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Economie, finances et monnaie
Dans une interview accordée au magazine Schweizer Bank, Luc Frieden souligne le rôle important joué par les Etats non membres de l'UE pour résoudre la crise
24-02-2012


schweizer-bank-logoLe magazine suisse Schweizer Bank a interrogé le ministre luxembourgeois des Finances, Luc Frieden, dans le cadre d'un événement organisé par l'agence pour le développement du secteur financier, Luxembourg for finance, à Dubai et à l'occasion duquel il s'est exprimé sur la contribution de la Suisse à la réponse politique et économique à la crise.

Dans cette interview publiée le 24 février 2012, Luc Frieden donne son avis sur le partage des responsabilités que doivent assumer les Etats, qu'ils soient membres de l'Union européenne ou non, et les acteurs privés.

Interrogé en préambule sur la capacité de la zone euro à supporter une sortie contrainte de la Grèce de la monnaie unique, le ministre des Finances rétorque qu'il ne s'agit pas là d'une "hypothèse de travail". Il privilégie une perspective selon laquelle, si chaque pays parvient à observer une discipline budgétaire et à respecter les règles édictées dans la zone euro, la question d'une éventuelle exclusion ne se pose alors pas. D'ailleurs, rappelle-t-il, "une exclusion n'est pas prévue par les traités."

"Un processus long et laborieux"

A la question : "Quelle est la réelle raison de la crise de la dette dans la zone euro?", le ministre des Finances répond laconiquement : "La crise des banques". Prié ensuite d'évoquer la manière de résoudre la crise, il constate que "nous sommes dans une sorte de cercle vicieux", mais que chaque acteur a pour l'heure bien agi : "Les banques devaient être sauvées par les Etats. Les Etats devaient intervenir pour soutenir l'économie réelle et pour établir un programme conjoncturel. Cela a évidemment élevé la montagne de dettes. La solution consiste à ce que nous ayons ces prochaines années davantage de discipline budgétaire et que nous formions un programme qui permette de délester l'économie réelle de la charge qui pèse sur elle." En énonçant cette idée, Luc Frieden ne se fait pas d'illusions sur le défi qu'une telle démarche représente. "Il ne fait aucun doute qu'il s'agit là d'un processus long et laborieux."

"Les Etats et l'économie financière ont chacun joué pleinement leur rôle"

Luc Frieden considère que la crise de la dette doit "être en premier lieu résolue par les Etats". Aux banques revient par contre le rôle d'"augmenter leur capital et de restreindre leurs activités à risque". Luc Frieden souligne qu'il n'y a rien de nouveau à cette attente envers la finance puisque c'est "un impératif pour les banques depuis 2008". "Des décisions ont été prises par les législateurs en ce sens et leur transposition est actuellement en cours."

Le ministre des Finances est satisfait pour l'heure de la réponse à la crise produite par une telle répartition des rôles. "Les Etats aussi bien que l'économie financière ont chacun joué pleinement leur rôle en la matière", a-t-il en effet dit.

Le ministre pense par ailleurs que les partenaires hors de l'Union européenne, ont, "dans le monde très interdépendant" dans lequel nous vivons, un rôle non négligeable à jouer face à ce défi. Or, Luxembourg, en tant que "place financière très internationale", deuxième plus grand centre du monde pour les fonds d'investissements, est "une porte d'entrée vers l'Europe". "Ainsi, si des investisseurs de pays à la croissance rapide, comme par exemple les Etats du Golfe, investissent aussi en Europe, ils apportent leur contribution au développement de la croissance dans l'Union", fait remarquer Frieden.

"L'Europe n'a pas besoin d'aide bilatérale de l'extérieur"

Ainsi, il ne s'agit pas d'attendre des aides extérieures, mais d'attirer des investissements. "L'Europe n'a pas besoin d'aide bilatérale de l'extérieur mais elle a besoin des investisseurs de l'extérieur de l'Union européenne et de la zone euro", tandis qu'"une implication active de tous les Etats dans les efforts du FMI est tout autant nécessaire". Or, pour Luc Frieden, cette dernière est acquise, dès lors que ces partenaires ont un intérêt à ce que l'Europe reste "un continent de la croissance". "Les pays non européens vont participer à l'augmentation des ressources du FMI. (…) Nous avons la communauté internationale à nos côtés à travers le FMI", affirme-t-il en rappelant que la mission de l'institution internationale consiste, à côté du mécanisme européen de solidarité, à "préserver la stabilité internationale".

"Un pays seul ne peut assumer un rôle-clé"

Considérant plus particulièrement le rôle de la Suisse, Luc Frieden ne tarit pas d'éloges sur ce qu'il considère comme "un partenariat unique dans un intérêt réciproque". "La Suisse a également un intérêt à ce que l'Union européenne, son plus grand partenaire commercial, croît et soit stable", observe-t-il avant de confier combien il apprécie la "contribution du conseil fédéral suisse et de la banque nationale suisse, que ce soit auprès du FMI ou aussi par les nombreuses discussions et les nombreuses mesures que la Suisse a prises".

Interrogé enfin par le journaliste suisse sur le poids prépondérant de l'Allemagne dans la résolution de la crise, Luc Frieden rétorque que "chaque Etat joue un rôle important". "Je ne vois pas de position prépondérante et spéciale pour un Etat particulier. Les pays qui, dans la zone euro, ont toujours le triple A, à savoir l'Allemagne, la Finlande, les Pays-Bas et Luxembourg, portent une responsabilité particulière. Un pays ne peut assumer seul un rôle-clé. Nous devons assumer ensemble cette responsabilité et collaborer de manière constructive."