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Politique étrangère et de défense
Conseil Affaires étrangères : des sanctions contre le régime syrien, plus d’aide aux réfugiés et un soutien au déploiement d’une force de stabilisation africaine au Mali
23-07-2012


Jean Asselborn en conversation avec ^son homologue britannique, William Hague, au Conseil "Affaires étrangères" du 23 juillet 2012 - source: consiliumLors de leur réunion au sein du Conseil "Affaires étrangères" du 23 juillet 2012 à Bruxelles, les ministres des Affaires étrangères de l’UE, ainsi que celui de la Croatie, futur membre de l’UE, se sont concentrés, sous la présidence de la Haute Représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité commune, Catherine Ashton, sur la situation critique en Syrie : Ils ont pris des décisions sur le soutien aux réfugiés, des sanctions à l’égard du régime, et ils ont mené des discussions sur la manière d’assurer une transition vers un changement de régime politique. Un autre point important de leurs discussions est le soutien de l’UE au déploiement d'une force de stabilisation africaine sous mandat de l'ONU, au Mali, et la décision de sanctionner ceux qui menacent la transition démocratique dans ce pays.

La Syrie

Aide pour les réfugiés

Le Conseil a d’abord promis d'offrir de "l'aide supplémentaire, y compris financière, pour aider les pays voisins, notamment le Liban et la Jordanie, à accueillir le nombre croissant de réfugiés". La Commission européenne a annoncé qu’elle avait doublé son aide d'urgence aux réfugiés en Syrie et dans les pays voisins, la portant à 63 millions d'euros. Les Etats membres de l'UE ont pour leur part débloqué à ce jour quelque 27,5 millions d'euros d'aide humanitaire. L'ONU évalue à au moins 120.000 le nombre de réfugiés syriens en Jordanie, au Liban, en Turquie et en Irak. Les dernières estimations font état de plus d'un million de personnes déplacées en Syrie même.

Listes noires, gels d’avoir et interdictions de visas

Le Conseil a ensuite ajouté 26 personnes, essentiellement des militaires et des membres des services de renseignement et trois nouvelles sociétés, dont la compagnie aérienne nationale Syrian Air, à ses listes noires de gels d'avoirs et d'interdictions de visa. Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a précisé à la journaliste Marisandra Ozolins du Tageblatt qu’il s’agissait de personnes qui avaient été identifiées par l’ONG Human Rights Watch comme des tortionnaires. Il a ajouté que la mesure prise à l’encontre de la compagnie aérienne syrienne aura pour conséquence d'interdire à la compagnie Syrian Air d'atterrir en Europe. Au total, 155 personnes et 52 sociétés ou administrations sont maintenant sanctionnées par l'UE.

Embargos

Le Conseil a également décrété un embargo pétrolier et un embargo sur les armes, renforcé par une obligation de contrôle des navires et aéronefs soupçonnés de le contourner. Cette obligation sera valable dans les ports et aéroports de l'UE, ainsi que dans les eaux territoriales européennes. L’embargo aura pour conséquence d’obliger la Russie à trouver d'autres routes pour approvisionner la Syrie en matériel militaire.

Alors que la Syrie a pour la première fois officiellement reconnu posséder des armes chimiques et menacé de les utiliser en cas d'"intervention" militaire des Occidentaux, l'UE s'est dite "profondément inquiète du recours potentiel" à ces armes.

Perspectives et incertitudes

Le Conseil a souligné son regret quant à l’absence d’accord au niveau du Conseil de sécurité des Nations unies, une absence d’accord due à l’attitude de la Russie et de la Chine, sur une résolution qui aurait permis d’adopter des mesures favorisant une mise en œuvre effective du plan Annan. En réaffirmant son aspiration à la liberté, la dignité, la démocratie et le respect des droits de l’homme pour le peuple syrien, le Conseil a salué la prolongation de la Mission de supervision des Nations Unies en Syrie (MISNUS).

Jean Asselborn a néanmoins mis en garde contre des espoirs excessifs que l’ensemble de ces mesures accélère la chute du régime Assad. L’important est d’arriver à un terrain d’entente avec la Russie et la Chine en coopération avec la Ligue arabe, ce qui se répercuterait au niveau des Nations Unies, en panne de décision. Une issue serait d’accepter la proposition de la Ligue arabe d’accorder à Bachar al-Assad un « sauf-conduit » s’il acceptait de quitter le pouvoir, a expliqué Jean Asselborn, qui lui-même n’est pas très en faveur de l’impunité. Les conditions du départ du président syrien continuent donc à diviser les Européens. Plusieurs ministres ont plaidé pour traduire Bachar al-Assad devant la justice internationale, comme l’Autriche et le Royaume Uni, tandis que d'autres estiment qu'il vaut mieux lui permettre de fuir à l'étranger.

Le Conseil a ensuite fait le point sur les risques liés aux retombées de la crise syrienne sur le Liban. Dans ce contexte, le Conseil a réaffirmé son soutien au dialogue national, ainsi que l’importance du respect des obligations internationales et de l’impartialité des institutions.

La transition en Libye

Les ministres se sont également penchés sur le processus de transition politique en Libye. Le Conseil, qui a salué la bonne tenue et l’organisation des élections, a exprimé son appréciation pour le travail du Conseil national de transition (CNT). Rappelant l’importance que le Conseil attache à l’élaboration de la nouvelle constitution libyenne, celui-ci a insisté sur la prise en compte de l’établissement de l’État de droit ainsi que du respect des droits de l’homme. Les membres du Conseil ont également fait référence au cadre institutionnel d’un éventuel soutien à la Lybie et ont souligné l’importance d’une intégration régionale plus poussée.

Le Mali

Le Conseil s’est dit prêt à soutenir le déploiement d'une force de stabilisation africaine sous mandat de l'ONU, au Mali, et à sanctionner ceux qui menacent la transition démocratique dans le pays. Catherine Ashton a été chargée de faire des "propositions concrètes" en vue de soutenir "le possible déploiement d'une force de stabilisation de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) au Mali bien préparée, sous mandat de l'ONU et en concertation avec un gouvernement d'union nationale et l'Union africaine". Depuis avril 2012, le Mali est confronté, après des luttes politiques internes, à une sécession dans le Nord, avec la proclamation de l’État indépendant de l’Azawad. Mais ces territoires sont entretemps tombés dans les mains de divers groupes islamistes, et dans les villes de Gao et Tombouctou, le régime de ces groupes a pris les traits d’une dictature islamiste des plus violentes et a aussi vu le saccage de plusieurs monuments qui font partie du patrimoine de l’humanité. Dans ce contexte, l'UE se tient « prête à adopter des sanctions ciblées à l'encontre de ceux qui continueraient à menacer le processus de transition démocratique, la paix, la sécurité et la stabilité au Mali", comme le dit la déclaration commune adoptée par les ministres.

Finalement, le Conseil a demandé lundi à la Commission européenne de faire des propositions en vue de "reprendre graduellement la coopération au développement y compris le soutien au processus électoral" mis en place par le gouvernement de Bamako, capitale du Mali, qui accompagnerait "d'une façon incitative la mise en œuvre par un gouvernement d'union nationale d'une feuille de route consensuelle dès que les conditions seront réunies".