une économie plus basée sur la connaissance. Cependant, ils observent aussi le déclin, pendant la même période, des investissements privés en R&D et de la créativité technologique de l’économie, qui se mesure elle par les dépôts de brevets internationaux.

Le secteur privé garde la part du lion dans la R&D du Grand-Duché, et pourtant le Luxembourg est en-dessous de la moyenne européenne en termes d’intensité de la R&D privée. C’est sans compter le contexte de ralentissement économique et financier qui peut continuer à affecter les investissements privés en R&D.

A la mi-mars 2011, 94 acteurs du Luxembourg, dont 13 PME, participaient à 87 projets de recherche co-financés par l’UE dans le cadre du FP7 : la contribution revenant au Luxembourg était de 19,21 millions d’euros

Les auteurs du rapport soulignent que la petite taille de l’économie luxembourgeoise se reflète logiquement dans les collaborations scientifiques du Grand-Duché. Pourtant, ils relèvent que, malgré un nombre plus grand que la moyenne de co-publications scientifiques internationales, les scores du Luxembourg en matière de participation à la recherche européenne sont moins bons que ceux d’autres économies petites et ouvertes.

Les principaux partenaires scientifiques du Grand-Duché sont situés dans les trois pays voisins du Luxembourg, Allemagne, Belgique et France étant suivies par le Royaume-Uni, la Suède, l’Italie, la Suisse et l’Autriche.

En termes de co-inventions de brevets, le Luxembourg affiche un score très bas, malgré le caractère incitatif de la récente taxe sur la propriété intellectuelle qui permet notamment, depuis janvier 2008, de bénéficier d’une exonération d’impôts sur 80 % des revenus de la propriété intellectuelle.

Reflet là-encore de la taille du pays, le nombre de brevets est bas. Les principaux partenaires technologiques sont basés en France et en Suisse, et, dans une moindre mesure, en Autriche.

Dans le cadre du FP7, le Luxembourg avait déposé, à la mi-mars 2011, 444 propositions éligibles impliquant 515 demandeurs du Luxembourg qui demandaient des contributions européennes de l’ordre de 144,43 millions d’euros. En termes de nombre de demandeurs, le Luxembourg est 27e, et 26e pour ce qui est de la contribution financière demandée.

Avec 88 propositions qui ont été retenues pour être financées, impliquant 96 demandeurs du Luxembourg qui demandaient un montant de 16,36 millions d’euros, le taux de réussite des demandeurs luxembourgeois est de 18,6 %, et ce alors que la moyenne dans l’UE est de 21,6 %. De même, le taux de réussite en termes de contribution financière est-il lui aussi en-dessous de la moyenne : 11,3 % contre 20,7 % dans l’UE. Le Luxembourg est donc classé en 21e et respectivement 22e position pour ces deux taux de réussite.

Tout compte fait, à la mi-mars 2011, le Luxembourg participait donc à 87 projets de recherche cofinancés impliquant en tout 1836 participants, dont 94 (6,78 %) étaient des acteurs luxembourgeois, et qui bénéficient en tout de 368,59 millions d’euros de contribution de l’UE, dont 19,21 millions d’euros (5,21 %) reviennent aux participants du Grand-Duché.

Pour ce qui est des PME du Grand-Duché, elles ont été 178 à demander une contribution à hauteur de 44,43 millions d’euros. 29 d’entre elles ont pu obtenir en tout 5,42 millions d’euros. Le taux de réussite des PME luxembourgeoises est ainsi en-dessous de la moyenne européenne, tant pour les demandeurs que pour les financements demandés.

Finalement, les PME luxembourgeoises qui ont signé une convention de subvention dans le cadre du FP7 étaient 13 à la mi-mars 2011, pour un montant de 3,21 millions d’euros. Les PME représentent donc 13,83 % des participants luxembourgeois au FP7, et, bénéficient de 16,69 % de la contribution financière perçue au Luxembourg dans le cadre du FP7.