L'année 2011 se sera achevée avec une croissance du PIB établie au final à 1,6 %, à la faveur d'une "très légère progression" au cours du 4e trimestre 2011 (+ 0.2 % par rapport au trimestre précédent). "L’année 2011 représente – hormis les années de crise 2008 et 2009 – l’une des plus faibles en termes de croissance de l’activité, témoignant de la fragilité de la situation et illustrant un contexte économique toujours difficile."
Le pays doit "à la contribution très positive des services du secteur protégé (Administration, Education, Santé et action sociale, Services collectifs sociaux et personnels et Services domestiques)" le fait que la situation économique n'ait pas été plus morose.
Reprenant les projections réalisées par la Commission européenne, le STATEC considère qu’une baisse de croissance interviendra en 2012 "dans les pays émergents et en développement, qui évoluaient sur un rythme relativement soutenu en 2011".
La précédente prévision prévoyait une croissance de 0.5 %. Désormais, suite aux prévisions intermédiaires du printemps 2012, c'est sur une "hypothèse de récession" dans la zone euro en 2012 (-0,3 %) que reposent les projections du STATEC. L'effet combiné "des effets d’allègement des bilans des sociétés sur l’économie réelle", "des nouveaux efforts de resserrement budgétaire des états mis en place par les Gouvernements de la zone euro" et "des situations plus graves qu’anticipées" en Italie et en Espagne sont responsables de ce revirement. "Rares sont les années où il n’y a pas eu de révision substantielle des résultats, suite à des événements particuliers ou des inflexions non anticipées", note d'ailleurs le service de statistique. En 2012, "l’activité mondiale devrait ralentir en 2012 sans pour autant s’effondrer"
"L’activité pour la zone euro devrait graduellement reprendre avec des rythmes d’expansion proches de 2%, voire au-dessus, à partir de 2014 seulement."
Les nouvelles données utilisées par le STATEC prévoient désormais, pour 2012, une croissance de l'économie luxembourgeoise de 1 %. Et prévient : "On se croirait projeté en arrière, lorsque, fin 2008, début 2009, les prévisions macro-économiques avaient une durée de vie de moins de 3 mois. En effet, l’année 2012 s’approche, en termes de volatilité, de l’année 2008". Au niveau européen, le pronostic pour 2012 est celui d'une légère récession, de 0,3 % du PIB, en raison de la crise de la dette en Espagne et en Italie. Or, selon "l’analyse de sensibilité" menée par le STATEC, pour chaque baisse de 0,5 % du PIB en Europe, le Luxembourg enregistre pour sa part une baisse de 0,6 %.
L'atonie des secteurs industriel et financier explique "le faible développement économique actuel" qui rappelle au STATEC "la crise des années 70 et du début des années 80." Le secteur financier, cette "force motrice par excellence de l’économie domestique, devrait connaître en 2012 une nouvelle année de récession de l’activité (…) mais devrait par la suite regagner en puissance". Il devrait en effet enregistrer une nouvelle baisse de 2.5 % en 2012 (après -5 % en 2011), "avant une reprise graduelle, aboutissant à un taux d’expansion moyen de 4.5% sur 2014/15". Cette dernière hausse restera toutefois de 2 points inférieure à l’expansion moyenne 1985-2011.
En 2013, le Luxembourg devrait connaître une croissance atteignant 2,4 %, sans prendre en compte toutefois les effets du dernier programme de consolidation du gouvernement. Le STATEC souligne à ce sujet que ces mesures pourraient avoir un effet de ralentissement sur la hausse du PIB, qui pourrait coûter 0,3 à 0,4 points de pourcents, en raison de la réduction de 125 millions d'euros des investissements (qui améliorerait le solde public de 100 millions par an, soit 0.2 à 0.1 point de PIB), des frais de fonctionnement de l'Etat ainsi que de l'affaiblissement du pouvoir d'achat "suite à la baisse envisagée des prestations sociales et la hausse proposée de la fiscalité". La consommation privée serait en effet réduite de 0.7 à 0.8 % par ces mesures.
Toutefois, trois mesures jouent en faveur des ménages : la nouvelle révision des cotisations des ouvriers suite à la réforme qui a mené au statut unique, l'abolition de l'impôt de crise et l'accord salarial dans la fonction publique qui est désormais gelé. La modulation de l'indexation joue en défaveur mais le solde reste un effet cumulé de l'ordre de 0.1 % en 2015 sur le PIB.
Au final, le revenu disponible des ménages aura en 2015 et en cumul, augmenté d'environ 0.4 %. Il en résulte une hausse de la consommation privée de 0,3 % et une légère hausse du taux d'épargne.
A l'horizon 2015, le STATEC "admet toujours" une croissance de l’ordre de 4 % à moyen terme. Ce taux devrait être atteint dans les années 2014 et 2015, et non plus pour les années 2013 et 2014 prévues un an plus tôt. Ainsi, les années 2014-15 devraient connaître des progressions respectives estimées à 3,4 et 4,1 %.
Etudiant le budget, le STATEC constate le ralentissement des dépenses (3.3 % par an de 2012 à 2015). Il s'en est d'abord étonné avant de l'expliquer ainsi : "Les dépenses ont par le passé souvent été gonflées par des mesures structurelles ou exceptionnelles" telles la "Mammerent", le bonus pour enfants, les chèques services et les projets d’infrastructure d’envergure. Le ralentissement est ainsi plutôt à voir comme "un retour à la normale".
