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Opinion
L’Eurobaromètre 76 révèle une UE morose, sous le choc de la crise, avec des citoyens qui ont de moins en moins confiance dans leurs institutions et sont pessimistes pour l’avenir
09-01-2012


eurobarometre-76La Commission européenne a publié fin décembre 2011 les premiers résultats de l’Eurobaromètre standard 76. Cette enquête a été menée dans les 27 Etats membres de l’UE, les cinq pays candidats et la communauté turque chypriote entre le 5 et le 20 novembre 2011, à un moment où les sujets liés à l’UE étaient souvent traités en une par les médias. Les prévisions de croissance venaient d’être révisées à la baisse, les Conseils européens des 23 et 26 octobre consacrés à la crise des dettes souveraines et à la Grèce venaient de s’achever, le sommet du G20 venait tout juste de se tenir à Cannes, et la période était marquée les réunions d’urgence consacrées aux péripéties de la crise gouvernementale en Grèce, où la création d’un gouvernement d’union nationale s’annonçait, tandis que la campagne électorale battait son plein en Espagne.

Le rapport se concentre sur quatre points :

  1. la perception de la situation économique actuelle par les Européens;
  2. les préoccupations et attentes des Européens pour les 12 mois à venir;
  3. les questions liées à l’euro et à la crise;
  4. la perception et l’évaluation des institutions politiques nationales et européennes par les personnes interrogées.

Un grand nombre de questions ont déjà été posées lors d’enquêtes Eurobaromètre précédentes, ce qui permet de dégager des tendances – souvent divergentes - qui dominent les différentes opinions publiques nationales, notamment sur les sujets économiques.

La contribution d’Europaforum.lu se concentrera sur le Luxembourg et ses voisins dans le concert de l’Union, ainsi que pour certains points significatifs sur le Portugal, pays source d’immigration pour le Luxembourg. 

Satisfaits de la vie qu’ils mènent

Il ressort de l’enquête que les résidents du Luxembourg sont à 95 % satisfaits de la vie qu’ils mènent, par rapport à 75 % des citoyens de l’UE, dépassés en cela seulement par les Danois et les Suédois. Au Portugal par contre, seulement 44 % des résidents sont satisfaits de la vie qu’ils mènent, un chiffre bas qui continue de baisser depuis l’année dernière. Et dans ce Luxembourg où les gens sont parmi les plus satisfaits, l’on parle plus que jamais de politique nationale (77 %, une hausse de 11 %, contre 73 % dans l’UE), de politique européenne (73 % une hausse de 6 points, contre 59 % dans l’UE), voire de politique locale (70 %, + 5%). En un mot, l’indice d’intérêt pour la politique est passé de 55 à 65 points (59 points dans l’UE).      

Les Européens et la situation actuelle de l’économie européenne

Les Européens ne sont que 18 % (une baisse de 12 points) à penser que la situation économique européenne est bonne et 77 % à penser qu’elle est mauvaise, un plus de 16 points. Parmi les voisins du Luxembourg, seuls les Français sont encore plus pessimistes que le reste de l’UE, avec 83 % (+ 16) à penser que les choses vont mal, tandis que les Luxembourgeois sont 71 à pencher dans ce sens, un plus notable de 17 %. Quant à la situation économique mondiale, les Luxembourgeois sont encore plus pessimistes que le reste des Européens (83 % contre 77 %).  

Comment les Européens voient leur propre situation actuellement

En gros, les personnes interrogées dans l’UE voient dans leur situation professionnelle (jugée bonne par 51 %, une baisse de 4 %) et la situation financière de leur ménage (jugée bonne par 61 %, une baisse de 4 % aussi) un déclin léger, mais continu. Au Luxembourg, 71 % des personnes interrogées estiment toujours bonne leur situation professionnelle, une baisse néanmoins de 3 %, et 87 % (seulement un  point en baisse) jugent bonne la situation financière de leur ménage, en quoi ils ne sont dépassés que par les résidents des pays nordiques. En France, qui fait exception parmi ses voisins, 48 % (- 5) des personnes seulement pensent que leur situation professionnelle est bonne. Au Portugal, l’on broie du noir avec des évaluations positives de 37 % pour la situation professionnelle et 35 % seulement pour la situation financière du ménage.      

