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Droits fondamentaux, lutte contre la discrimination
Dans son 2e rapport annuel sur la mise en œuvre de la Charte des droits fondamentaux de l’UE, la Commission européenne jauge son impact et essaie de dissiper les malentendus sur les cas auxquels elle s’applique
16-04-2012


Droits fondamentaux - source: CommissionLe 16 avril 2012, la Commission européenne a publié le deuxième rapport annuel sur la mise en œuvre de la Charte des droits fondamentaux en 2011, une charte devenue légalement contraignante depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne.

Ce rapport constate "que les préoccupations liées aux droits fondamentaux sont de plus en plus intégrées dans l'élaboration de la politique de l'Union".

Le rapport adopté fait partie, dit un communiqué, "des efforts de la Commission pour sensibiliser les citoyens à l’existence de la Charte, aux cas dans lesquels elle s'applique, et au rôle des institutions de l'UE dans le domaine des droits fondamentaux".

La Charte dans la législation européenne

Le rôle premier de la Charte consiste à garantir le respect des droits fondamentaux par les institutions de l'UE lors de l'élaboration des nouvelles législations européennes.

Le rapport donne quelques exemples : En 2011, la législation de l'UE sur l'utilisation des scanners de sécurité dans les aéroports a dû tenir compte de la dimension "droits fondamentaux" et mettre l’accent sur la protection des données à caractère personnel, à la vie privée et à la dignité.

Par ailleurs, un rapport de la Commission a évalué la mise en œuvre de la directive 2006/24/CE2006/24/CE sur la conservation des données qui a pour objectif d’harmoniser les dispositions des États membres relatives aux obligations des fournisseurs de services de communications électroniques ou de réseaux publics de communications de conserver certaines données générées ou traitées par ces fournisseurs, en vue de garantir la disponibilité de ces données à des fins de recherche, de détection et de poursuite d’infractions graves telles qu’elles sont définies par chaque État membre dans son droit interne. Ce rapport a entre autres mis en évidence que la transposition de cette directive par les Etats membres nécessitait des adaptations aux critères des droits fondamentaux

Le rapport de la Commission souligne aussi la vigilance du Parlement européen sur les questions de droits fondamentaux et les responsabilités prises par le Conseil comme co-législateur.

Le respect de la Charte dans les Etats membres : le cas de la Hongrie

D’elle-même, la Commission dit qu’elle "ne garantit pas seulement que ses propositions soient compatibles avec la Charte, mais veille aussi à ce que celle-ci soit respectée lorsque les États membres appliquent le droit de l'UE".

Elle rappelle dans le rapport qu’elle a exprimé en 2011 ses préoccupations au sujet de l'indépendance de l'autorité hongroise de protection des données et des mesures relatives à l'âge du départ à la retraite des juges, des procureurs et des notaires. La Commission avait engagé des procédures d'infraction afin d'obtenir que la Hongrie réponde à toutes ses préoccupations juridiques. Ce différend a été largement documenté par Europaforum.lu.

La Charte dans la jurisprudence européenne

La Charte apporte également, selon le rapport "une contribution croissante à la formulation des décisions rendues par les tribunaux".

En 2011, le nombre d'arrêts citant les droits fondamentaux inscrits dans la Charte a augmenté de 50 % au niveau tant de l'UE que des Etats membres. 27 arrêts de la CJUE l’ont invoquée en 2011, contre 18 arrêts en 2010.

L'un de ces arrêts marquants de la Cour de justice de l'UE a souligné le droit des demandeurs d'asile d'être protégés des traitements inhumains ou dégradants (voir l'arrêt de décembre 2011 et les conclusions de l’avocat général de septembre 2011 en précisant la législation de l'UE qui permet de déterminer le pays responsable du traitement d’une demande d'asile. Cette décision a effectivement exclu les transferts de demandeurs d'asile vers des pays où les conditions d'accueil compromettraient leurs droits fondamentaux.

En mars 2011, la Cour a dit pour droit dans l'affaire Test-Achats qu'une différence entre les primes octroyées aux hommes et aux femmes constitue une discrimination fondée sur le sexe et, en novembre 2011, qu'enjoindre à un fournisseur d'accès Internet de mettre en place un système de filtrage afin d'empêcher une atteinte aux droits d'auteur reviendrait à violer les droits des consommateurs à recevoir et à transmettre des informations (affaire Scarlet contre SABAM).

Les citoyens et la Charte : un malentendu persistant, car la Charte suscite des attentes qu’elle ne peut pas remplir pas plus que la Commission

Les citoyens sont de plus en plus conscients de l'existence de la Charte de l'UE (64 % de l’ensemble des Européens, 58 % des Luxembourgeois), selon un nouveau sondage Eurobaromètre Flash (EB 340, fiche sur le Luxembourg) sur la Charte, également publié aujourd’hui. 45 % des lettres adressées par les citoyens à la Commission sur les droits fondamentaux concernaient des situations auxquelles la Charte pourrait s'appliquer.

Néanmoins, la connaissance précise des cas auxquels la Charte s'applique demeure limitée. 65 % des Européens et 77 % des Luxembourgeois déclarent souhaiter obtenir davantage d'informations sur les voies de recours en cas de violation des droits protégés par la Charte.

Le rapport déplore néanmoins que "les citoyens de l'UE  continuent à méconnaître sa finalité et les situations qui en relèvent ou pas, ainsi que le rôle de l’Union". Plus de la moitié des lettres adressées à la Commission (55 %) en 2011 concernaient des thèmes ne relevant pas de la compétence de l'Union, constatent, dépités, les auteurs du rapport. Ils expliquent : "Il existe une impression répandue dans le public selon laquelle la Charte confère à la Commission un droit général d'intervenir lorsqu'elle soupçonne une infraction aux droits fondamentaux dans l'UE. La Commission a du mal à faire comprendre aux citoyens que tel n'est pas le cas."

La Commission est donc obligée d’expliquer de nouveau que "la Charte s'applique aux États membres lorsqu'ils appliquent le droit de l'UE" et que "chaque pays de l'UE protège les droits au moyen de sa propre constitution et de ses tribunaux". Pour elle, "la Charte ne saurait les remplacer". Donc, si un citoyen pense que ses droits ont été violés, il lui faut, en première instance, saisir une juridiction nationale ou solliciter l'aide d'un médiateur national.

Pour de plus amples informations, les citoyens peuvent se référer à la page Internet que la Commission européenne consacre aux droits fondamentaux, http://ec.europa.eu/justice/fundamental-rights, où le deuxième rapport annuel est disponible, mais en langue anglaise uniquement, comme la plupart des textes sur les différentes versions linguistiques de la page. Etre informé sur ses droits demande toujours de la part du citoyen européen un grand effort, malgré les efforts déployés par la Commission et la variété d'instruments d'information livrés par la page en question.