Le 23 novembre 2011, les députés de la commission juridique se sont réunis à la Chambre pour discuter de l’exercice de la profession d’avocat. Une réunion convoquée à la demande du ministre François Biltgen car le gouvernement dispose de quelques semaines encore pour répondre à la Commission européenne sur la question des langues requises pour exercer la profession d’avocat au Luxembourg. Une procédure d’infraction a en effet été engagée contre le Luxembourg, l’article 10 de la directive 98/5/CE concernant le droit d’établissement des avocats n’étant selon la Commission pas respecté par le Grand-Duché.
"Un avocat doit-il connaître le luxembourgeois s’il pratique au Luxembourg? Oui et non. Dans son intérêt et surtout dans celui de ses clients, il paraît normal qu’il connaisse les trois langues administratives pratiquées quotidiennement. Mais la Commission européenne estime qu’il serait suffisant qu’un avocat établi au Luxembourg sache l’une d’entre elles, dont notamment le français. L’examen que les avocats doivent passer pour prouver leurs connaissances linguistiques en luxembourgeois, allemand et français lui déplaît fortement." C’est ainsi que la Chambre des députés résume le problème.
C’est un avocat espagnol qui a fait démarrer la procédure. Etabli depuis 3 ans au Grand-Duché et ayant exercé sa profession au Luxembourg sous son titre professionnel d’origine (inscrit sur la liste IV du tableau des avocats), il avait demandé son inscription sur la liste I. N’ayant pas réussi à l’examen linguistique faute de connaissance suffisantes en allemand et en luxembourgeois, il s’est plaint auprès des instances communautaires.
Le Luxembourg fait valoir que la maîtrise des trois langues administratives est exigée par la loi du 10 août 1991 et que les situations usuelles devant les juridictions nécessitent la maîtrise des trois langues. La Commission européenne estime qu’au bout de trois ans d’activité effective et régulière au Luxembourg, un avocat a suffisamment prouvé sa capacité professionnelle et juge "disproportionnée" l’exigence de la connaissance des trois langues administratives comme condition d’inscription au tableau I des avocats.
Au cours de la réunion, le Bâtonnier de l’ordre des avocats du Barreau de Luxembourg, Guy Harles, s’est exprimé en faveur de la connaissance des trois langues administratives. Il a également estimé que la condition ne doit pas devenir un argument d’exclusion envers les avocats qui souhaitent s’établir au Luxembourg.
Le Ministre de la Justice, pour sa part, s’est refusé à l’idée de laisser tomber le luxembourgeois. Cette langue est de plus en plus considérée comme le véhicule de communication par excellence de toute la population, indépendamment des origines des différents individus, affirme-t-il en effet.
Les députés devraient définitivement se prononcer au cours du débat sur le projet de loi 5660B concernant l’exercice de la profession d’avocat sous forme d’une personne morale, qui est prévu pour le 15 décembre 2011. Ce projet de loi entend en effet "assurer la conformité du droit luxembourgeois avec les exigences de la directive 98/5/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 visant à faciliter l’exercice permanent de la profession d’avocat dans un Etat membre autre que celui où la qualification a été acquise, transposée par une loi du 13 novembre 2002, ainsi que cette directive a été interprétée par la Cour de Justice des Communautés européennes dans son arrêt du 19 septembre 2006 (affaire C-193/05)".