La situation économique actuelle au niveau national

Si plus des trois quarts de la population en Suède, au Luxembourg et en Allemagne considèrent que la situation économique est bonne, moins de 5 % partagent ce point de vue en Grèce, en Irlande et en Espagne, et ils ne sont que 7 % au Portugal et 12 % en France. D’une manière générale, au cours des six derniers mois, le nombre de personnes jugeant bonne la situation actuelle de leur économie nationale a encore baissé (28 %, -2), tandis que le nombre de celles qui pensent qu'elle est mauvaise a encore augmenté (71 %, +3).

Le chômage inquiète profondément 78 % des citoyens européens, un plus de 4 %. Le Luxembourg et l’Allemagne se différencient ici avec les Pays-Bas du reste de l’Europe avec des valeurs de respectivement 36, 37 et 39 % seulement de personnes jugeant la situation mauvaise. Les personnes interrogées en France et au Portugal par contre broient du noir avec 94 respectivement 95 % de personnes qui jugent la situation mauvaise.

Et dans les douze mois à venir ?

Malgré ces préoccupations, les Européens ne sont pas convaincus dans leur majorité (56 %, -1) que leur vie va subir en général des changements dans l’année à venir. Mais le nombre de ceux qui pensent qu’elle va s’améliorer est tombé de 26 à 21 %, tandis le nombre de ceux qui pensent que leur vie va généralement être moins bonne est passée de 14 à 20 %. La chute des attentes positives est marquée en Belgique (de 33 à 23 %), en Allemagne (de 21 à 16 %), en France (de 33 à 27 %), ainsi qu’au Luxembourg (de 28 % à 21 %) ou au Portugal (de 12 à 6 %), où 50 % des personnes pensent que la situation sera moins bonne, un record avec la Grèce (61 %). Au Luxembourg et en Allemagne, on mise avec 65- respectivement 71 %, sur une absence de changements, mais en Belgique et en France, cet espoir est en-deçà des moyennes européennes avec 53 respectivement 50 % des opinions.

Le nombre d’Européens qui pensent néanmoins que la situation économique de leur pays va se dégrader dans les prochains douze mois est passé de 28 à 44 %, une hausse de 16 points qui est significative. Au Luxembourg, ce chiffre est passé de 21 à 39 %, et le nombre de ceux qui croient que rien ne changera (45 %, - 3) s’effrite, même si cette tendance est moins forte que dans le reste de l’Europe (36 %, - 8). L’Allemagne, un autre pays qui a été encore moins marqué jusque là par la crise que le Luxembourg, affiche un pourcentage égal, mais une augmentation plus forte encore des craintes (+ 24). La France, sujette à une embellie au printemps, voit le nombre de pessimistes économiques passer de 24 à 46 %, tandis que la Belgique passe de 25 à 49 %. Quant au Portugal, 72 % des personnes interrogées (+ 9) sont pessimistes.

Ce qui vaut pour la vision du futur économique de leur pays ne vaut pas forcément pour la vision qu’ont les personnes interrogées pour l’avenir de la situation financière de leur propre ménage. Comme pour leur vie en général, les Européens pensent à 56 % (- 4) qu’ici, rien ne va changer. Mais le nombre des pessimistes est passé de 16 à 24 %. De nouveau, les Luxembourgeois et les Allemands pensent à 72, respectivement 71 %, que rien ne va changer, et ils sont les champions dans leur catégorie. Le nombre des pessimistes y est de 9, respectivement de 15 %. En France, où l’on est à la veille des présidentielles, un quart des personnes sont optimistes, un chiffre très fort en Europe, un quart pense que la situation va se dégrader (+ 13) et la moitié des citoyens seulement croit que rien ne va changer. Au Portugal, le pessimisme est à 57 %, le deuxième chiffre plus élevé après la Grèce (67 %).  

Quant à l’évolution de l’emploi dans les douze mois à venir, le pessimisme prime en Europe avec 46 %, un plus sensible de 16 points. Ici, le Luxembourg, qui compte de nombreux salariés venus de tous les horizons européens voire du globe, se départit de l’Allemagne, avec 47 % de pessimistes, une hausse de 19 points, contre, outre-Moselle, 34 %, une hausse de 17 points néanmoins. La Belgique, la France broient du noir avec une majorité de pessimistes, et au Portugal, ce sont carrément 75 % des personnes interrogées qui sont pessimistes en termes d’emploi.

Mais le chômage, c’est les autres, car lorsqu’il s’agit de voir sa propre situation, les Européens ne sont plus que 13 % (+ 3) à être pessimistes pour eux-mêmes. 59 % (- 1) croient qu’il n’y aura pas de changement dans leur situation professionnelle. Luxembourgeois, Belges et Allemands penchent aussi dans cette direction avec plus de 65 %, tandis que les Français sont avec 52 % moins nombreux à ne pas envisager de changements, peu nombreux aussi à être pessimistes (7 %), mais très nombreux à ne pas avoir d’avis (20 %), ce qui exprime un grand désarroi. Restent les Portugais, parmi les champions du pessimisme pour eux-mêmes en termes d’emploi (33 %, + 8) ou à ne pas savoir quoi répondre (28 %).         

Et le futur économique de l’UE ? Ici l’opinion majoritaire selon laquelle la situation sera moins bonne d’ici douze mois est la même que pour la vision que les citoyens ont du futur économique de leur pays : 44 %, une hausse sensible de 19 points. De nouveau, Luxembourgeois et Allemands vont de pair, avec une vision plus pessimiste pour l’UE que pour leur propre pays de 57 % (+ 13) respectivement de 52 % (+ 17). Français et Belges font peu de différence entre le futur de la situation économique dans leur pays et dans l’UE. Et les Portugais sont désormais 62 % (+ 21), à croire que cela ira encore plus mal en Europe.     

Les problèmes les plus importants à affronter dans les pays et par tout un chacun

L’opinion moyenne des Européens pour dire quels sont les deux problèmes les plus importants auxquels doit faire face leur pays est clairement tranchée : la situation économique (46 %, + 13) et le chômage (45 %, + 3), suivis de l’inflation (27 %).  Mais les résultats pour le Luxembourg reflètent des opinions moins tranchées qui le différencient de ses voisins.

Le chômage arrive en premier avec 34 %, (+ 3). La situation économique suit avec 26 % (+ 10). Mais tout cela est bien en-deçà des inquiétudes des autres Européens. Le système éducatif par exemple préoccupe avec 25 % (+ 7) plus les Luxembourgeois que les citoyens des autres pays (avec une moyenne européenne de 7 % en diminution), et plus que l’inflation (24 %, - 4), alors que l’inflation y est particulièrement importante. L’immigration est également un sujet important (21 %, - 1) par rapport aux 7 % dans l’UE (– 5). Ici, le Luxembourg fait largement exception avec la Belgique et la Suède, deux autres pays qui sont fortement confrontés avec l’immigration en provenance des Balkans occidentaux. Finalement, et c’est là une autre exception européenne, le logement - particulièrement cher au Luxembourg - figure en bonne place avec 20 % (contre 4 % dans l’UE), même si ce chiffre a diminué au Luxembourg de 5 points.

Mais cet avis des citoyens européens sur les problèmes que doit affronter leur pays n’est pas identique à celui sur les problèmes les plus importants qu’ils doivent affronter eux-mêmes. Ici, c’est l’inflation qui prime (45 %, - 1), puis la situation économique (27 %, + 5), et ensuite seulement le chômage (19 %), par ailleurs des chiffres plutôt stables par rapport au sondage précédent. Chez les Luxembourgeois, le système éducatif arrive ici en deuxième position avec 16 %, et l’immigration joue un rôle marginal (5 %, + 1).

Quant aux deux problèmes principaux que doit affronter l’UE, les citoyens européens placent en tête la situation économique avec 59 % (+ 16), et ensuite l’état des finances publiques des Etats membres, avec 31 % (+ 9). Détail intéressant : quand il était question de leur propre pays, ce problème n’a été relevé en moyenne que par 17 % seulement des citoyens européens, et chose étonnante, par 19 % seulement des Grecs, alors que c’est le problème qui affecte le plus le pays, alors que 40 % des Allemands accordent une très grande importance à ce problème dans leur pays et aucune les Luxembourgeois avec seulement 5 %. Mais quand il s’agit de regarder le problème de la dette publique au niveau de l’UE, le Luxembourg se retrouve dans la moyenne européenne, la Grèce en-dessous avec 30 %, et l’Allemagne amplifie encore ses craintes avec un chiffre record de 57 %.      

Vers où vont les pays et l’UE, dans la bonne ou la mauvaise direction?  

En gros, les Européens pensent que "les choses vont dans la mauvaise direction" à 58 % dans leur pays. Avec seulement 30 % de personnes interrogées à penser ainsi, et 46 % qui pensent que les choses vont dans la bonne direction, le Luxembourg est avec la Suède (52 %) et l’Estonie (36 %) un des rares pays où la balance est positive. Les Belges (61 %) et les Français (70 %) sont négatifs, les Allemands sont partagés (33 % positifs contre 35 % négatifs).

