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Economie, finances et monnaie - Marché intérieur
Le Conseil de gouvernement a adopté deux projets de loi sur les assurances qui transposent la "directive solvabilité II", avec des conséquences importantes pour le contrôle prudentiel des entreprises et les contrats d’assurance
29-06-2012


Solvency IILe Conseil de gouvernement a adopté le 29 juin 2012 deux projets de loi sur le secteur des assurances qui transposent différents aspects de la "directive solvabilité II" du 25 novembre 2009 sur l’accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice, deux projets de loi qui impliqueront des changements notables. 

Le premier projet de loi est d’ordre structurel, dans la mesure où il constitue une réforme du contrôle prudentiel des entreprises d'assurances et de réassurances.

Le deuxième projet de loi transpose les dispositions de la directive qui portent sur les contrats d'assurance. Le changement majeur est ici que dans tous les nouveaux contrats d'assurance, le sexe ne pourra plus être utilisé comme facteur de différenciation dans le calcul des primes et des prestations d'assurance. Ce changement est considéré par la Commission comme une bonne nouvelle, comme un nouveau pas vers une vraie égalité des genres, tandis que pour les consommateurs, il s’agit d’une mauvaise nouvelle, car une augmentation des primes d’assurance est à prévoir dès que la loi entrera en vigueur. 

La réforme du contrôle prudentiel des entreprises d'assurances et de réassurances

Le premier projet de loi a pour objet de remplacer la loi modifiée du 6 décembre 1991 sur le secteur des assurances. Il transpose la "directive solvabilité II" du 25 novembre 2009 sur l’accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice. Cette transposition implique une réforme en profondeur du contrôle prudentiel des entreprises d'assurances et de réassurances.

À l'heure actuelle, la surveillance des entreprises d'assurances et de réassurances repose en effet sur des règles précises, qui s’appliquent indistinctement à toutes les entreprises qui se trouvent dans une situation comparable, et cela sans égard à des expositions au risque, souvent fort divergentes entre les différentes entreprises.

À l'avenir, le nouveau système de surveillance fera que les entreprises

  • devront adopter une vision détaillée et exhaustive des risques auxquels elles sont exposées,
  • développer des modèles économiques et mathématiques leur permettant une évaluation correcte de ces risques et des moyens financiers nécessaires pour y faire face,
  • adapter régulièrement leurs capitaux minima et leur solvabilité aux risques encourus,
  • se doter d'un système de gouvernance interne approprié et
  • rapporter aux autorités de surveillance d'une manière autrement plus exhaustive et plus fréquente sur l'ensemble de leurs activités que de par le passé.

Les autorités de surveillance devront

  • adapter leur fonctionnement et acquérir des connaissances détaillées du fonctionnement de chaque entreprise individuelle,
  • connaître en détail les risques auxquels chaque entreprise est exposée afin d'être en mesure de décider si ces risques sont pris en compte de manière adéquate et, enfin,
  • comprendre et discuter d'égal à égal les modèles internes de gestion des risques utilisés par les entreprises aux fins de la validation de ces modèles par les autorités de surveillance.

Il s'y ajoute que dorénavant les autorités nationales de surveillance des entreprises d'assurance et de réassurance devront coopérer étroitement entre elles et avec l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (EIOPA ou AEAPP) afin de faciliter la surveillance des groupes d'assurance transfrontaliers.

Les autorités de surveillance nationales seront par ailleurs tenues d'échanger des informations avec le Comité européen du risque systémique (CERS) qui est responsable pour la surveillance macro-prudentielle du système financier dans l'Union européenne et chargé depuis janvier 2011 de détecter les risques pesant sur le système financier dans son ensemble et d'émettre des alertes afin que des mesures soient rapidement prises lorsque c'est nécessaire

Le Commissariat aux Assurances aura par ailleurs la possibilité d'exiger la constitution d'un collège avec jusqu'à trois membres agréés aux fins de diriger une entreprise d'assurance ou de réassurance.

Ensuite, les amendes qui pourront être prononcées sont alignées sur celles qui sont prévues pour les infractions aux obligations en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

Les changements en matière de contrats d’assurance

Le Conseil a ensuite adopté un deuxième projet de loi portant modification de la loi modifiée du 27 juillet 1997 sur le contrat d’assurance et de la loi modifiée du 8 décembre 1994 relative aux comptes annuels et comptes consolidés des entreprises d’assurances et de réassurances de droit luxembourgeois, aux obligations en matière d’établissement et de publicité des documents comptables des succursales d’entreprises d’assurances de droit étranger.

Ce projet de loi transpose certaines dispositions de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice, communément appelée "directive solvabilité II", et plus précisément les dispositions de la directive qui portent sur les contrats d'assurance.

Le projet de loi met aussi en conformité la législation luxembourgeoise avec le jugement C-236/09 de la Cour de Justice de l’Union européenne qui avait déclaré invalide l'article 5, paragraphe 2 de la directive 2004/113/CE traitant de l'égalité entre les femmes et les hommes. Ce texte permettait de déroger, sous certaines conditions, au principe de l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes.

La future loi sur le contrat d'assurance prévoira dès lors que dans tous les nouveaux contrats d'assurance, le sexe ne peut pas être utilisé comme facteur de différenciation dans le calcul des primes et des prestations d'assurance.

Pour rappel : La Cour de Justice de l’UE avait rendu le 1er mars 2011 un arrêt dans l’affaire C-236/09 -Association belge des Consommateurs Test-Achats ASBL e.a.. Cette association belge de consommateurs avait saisi le Cour constitutionnelle belge d’un recours en annulation de la loi belge transposant la directive 2004/113/CE. Cette directive interdit toute discrimination fondée sur le sexe dans l’accès à des biens et services et dans la fourniture de biens et services. La directive interdit donc, en principe, de prendre en considération le critère du sexe pour calculer les primes et les prestations d’assurance des contrats d’assurance conclus après le 21 décembre 2007. Elle prévoit cependant une exception selon laquelle les États membres peuvent, à partir de cette date, autoriser des dérogations à la règle des primes et prestations unisexes, pour autant qu’ils peuvent garantir que les données actuarielles et statistiques sous-jacentes sur lesquelles se fondent leurs calculs sont fiables, régulièrement mises à jour et à la disposition du public. Dans son arrêt, la Cour avait constaté "un risque que la dérogation à l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes prévue par la directive soit indéfiniment permise par le droit de l’Union" et elle a donc décidé de mettre fin à cette dérogation avec effet au 21 décembre 2012.

Viviane Reding, avait déclaré en mars 2011 qu’il s’agissait là d’une "avancée importante pour clarifier le droit fondamental de l’égalité des genres dans le droit européen". La presse luxembourgeoise s’était par contre fait l’écho de réactions nettement moins enthousiastes du côté des milieux des consommateurs et du secteur des assurances à cause de la hausse des prix des assurances qui pourrait résulter de cette décision qui sera d’application fin 2012.

En ce qui concerne la loi sur les comptes annuels des entreprises d'assurances et de réassurances, la modification majeure consiste à rendre applicable, au secteur de l'assurance, les solutions dégagées par le projet de loi n° 6376 en matière de détermination des réserves distribuables en cas d'évaluation à la juste valeur qui est applicable aux seules sociétés commerciales établissant leurs comptes annuels conformément au titre II de la loi modifiée du 19 décembre 2002 et qui a été récemment introduit dans la loi modifiée du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales.