Le 1er février 2012, à Bruxelles, le directeur général de l'Office européen de lutte anti-fraude (OLAF), Giovanni Kessler, a fait part des changements importants, tant dans l'organisation que dans les méthodes de travail, au sein de l'institution chargée de lutter contre le détournement d'argent européen. Ces aménagements sont l'aboutissement d'un diagnostic interne lancé par le directeur général, un mois après son arrivée en février 2011. La nouvelle structure organisationnelle et les nouvelles procédures d'investigation doivent permettre de concentrer les ressources de l'OLAF sur des activités prioritaires et donc d'améliorer son efficacité tout en garantissant la qualité de ses investigations.
Cette nouvelle organisation opère un glissement de personnel de la section administrative, non opérationnelle, vers la section d'investigation, de telle sorte que cette dernière enregistre une augmentation de 30 % de ses effectifs. Le personnel reste inchangé, affichant un total de 503 personnes. A ce redéploiement neutre en termes de personnel s'ajoutent de nouvelles procédures d'investigations qui sont simplifiées tout en maintenant de hauts standards et un respect complet des garanties procédurales.
"En période de difficulté économique, la protection des intérêts financiers de l'Union européenne et les activités de l'OLAF sont plus importantes que jamais. L'OLAF est sur le front dans le combat contre la fraude et la corruption, et nos ambitions élevées reflètent l'implication des institutions européennes pour attaquer ces problèmes", a déclaré Giovanni Kessler; selon le communiqué de presse diffusée à cette occasion. "Avec ces changements, nous raccourcirons la longueur moyenne de nos investigations. La manière dont nous choisissions d'ouvrir ou pas une investigation deviendra plus transparente, étant donné que nous rendons publiques nos priorités d'investigation. Nous nous concentrerons davantage sur les cas les plus importants, surtout ceux où les chances de récupérer de l'argent européen mal employé sont les plus élevées."
Une nouvelle unité a ainsi été créée pour prendre en charge l'évaluation des allégations de fraude. En 2010, 1 000 de ces allégations étaient parvenues à l'OLAF en provenance d'institutions européennes, d'administrations nationales ou de personnes privées. L'Office s'était saisi d'un quart des dossiers. Cette nouvelle unité aura la tache de sélectionner les cas devant faire l'objet d’une enquête au regard de critères cohérents, dont celle du possible recouvrement de l'argent européen. En 2010, l'OLAF avait pu récupérer 67,9 millions d'euros, et un total de 350 millions d'euros pouvait être encore récupéré dans des procédures en cours.
La décision d'ouvrir une enquête devra dorénavant être prise dans un laps de temps bien plus court. En 2010, elle prenait deux mois (pour une durée moyenne d'investigation en 2010 égale à 28 mois). Le but est de la ramener à un seul jour.
Le nouveau service fera aussi la différence entre les cas où la fraude est externe et le cas où des fonctionnaires d'institutions européennes sont impliqués, certaines affaires pouvant être laissées à d'autres institutions. Il s'occupera aussi de contrôles de légalité et de qualité. La protection des droits fondamentaux et les garanties procédurales seront à cet effet renforcées. "La plus haute priorité sera donnée à la protection de l'identité des sources", apprend-on dans le communiqué de presse.
Les activités de politique anti fraude seront pour leur part concentrées au sein dans un directoire, lequel devra participer au renforcement du soutien apporté à la Commission européenne et aux Etats membres, dans la définition de leur politique de prévention et de détection des fraudes.
Cette nouvelle organisation et ces nouvelles procédures d'investigation tiennent compte des avis émis par la Cour des comptes, le Parlement européen, les Etats membres et d'autres parties prenantes. Et si ces modifications tiennent aussi compte des questions soulevées lors des discussions sur la proposition de réforme du règlement N° 1073/1999 du 25 mai 1999 relatif aux enquêtes effectuées par l'Office européen de lutte antifraude, elles ne présument pas des résultats du dialogue à trois entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission, prévient l'OLAF.
Dans sa communication du 24 juin 2011, la Commission faisait savoir que "l'objectif global de cette nouvelle stratégie antifraude (…) est d'améliorer la prévention, la détection et les conditions d'enquête ainsi que d'obtenir une réparation adéquate et d'atteindre un niveau de dissuasion suffisant au moyen de sanctions proportionnées et dissuasives, dans le respect du droit, en introduisant des approches stratégiques antifraude au niveau de chaque service, et en prenant en considération et en clarifiant les responsabilités des différents acteurs."
Enfin, Giovanni Kessler est revenu sur l'enquête menée au sujet des reproches faits au parlementaire autrichien Ernst Strasser. Celle-ci reste pendante. Le chef de l'OLAF a toutefois jugé inadmissible la posture de l'ancien président du Parlement Jerry Buzek qui avait empêché l'enquête de l'OLAF dans le bureau du parlementaire. Une enquête de l'OLAF peut aussi permettre, a-t-il rappelé, de blanchir un parlementaire comme ce fut le cas en juin 2011 pour le parlementaire espagnol, Pablo Zalba.