Pour l’UE, les choses vont dans la mauvaise direction pour 55 % des Européens, la hausse atteignant là 15 points. Alors qu’ils sont plutôt optimistes pour leur pays, les Luxembourgeois sont très négatifs pour l’UE (63 %), et cela vaut aussi pour les autres voisins, même si le pessimisme des Allemands est plus modéré avec 46 %.    

La confiance dans les institutions politiques nationales

Les partis politiques n’inspirent pas trop confiance aux citoyens européens. Ils ne sont que 14 % (- 1) à avoir confiance, contre 81 % qui n’accordent pas leur confiance aux partis. Cette confiance est encore plus basse en France (9 %), alors que la Belgique et l’Allemagne sont dans la moyenne européenne. Au Luxembourg par contre, 31 % (- 4) des citoyens continuent de faire confiance aux partis politiques, même si 63 % (+ 8) s’en distancient. Aux Pays-Bas et au Danemark, les citoyens accordent un peu plus de confiance aux partis politiques.

Les gouvernements des Etats membres ont aussi perdu beaucoup de crédit. Ils sont passés de 32 à 24 % de taux de confiance et 70 de non-confiance. Seuls les citoyens de trois pays accordent majoritairement leur confiance à leur gouvernement, les Finlandais avec 56 %, les Suédois avec 61 % et les Luxembourgeois avec 68 %, ce qui marque cependant une perte de 9 points. 25 % des citoyens luxembourgeois (+ 7) n’accordent plutôt pas leur confiance au gouvernement. Des taux hors du commun malgré la crise. Et ils sont renforcés par la confiance qu’ont les Luxembourgeois dans leurs autorités communales : 71 %, ce qui fait d’eux, et de loin, les champions européens en la matière, la moyenne étant de 45 %. 

Les parlements nationaux, élus au suffrage universel, dépositaires de la souveraineté populaire,  n’ont pas meilleure presse en Europe avec 27 % de confiance seulement (- 6), sauf de nouveau en Suède (71 %, -2), au Danemark (64 %, - 2), en Finlande (58 %, -8), au Luxembourg (56 %, -6) et aux Pays-Bas (50 %, -13).        

Chose remarquable aussi dans ce contexte : dans un pays comme la Hongrie, dont le parlement est dominé à deux tiers par un seul parti, le FIDESZ, qui est en train de s’arroger toutes les prérogatives dans l’Etat, la confiance dans les partis politiques n’est que de 15 %, la défiance de 80 %, la confiance dans le gouvernement est de 26 % (-10), donc aussi basse que la moyenne européenne, et il en est de même de la confiance dans le parlement, 28 % (- 8).

La perception de l’UE et la confiance dans les institutions européennes

L’UE garde 34 % de crédit, mais ce crédit est aussi en baisse, passant de 41 à 34 %. La Commission remarque à ce sujet dans un communiqué que "globalement, les Européens continuent à faire davantage confiance à l'Union européenne (34 %) qu'à leurs gouvernements nationaux (24 %)", mais admet aussi que "les deux résultats enregistrés à cet égard marquent toutefois une baisse sensible (-7 et -8 points de pourcentage, respectivement) par rapport à l'enquête du printemps 2011". Bref, il ne peut s’agir d’opposer de manière compétitive les taux de confiance dans l’UE et les gouvernements. Au Luxembourg, c’est d’ailleurs tout le contraire. Les résidents d’un des pays sièges de l’UE n’accordent plus que 47 % de confiance à l’UE, 5 points en moins, moins que les Danois (50 %, - 2), pourtant réputés eurosceptiques.

L’UE garde une image positive pour 31 % seulement des Européens, un chiffre qui a baissé de  9 points. Pour 26 % (+ 6), elle a une image négative. L’Allemagne s’inscrit dans ce taux et cette baisse. Et le Luxembourg est avec 43 % (- 5) le pays occidental le plus positif, même si avec 20 % (+ 4 ) de réponses négatives, l’image de l’UE s’est néanmoins détériorée dans le pays.

Pour les Européens comme pour les Luxembourgeois, l’UE, c’est personnellement d’abord la liberté de voyager, puis l’euro. En troisième lieu, les Européens évoquent un gaspillage d’argent, tandis que les Luxembourgeois, apparemment sensibles aux discours de leur Premier ministre, citent la paix et une voix plus importante dans le monde.

Mais quand il s’agit d’aborder la confiance que les Européens accordent aux différentes institutions de l’UE, force est de constater que celles-ci s’en sortent mieux que l’UE en tant que telle.