En 2015, les dépenses publiques n'augmenteront que légèrement (+0.1 %) tandis que les recettes diminuent plus franchement (-0.7 %). Il en résulte une dégradation du solde public de 0.3 point.
Les recettes diminueront en raison de la baisse des cotisations, de la baisse des impôts directs des ménages (impôt de crise) et de la modulation de l'indexation (baisse de la masse salariale donc des impôts). "Les deux mesures prises ensemble constituent quelque 0.2 % du PIB (nominal) et réduisent le PIB réel de 0.1 % après la deuxième année."
Plus largement, le STATEC constate que la part des recettes publiques montre une tendance baissière depuis 2002. Elle est passée de 43 % en moyenne du PIB à 41.5 % en 2011 et devrait passer à 40 % à l’horizon 2015 (à politique inchangée). Les explications seraient à trouver par la réforme fiscale des années 2001-2003 qui a allégé la fiscalité sur les entreprises et les personnes physiques de 3 points de PIB,
Il manquera encore 1 milliard d'euros de recettes en 2015 par rapport à 2011 en raison de l'abolition de l’impôt de crise à partir de 2012 ( - 105 millions), l'épuisement de réserves de retards d’imposition sur les exercices antérieurs au niveau des sociétés (- 200 millions) et la disparition de 75% de la TVA perçue sur le commerce électronique en 2015 (600 millions d'euros). Sans ces "facteurs exceptionnels", le solde public serait de l’ordre de -1.5 % en 2015 et non de -3.3 %, dans le scénario central du STATEC.
Le résultat de ce déséquilibre entre recettes et dépenses est que le solde des finances publiques devrait "continuer à se dégrader" et atteindre un "point bas" à -2.8 % en 2013. Ensuite, "une légère amélioration viendrait avec la reprise conjoncturelle, mais différents facteurs exceptionnels sont susceptibles d’interférer avec ce scénario bénin".
Le taux de chômage (6 % en 2012) continuerait d'augmenter pour atteindre 6,7 % en 2014 avant d'emprunter une courbe descendante l'année suivante.
"Le ralentissement affectant le PIB sur les derniers trimestres se transmet progressivement au marché du travail: le 4e trimestre a enregistré moins de créations d'emplois (avec une hausse simultanée du chômage) et les données déjà disponibles sur le début de 2012 confirment la détérioration." Le travail intérimaire enregistre un recul et le chômage partiel reste élevé.
Le marché du travail devrait donc continuer à être fortement touché et le chômage devrait augmenter en raison de "la réaction retardée et peu prononcée des flux migratoires à la crise économique". La décélération de la croissance de la population en âge de travailler est lente. A partir de 2012 et jusqu’en 2015, le STATEC prévoit un ralentissement des 'flux entrants nets', ce qui devrait ramener le taux de croissance de la population totale à quelque 1.3 % à moyen terme, soit un chiffre inférieur à la moyenne historique (+1.4 % par an). Dans ce contexte, la barre des 4 % d'emplois nouveaux nécessaire à la résorption du chômage vacille. "Si le chômage devait finalement baisser en 2015 sans que la croissance de l’emploi n’atteigne le seuil des 3.5-4 % (auquel il baissait par le passé) ce serait parce que la population en âge de travailler aurait fini par s’ajuster (via une baisse des migrations nettes) en ralentissant de façon plus marquée."
Le STATEC prévoit en effet, après une hausse de 2,8 % en 2011 et de seulement 2,1 % en 2012, que la création d'emplois atteigne son "point bas" en 2013 en n'augmentant que de 1,5 %. La reprise à la hausse reviendrait alors en 2015. Par ailleurs, le STATEC a également calculé que le plan d'économie récemment ficelé par le gouvernement pourrait constituer un frein de l'ordre à 0,1à 0,5 point de pourcents, en matière de création d'emplois.
Les prix à la consommation ont augmenté de 3.4 % sur l'ensemble de 2011, poussés notamment par les prix de l'énergie (+16 % pour les produits pétroliers).
Le taux d'inflation est resté proche de 3 % au début de 2012 mais devrait progressivement converger vers une valeur de 2.5% mi 2012, "pour peu que le prix du pétrole ne connaisse pas de nouvelle flambée". Le ralentissement économique et "l'impact moins important des hausses de prix administrés (eau, services de santé) que durant l'année passée" devraient réduire le taux d'inflation moindre pour 2012 et 2013, "avant de remonter à la faveur de la reprise conjoncturelle prévue à moyen terme".
"Cette conjoncture peu dynamique transparaît aussi dans l'évolution de la rémunération du facteur travail", note le STATEC. Le coût salarial moyen par tête a vu sa progression se réduire considérablement au cours du deuxième semestre 2011 pour s'inscrire à un rythme de l'ordre de 1.5 % en fin d'année. Malgré la modulation de l'indexation, une embellie est attendue en 2012, en raison de l’entrée en vigueur de la convention collective du secteur financier.
"La période récente est marquée par une hausse historiquement faible des salaires réels (coût salarial moyen nominal au sens des comptes nationaux déflaté par les prix à la consommation tels que mesurés par l’IPCN, autrement dit les salaires corrigés de l’inflation). Cette période de faiblesse débute en 2006 mais devrait s’arrêter en 2012", note par ailleurs le STATEC.