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Marché intérieur - Politique régionale
Patrick Weiten, président du Conseil général de la Moselle, a plaidé pour une Lorraine dans la Grande Région et l’Union européenne
26-03-2012


Gréng StëftungDans le cadre du projet "Luxembourg et Grande Région 2030", la Gréng Stëftung avait invité le 26 mars 2012 le nouveau ministre de l'Economie, Etienne Schneider, et le président du Conseil général de Moselle, Patrick Weiten à une table ronde.

Le point de départ de cette table-ronde était une déclaration d’Etienne Schneider par laquelle ce dernier avait posé quelques jalons: "Je voudrais me pencher davantage sur la Grande Région et sur l’Europe afin de trouver des investisseurs européens pour le Luxembourg. Je suis en effet convaincu que l’on peut en trouver très près de nous, au lieu d’aller partout dans le monde pour cela. Il y a certainement des possibilités de motiver un peu les entreprises de la Grande Région à venir s’établir ici. Nous avons évidemment des atouts, mais il faut aussi foncer et y aller. Quand on va en Inde ou au Qatar, il faut s’investir. Je préfère personnellement m’investir dans le capital européen". Cette déclaration avait tout naturellement suscité la curiosité de la Gréng Stëftung qui se penche depuis deux ans sur le potentiel de la Grande Région.

Au même moment, le Conseil Général de la Moselle venait d’annoncer l’établissement d’une mégazone commerciale et technologique à d’Illange-Bertrange qui devrait accueillir le premier complexe sino-européen avec 2000 entreprises chinoises qui recherchent à s’établir sur le marché européen. D’où la présence du président du Conseil général de Moselle, Patrick Weiten, qui a été en fin de compte la figure de proue de cette table-ronde, dans la mesure où le ministre s’est dédit au dernier moment.

Patrick Weiten, président du Conseil général de la Moselle, lors de la table-ronde de la Gréng Stëftung du 26 mars 2012Patrick Weiten s’est refusé à parler d’un simple projet chinois dans le département de la Moselle. Pour lui, c’est justement "le paradoxe de la Grande Région" qui fait qu’il est difficile de parler de la France, du Luxembourg, de la Belgique ou de l’Allemagne. Il y a des firmes allemandes qui viennent investir en Moselle à cause d’infrastructures de qualité qui les arrangent, parce qu’elles les rapprochent des grandes capitales par le TGV, l’aéroport de Luxembourg ou encore celui de Francfort. De ce fait, la Lorraine continue à se développer du point de vue industriel et est devenue un site important pour l’industrie automobile, avec des usines d’Opel, d‘Audi, de Smart et de PSA qui établissent de nouvelles lignes de production. Patrick Weiten a très clairement mis en exergue le fait que "les chefs d’entreprise ne tiennent pas compte des frontières".

Le projet de plate-forme sino-européenne est le fruit d’une longue prospection. Sur ce projet se rencontrent la possibilité de mettre à disposition un terrain capable d’abriter 240 000 mètres carrés de surfaces utiles pour 2000 entreprises qui seront là pour répondre à la demande de produits européens des nouvelles classes moyennes chinoises et aussi aux besoins d’exportation de l’industrie chinoise. La plate-forme multimodale est reliée aux transports routiers, ferroviaires, fluviaux et aériens. Le port de Rotterdam atteint par les voies fluviales entre aussi bien en compte que le réseau autoroutier ou le TGV. Les Chinois considèrent et situent l’espace lorrain d’une autre manière que les gens sur place, souligne l’élu départemental. Le projet se greffe aussi sur un savoir-faire industriel sur place. Les Chinois voudront transformer, assembler et produire sur place. Cela créera de nouveaux emplois, 3000 selon les estimations. Bref, le projet, qui implique des investissements de plusieurs centaines de millions d’euros.

Le projet d’Illange aura selon le président du Conseil général de la Moselle des conséquences sur la région. Il y aura de la concurrence et de la complémentarité, par exemple entre Illange-Bertrange et le centre logistique de Bettembourg. Le projet aura aussi un impact considérable sur les infrastructures de la Grande Région à a cause du trafic qui ira vers et partira de la plate-forme sino-européenne, ce qui exigera de part et d’autre des frontières des adaptations et des transformations.

La sidérurgie lorraine et de la Grande Région est par contre un chapitre difficile, car pour Patrick Weiten, "la Grande Région n’est pas la bonne dimension". Il s’agit d’un problème qui touche toute la sidérurgie continentale et qui est lié aux coûts de transports. L’espoir vient d’un projet de R&D expérimental qui est en train d’être envisagé sur des sites de la région pour arriver à renvoyer les émissions de CO2 générées par les usines sidérurgiques dans les nappes souterraines. L’Etat français, l’Union européenne et des investisseurs, dont une vingtaine de compagnies sidérurgiques, sont en train de se mettre d’accord pour financer le projet ULCOS (pour Ultra-Low Carbon dioxide (CO2) Steelmaking), ou "Processus sidérurgiques à très basses émissions de CO2". Il s’agit  d’arriver à réduire de plus de 50 % les émissions de dioxyde de carbone liées à la production d’acier. Si ce procédé devait s’avérer utile, le coût de la production d’acier baisserait sensiblement. 

Mais pour Patrick Weiten, rien ne se fera de manière durable dans la Grande Région sans la création de la Région métropolitaine polycentrique transfrontalière (RMPT) prônée par l’étude Metroborder. Avec la RMPT, la Grande Région entrera dans le concret en suivant de manière structurée ce que les populations vivent d’ores et déjà. Il faudra coopérer et se coordonner sur la mobilité et les transports publics, sur les systèmes de protection sociale et de santé, sur la vie culturelle. Il faudra être transparent, comme lui-même essaie de l’être sur Cattenom, sans marcher sur les platebandes de l’Etat français. Et il faudrait peut-être cesser de se faire une "concurrence déloyale » sur le marché du travail en acceptant dans la Grande Région « une harmonisation du droit", une notion très générale que l’intervenant n’a pas approfondie.

A quel point les économies et la situation des personnes sont, de part et d’autre de la frontière, interdépendantes, Patrick Weiten l’a souligné en parlant de la paupérisation d’une partie de la population lorraine qui n’arrive pas à trouver sa place sur le marché du travail et qui profite de manière conjoncturelle de la demande d’intérimaires au Luxembourg. Cette population, pour laquelle le département est responsable de l’aide sociale, a fortement augmenté depuis que les emplois intérimaires ont régressé au Luxembourg. Bref, la crise fait des victimes partout dans la Grande Région.