Le Parlement européen, élu au suffrage universel, a la meilleure cote parmi les institutions européennes avec 41 % (- 4). La défiance est passée de 38 à 45 %. Donc meilleure cote, mais inversion de la balance de la confiance, qui était de 45/38 au printemps pour passer à 41/45 à l’automne 2011. Le Parlement européen a néanmoins la cote au Luxembourg, avec 60 % de confiance, et un taux de défiance de 30 % seulement

La Commission, souvent chargée de tous les maux,  se voit accorder un taux de confiance de 36 % (- 4) contre 43 % de défiance (+ 6). Cela veut néanmoins dire que là aussi, la balance entre confiance et défiance s’est inversée, passant d’un rapport 40 % de confiance et 37 % de défiance à un rapport de 36 à 43. Mais au Luxembourg, la Commission a encore la cote la plus haute de l’UE, avec 56 %, suivi par la Belgique qui affiche 55 %. La France et l’Allemagne semblent par contre se détourner lentement mais sûrement avec des taux de confiance de 33 et respectivement 32 %.

Le Conseil, l’institution la moins connue avec 62 % de taux de connaissance, ne recueille par contre que 32 % de confiance (- 4) et 41 % de défiance (+ 6), là aussi un renversement de la balance de confiance. Parmi leurs voisins français et allemands, dont les gouvernements misent tant sur l’intergouvernemental sans pour autant arriver à redresser le taux de confiance accordé au Conseil qui est bas avec 26 % (- 4) en Allemagne et 28 % (- 2) en France, le Luxembourg et la Belgique affichent avec 45 (- 1) et 47 % (- 8) des taux de confiance encore respectables, même s’ils sont fortement en baisse pour la Belgique.

La BCE inspire elle aussi moins de confiance, et là encore, il y a inversion de la balance entre confiance et défiance, avec un rapport de 40/38 qui passé à 36/46, un écart négatif très marqué. Le Luxembourg fait ici exception, avec les pays nordiques et la Belgique, même si le taux de confiance (53 %) est en chute de 8 points. L’Allemagne et la France sont elles très défiantes avec 37 % (-10) et 30 % (-3).

L’adhésion à la monnaie unique

L’euro par contre fait recette. 53 % des citoyens de l’UE sont pour une union économique et monétaire avec une seule monnaie, l’euro. Encore faut-il différencier entre Etats membres de la zone euro, qui sont pour à raison de 68 %, et des pays qui ne sont pas membres de la zone euro, qui ne sont pour qu’à raison de 37 %, avec ici des pays où l’aversion à l’égard de la monnaie unique est clairement marquée et s’accentue, comme le Royaume Uni avec seulement 15 % pour, la République tchèque avec 22 % et la Suède avec 23 % pour, ou encore le Danemark, où l’on est passé de 41 à 29 % pour. Les pays de la zone euro ont leurs enthousiastes, comme les Slovènes avec 81 % et les Luxembourgeois et les Belges avec 80 % de défenseurs de l’euro. La chute de l’adhésion à l’euro a été enrayée en Allemagne, où elle est passée de 63 à 66 %, au Portugal, où elle est passée de 49 % à 54 %, et surprise, en Grèce, où elle est passée de 60 à 75 %. En France par contre, l’euro est passé de 69 à 63 % d’adhésion, en Italie, plus récemment frappée par la crise de la dette souveraine, de 73 à 63 %, et l’adhésion à l’euro chute aussi en Espagne, passant de 69 à 63 %. 

L’adhésion aux politiques de l’UE

A l’exception du Danemark, de la Suède et du Royaume Uni – dont est pourtant ressortissante la Haute Représentante pour la politique extérieure de l’UE –, l’idée d’une politique étrangère commune continue à recueillir 64 % d’adhésion, avec 76 % pour le Luxembourg, 77 % pour la Belgique, 74 % pour l’Allemagne. Seule la France fait ici grise mine, même si c’est moins net  qu’au printemps, avec 60 %. Il en va de même de l’idée d’une politique de sécurité et de défense commune, qui recueille partout dans l’UE une large majorité de suffrages (74 %), même au Royaume Uni. 

L’élargissement est une des politiques les moins populaires dans l’UE. Elle est passée de 42 à 36 % d’adhésion. Une majorité des Européens sont contre avec 53 % (+ 6). Au Luxembourg, par contre, qui compte habituellement parmi les champions d’un refus de l’élargissement, le oui a remonté la pente, passant de 29 à 34 points, tandis que le nom a baissé de 64 à 62 %. Les autres pays dont les citoyens sont fortement opposés à l’élargissement sont les voisins et des partenaires proches du Luxembourg, l’Allemagne (17 % pour, 76 % contre, + 5), la France (23 % pour, - 9, et 71 % contre, + 10), les Pays-Bas, la Belgique, et l’Autriche. Les Britanniques, dont le gouvernement est un grand promoteur de l’élargissement, n’affichent que 29 % d’adhésion, et l’Irlande non plus n’est pas enthousiaste.

Il ressort du sondage que les Européens, à l’exception des Grecs et des Roumains, ne sont cependant pas prêts dans leur majorité (50 %, + 3, contre 33 %, - 3) à accorder des moyens budgétaires supplémentaires à l’UE. Ni le Luxembourg ni ses voisins ne se distinguent ici de cette tendance.

La perception du fonctionnement de la démocratie dans les Etats membres et l’UE

Dans leur majorité, mais pas dans leur large majorité, les Européens sont satisfaits du fonctionnement de la démocratie dans leur pays, avec 52 % d’avis positifs contre 46 % d’avis négatifs. Mais les différences sont grandes entre pays. Les Danois (92 %), les Luxembourgeois (88 %), les Suédois (87 %) et les Finlandais (77 %)  sont les plus satisfaits. Les Allemands sont aussi plus satisfaits que dans des sondages précédents (68 %, + 6). Mais en Europe centrale et orientale, les Slovènes, les Slovaques, les Tchèques, les Bulgares, les Hongrois (pourtant dotés d’un gouvernement qui se base sur plus de deux tiers des sièges au parlement), les Lituaniens et les Roumains sont très peu satisfaits, avec entre 68 et 76 % d’avis négatifs. En Europe du Sud, les démocraties grecque (83 % d’avis négatifs, + 14), italienne (65 % d’avis négatifs, + 14), espagnole (53 % d’avis négatifs) et portugaise (68 % d’avis négatifs) ne convainquent guère les citoyens.

Pour ce qui est du fonctionnement de la démocratie dans l’UE, il y a, comme sur d’autres aspects concernant l’UE, une inversion de tendance. Au printemps 2011, les avis positifs étaient de 50 % et les avis négatifs de 35 %. Fin 2011, 45 % des avis seulement sont positifs, 43 négatifs. Le Luxembourg ne suit pas cette tendance. Ici, l’indice de satisfaction, déjà élevé, est passé de 64 à 68 %. La Belgique va dans le même sens.

Le sondage montre aussi que les citoyens ne sont que 42 % à penser comprendre le fonctionnement de l’UE, une tendance à la baisse.

Quant à savoir si les intérêts de leur pays sont pris en compte dans l’UE, la réponse est très mitigée avec 38 % d’avis positifs, mais 51 % d’avis négatifs, une hausse d’un point. Une tendance qui n’est partagée ni au Luxembourg ni en Belgique ni en Allemagne, trois pays affichant des indices de satisfaction élevés. Mais ce sont bien les seuls : 59 % au Luxembourg (- 6), 53 % en Belgique (- 7), et 53 % en Allemagne, (+ 5).

Mais même les plus europhiles parmi les citoyens de l’UE  passent la main lorsqu’il s’agit de répondre à la question de savoir si leur voix compte dans l’UE. 65 % (+ 3) n’y croient pas, 26 % seulement y croient, mais leur nombre a baissé de 4 points. Seuls les Danois, avec 53 %, pensent que leur voix compte. Reste que la voix de l’UE compte dans le monde selon une majorité des personnes interrogées (64 %).          

La répartition des compétences entre gouvernements des Etats membres et UE

Pas question de déléguer la compétence pour les impôts à l’UE pour 68 % des citoyens européens. Le refus luxembourgeois est parmi les plus fermes (82 %), même s’il a connu une baisse de 4 points.

Sur la lutte contre le chômage, les citoyens donnent aussi la préférence à leurs gouvernements, avec 58 % (+ 2). Le Luxembourg et ses voisins se différencient peu. Les Portugais, mais ils sont ici bien seuls parmi les pays en forte crise, mettent par contre tout leur espoir dans l’UE pour lutter contre le chômage, avec 54 % de réponses positives, un chiffre qui est cependant en nette diminution par rapport au  printemps 2011 (- 8).

Pour les citoyens, les retraites relèvent encore plus que les impôts de la décision prise au niveau national, avec 73 %, un chiffre en hausse de 2 points. Le Luxembourg opte à 83 %, comme l’Allemagne, pour une compétence nationale. Seul le Portugal mise encore sur une compétence européenne.

La sécurité sociale est elle aussi logée à la même enseigne. Il n’empêche que le suivi macroéconomique des Etats membres et les recommandations du Conseil aux gouvernements nationaux touchent directement à ces secteurs.       

Dans le domaine de la sécurité, la lutte contre le terrorisme, qui ne joue qu’un rôle marginal parmi les préoccupations des Européens, 78 % des Européens pensent que les décisions devraient être prises en commun dans l’UE. La même chose vaut, avec 65 % d’avis positifs de tous les Etats membres, sauf les pays neutres que sont la Suède (47 %) et la Finlande (23 %) ou encore l’eurosceptique Royaume-Uni (38 %), pour la défense et la politique étrangère. La politique de l’immigration gagnerait pour 60 % des sondés à être décidée au niveau européen. Le Luxembourg et ses voisins appuient cette tendance à des degrés divers, mais sans faiblesse. Ne sont pas d’accord l’Autriche, la Finlande, la Suède et de nouveau le Royaume Uni.

Les citoyens de tous les Etats membres sont dans leur forte majorité d’accord pour que les questions ayant trait à l’environnement soient sujettes à des décisions européennes.

La PAC a par contre perdu la majorité des suffrages positifs, et l’idée d’une renationalisation des politiques agricoles fait son chemin, avec 46 % des réponses. Ce n’est cependant pas le cas pour le Luxembourg et ses voisins, mais pour le Portugal, il en est ainsi.

Par contre, des décisions en commun sur le soutien aux régions qui ont des difficultés économiques sont souhaitées par une forte majorité de citoyens européens (56 %). Ici, les Français ne voient pas les choses de la même manière, avec une majorité de 49 % qui souhaite contre 47 % que les décisions soient prises au niveau national.    

Pour 51 % des personnes interrogées (contre 44 %), la réduction de la dette publique devrait relever de la compétence nationale. Ici, des comparaisons avec des données antérieures ne sont pas possibles. Les Luxembourgeois et les Belges se rangent dans cette tendance, les Français sont partagés – 49 % se disent pour une décision nationale contre 44 % pour une décision en commun – tandis que les Allemands sont ici clairement en faveur d’une approche européenne (53 % contre 45 %).

Le futur de l’UE

Si, au printemps 2011, 58 % des personnes interrogées étaient encore optimistes pour le futur de l’UE et 36 % pessimistes, les choses sont très différentes à l’automne, où 48 % seulement se disent encore optimistes et 46 % pessimistes. Les Belges (56 %, - 14), les Allemands (50 %, - 6) et les Luxembourgeois (57 %, - 9) sont majoritairement optimistes, mais cet optimisme est fortement entamé. En France par contre, 38 % des personnes (-10) seulement sont encore optimistes pour l’UE, 58 % (+ 11) ne voient plus de futur pour elle. Il en est de même des Portugais.

Pour la très large majorité des personnes interrogées – 68 %, + 21 – la crise est loin d’avoir atteint son apogée, et "le pire est à venir". Les Luxembourgeois sont, avec les Belges, les Français, les Portugais et aussi les Néerlandais, parmi ceux qui expriment les plus fortes craintes dans ce sens dans l’UE.

Au niveau personnel, les personnes interrogées disent pour un tiers d’entre elles qu’elles vivent avec leur ménage au jour le jour, un autre tiers sait ce qu’il va faire dans les six prochains mois et un dernier petit tiers à une vision à long terme de son ménage, des positions qui n’ont pas beaucoup bougé en six mois, contrairement aux appréciations plus générales sur l’avenir de l’UE. Les Allemands (54 %, + 1) et les Luxembourgeois (52 %, + 6) sont, avec les Finnois (50 %, - 2), les seuls à avoir majoritairement une vision du futur de leur ménage pour les un à deux ans à venir. En France, 38 % disent vivre au jour le jour et au Portugal, les personnes interrogées sont 53 % à dire vivre au jour le jour et 18 % seulement à avoir une vision sur un ou deux ans.

L’UE et la crise

Les citoyens européens interrogés voient l'Union européenne comme une partie de la solution à la crise. Ils continuent à tenir l'Union pour l'acteur le plus efficace, devant les gouvernements nationaux, pour s'attaquer aux effets de la crise économique. L'Union conserve sa première place (23 %, + 1) et est suivie par les gouvernements nationaux (20 %, pourcentage inchangé). Le G20 (16 %, + 2) occupe le troisième rang, devant le Fonds monétaire international (14 %, -1). Au Luxembourg, l’UE a la cote avec 33 %, suivie par le G20, une enceinte qui lui a été rarement favorable, avec 22 % (-2), et seulement 12 % pour le gouvernement national, qui a encore perdu 5 points. Une constellation similaire à celle observée en Allemagne. Une immense majorité des Européens – 89 % - est par ailleurs d’avis que les Etats membres devraient travailler davantage ensemble pour combattre la crise économique et financière.

Le besoin de réformes

88 % des personnes interrogées dans l’UE sont d’avis qu’il faut des réformes, et seulement 8 % pensent qu’il n’en faut pas.  Les Luxembourgeois (69 %, - 8) et les Danois (70 %, -10) sont ceux qui sont les moins nombreux à vouloir des réformes, et leur nombre a même significativement baissé. Le nombre de ceux qui refusent des réformes est passé au Luxembourg de 18 à 23 %. Cela traduit une réticence marquée d’un noyau de la population – presqu’un quart - à l’égard de réformes.

Reste que 84 % des Européens (+ 7) sont pour d’avis que les mesures à prendre pour réduire le déficit public ne peuvent plus être retardées. 76 % des personnes interrogées au Luxembourg penchent également dans ce sens, mais c’est relativement peu. Ils sont les plus nombreux (17 %) à penser que ces réformes pourraient être retardées, autre signe qu’il y a un noyau anti-réforme significatif parmi les résidents du Luxembourg.

40 % des Européens pensent que les mesures à prendre pour réduire le déficit et la dette publics ne sont pas une priorité pour le moment. Ils ne constituent pas une majorité, car 51 % sont plutôt pour, et les positions ici ne bougent que très peu. Mais Belges (61 %, +5), Allemands (53 %, - 4), Français (70 %, + 15) et Luxembourgeois (49 %, - 7) sont en majorité d’avis que le temps n’est pas venu d’agir sur le déficit et la dette.

D’autres politiques économiques et financières

Les Européens sont à quelques nuances près d’avis que ce serait efficace si l’UE jouait un rôle plus important dans la régulation des services financiers, à 71 % contre 18 %. Au Luxembourg, dont l’économie doit beaucoup aux services financiers, le soutien à une telle perspective est marqué, avec 79 % pour et 14 seulement contre. Une coordination plus forte des politiques économiques, ou politiques économiques et financières entre tous les Etats membres de l’UE rencontre toujours un soutien marqué de 75 % (-4), avec le plus fort soutien au Luxembourg (86 %, + 2), au diapason avec ses voisins et principaux partenaires. Les citoyens européens sont aussi en faveur de règles plus sévères en matière d’évasion fiscale et de paradis fiscaux avec 88 % pour, et même s’ils hésitent un peu, les résidents luxembourgeois penchent à 75 % dans ce sens.

Un large accord existe aussi sur l’instauration d’une taxe sur les profits faits par les banques, la règlementation des salaires dans le secteur financier (à titre d’exemple les bonus pour les "traders"), un contrôle des "fonds spéculatifs", une plus grande transparence des marchés financiers, ou des règles plus strictes pour les agences de notation de crédit. La taxe sur les transactions financières est soutenue par 64 % des personnes interrogées dans l’UE. Les Allemands sont les champions d’approbation de son introduction (82 %). Les Luxembourgeois sont dans la moyenne européenne (63 %), les Belges et les Français la soutiennent à hauteur de 69 et 75 %.

Les esprits sont par contre divisés sur les euro-obligations. La question n’a pas reçu de réponses de la part d’un tiers des personnes interrogées. Les Allemands ne veulent pas en entendre parler, avec 26 % pour le chiffre le plus bas de ses partisans, avec 45 % contre, le chiffre le plus élevé de ceux qui n’en veulent pas, et 29 % de personnes sans réponse. Les Belges sont résolument pour, avec 69 %, les Luxembourgeois avec 57 %, les Français sont à 39 % sans réponse, à 45 % pour et 16 % contre.           

En somme, l’Eurobaromètre 76 de l’automne 2011 rend l’image de citoyens de l’Union européenne pessimistes, qui craignent pour l’économie de leur pays, ont peu de confiance dans leur gouvernements et sont moins satisfaits du fonctionnement de leur démocratie, auprès desquels l’image de l’UE s’est détériorée, et ainsi aussi celle de ses institutions. Pourtant, l’euro a toujours la cote.